Le gouvernement britannique vient d’annoncer une initiative ambitieuse visant à intégrer l’intelligence artificielle (IA) dans les services publics du pays. L’objectif est clair : moderniser des outils jugés « archaïques » qui coûteraient actuellement 45 milliards de livres (53 milliards d’euros) par an à l’administration. Cette transformation numérique d’envergure promet des économies substantielles et une amélioration des services aux citoyens.
Un nouvel ensemble d’outils d’IA pour les fonctionnaires
Le ministère de la Science, de l’Innovation et de la Technologie a développé une série d’outils basés sur l’IA qui seront progressivement déployés auprès des agents de l’État. Si certaines fonctionnalités sont d’ores et déjà disponibles, l’objectif est de généraliser rapidement leur utilisation à l’ensemble des fonctionnaires. Parmi les solutions proposées :
- Un outil d’analyse accélérée des réponses aux enquêtes publiques
- Un service sécurisé de transcription pour les réunions
- Une aide à la préparation de briefings
- Un assistant juridique virtuel
Actuellement, le traitement des milliers de contributions citoyennes lors des consultations publiques est largement sous-traité à des prestataires externes. Un processus long et coûteux, facturé environ 100 000 livres à chaque fois selon une source gouvernementale. L’IA promet d’accélérer considérablement ces analyses tout en réduisant la facture pour le contribuable.
Des technologies archaïques qui plombent les finances publiques
L’annonce du gouvernement s’appuie sur les conclusions d’un rapport réalisé avec le cabinet Bain & Company. Selon cette étude, l’utilisation de technologies obsolètes au sein de l’administration engendrerait un manque à gagner de 45 milliards de livres par an pour les caisses de l’État. Des systèmes vétustes qui nécessitent d’importants coûts de maintenance et freinent la numérisation des services aux usagers. Près de la moitié des démarches administratives ne seraient ainsi toujours pas accessibles en ligne à ce jour.
Nous allons suivre notre propre voie : tester et comprendre l’IA avant de la réglementer, afin de nous assurer que lorsque nous le ferons, ce sera de manière proportionnée et sur la base de données scientifiques.
Keir Starmer, Premier ministre britannique
Une approche pragmatique malgré les défis éthiques
Si l’IA suscite de nombreuses préoccupations éthiques et sécuritaires, le gouvernement britannique affiche sa volonté d’avancer rapidement sur le sujet. Le Premier ministre Keir Starmer a ainsi déclaré vouloir faire du Royaume-Uni un terrain d’expérimentation privilégié pour les entreprises du secteur, leur permettant de tester leurs innovations avant toute régulation. Une approche qui tranche avec celle de l’Union Européenne, davantage encline à encadrer le développement de ces technologies.Le pari britannique est de favoriser l’innovation tout en collectant des données scientifiques solides pour guider une réglementation future proportionnée.
Au-delà de l’IA, une transformation plus large des services publics
L’introduction de l’intelligence artificielle n’est qu’un aspect d’un plan de modernisation plus global de l’administration britannique. D’autres mesures sont ainsi prévues pour simplifier les démarches des usagers et fluidifier le fonctionnement de l’État :
- Fin de l’obligation de déclarer en personne le décès d’un proche
- Meilleur partage des données entre ministères et avec les collectivités
- Développement des services accessibles en ligne
- Réduction des tâches administratives chronophages
Une transformation d’ampleur qui vise à améliorer l’efficacité de l’action publique tout en réalisant d’importantes économies budgétaires. Reste à voir comment ces changements seront accueillis par les fonctionnaires et les citoyens, et quels seront leurs impacts concrets sur la qualité des services rendus. L’intégration réussie de l’IA dans un domaine aussi sensible que celui de l’administration représente en tout cas un défi majeur, aussi bien technique qu’humain.
Le Royaume-Uni semble en tout cas déterminé à prendre une longueur d’avance dans la course à l’innovation publique grâce à l’intelligence artificielle. Un pari audacieux qui pourrait faire du pays un modèle scruté par de nombreux autres États si les promesses sont au rendez-vous. Mais gare aux dérives potentielles d’un recours excessif à des algorithmes pour gérer des missions d’intérêt général. La technologie ne saurait se substituer totalement au facteur humain et au nécessaire contrôle démocratique dans la sphère publique.