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Violences meurtrières contre des Soudanais au Soudan du Sud

Le Soudan du Sud, en proie à une instabilité chronique, a été le théâtre de violences meurtrières visant des réfugiés soudanais. Au moins 16 Soudanais ont été tués suite à des rumeurs de meurtres de Sud-Soudanais au Soudan voisin. Les autorités peinent à ramener le calme.

Le Soudan du Sud, pays d’Afrique de l’Est fraîchement indépendant mais déjà meurtri par les conflits, a une nouvelle fois été le théâtre de violences inter-communautaires la semaine dernière. Selon un bilan de la police locale, pas moins de 16 ressortissants soudanais ont été tués dans différentes régions du pays suite à la propagation d’informations faisant état du meurtre de 29 Sud-Soudanais de l’autre côté de la frontière, au Soudan.

Bien que le calme soit revenu grâce au déploiement de mesures sécuritaires comme l’instauration d’un couvre-feu, la situation des réfugiés soudanais reste précaire. D’après une source proche de la police sud-soudanaise, les victimes ont été recensées dans quatre États différents : l’Equatoria-Central où se trouve la capitale Juba (3 morts), le Bahr El Ghazal du Nord (9 morts), le Bahr El Ghazal de l’Ouest (3 morts) et le Nil Supérieur (1 mort).

Manifestations anti-soudanaises et chasse à l’homme

Tout a commencé jeudi soir dernier à Juba, la capitale, où une manifestation dénonçant les présumés meurtres de Sud-Soudanais au Soudan a rapidement dégénéré. Des commerces tenus par des Soudanais ont été pris pour cible et pillés. Mais les violences ne se sont pas arrêtées là. Dès le lendemain, elles se sont propagées à travers le pays, prenant des allures de chasse à l’homme visant les ressortissants du pays voisin.

Nous étions dans un état de peur et d’anxiété, car à tout moment des gens pouvaient venir chez nous et nous faire ce qu’ils leur ont fait au Soudan.

Juwari Alaminika, réfugiée soudanaise

Face à la gravité de la situation, les autorités sud-soudanaises ont rapidement réagi en mettant en place un couvre-feu nocturne sur l’ensemble du territoire. Le président Salva Kiir a lui-même appelé la population « à la retenue ». Malgré cela, le bilan s’est alourdi jour après jour pour atteindre les 16 morts recensés, auxquels s’ajoutent de nombreux blessés ainsi que d’importantes destructions matérielles.

Des centaines de déplacés soudanais

Pour tenter d’échapper aux violences, des centaines de Soudanais ont dû fuir leur domicile et leurs commerces pour trouver refuge dans des lieux sécurisés par la police, comme le poste de Buluk à Juba. Des scènes de détresse parmi ces civils pris entre deux feux.

« Mon magasin a été pillé et j’ai perdu tous mes biens. Mon frère a même été blessé », raconte Mohamed Adam, l’un des nombreux soudanais venus « survivre » au Soudan du Sud. Beaucoup ont tout perdu et ne savent pas de quoi demain sera fait dans ce climat délétère.

Les autorités ont entamé lundi le transfert des réfugiés soudanais vers le camp de Gorom près de la capitale. Mais la peur et le traumatisme resteront longtemps présents chez cette communauté vulnérable, déjà fragilisée par la guerre dans son propre pays.

Le spectre de l’instabilité chronique

Ces nouvelles violences meurtrières ravivent le spectre de l’instabilité chronique qui mine le Soudan du Sud depuis son indépendance du Soudan en 2011. Malgré la fin officielle de la guerre civile en 2018, les tensions inter-communautaires persistent et dégénèrent régulièrement.

Le pays peine à se reconstruire et à pacifier les relations entre ses différentes composantes ethniques. La précarité économique et les luttes de pouvoir attisent les rancœurs et la méfiance, sur fond de traumatismes non résolus.

Le Soudan du Sud reste pris dans un cercle vicieux de violences où le moindre incident peut mettre le feu aux poudres. Il est urgent de s’attaquer aux racines du mal.

Un analyste de l’International Crisis Group

Les derniers événements tragiques montrent une fois de plus l’ampleur du chemin qu’il reste à parcourir pour stabiliser durablement ce jeune État. Alors que la communauté internationale a les yeux rivés sur le conflit qui fait rage au Soudan voisin, elle ne doit pas pour autant relâcher son attention et ses efforts pour accompagner le Soudan du Sud vers une paix durable.

Car derrière les violences de la semaine dernière, ce sont des destins brisés, des vies fauchées et des espoirs envolés. Mohamed, Juwari et les autres victimes soudanaises méritent que leur souffrance ne soit pas vaine et que le monde n’oublie pas ce pays fragile qu’est le Soudan du Sud. La route vers une stabilité et une réconciliation véritables sera longue, mais chaque pas compte. À commencer par la protection des civils vulnérables, qu’ils soient sud-soudanais ou soudanais.

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