Dans un étonnant retournement de l’histoire, l’ancien mémorial de la dictature communiste de Tirana, capitale de l’Albanie, s’est métamorphosé le temps d’une exposition en véritable sanctuaire à la gloire de l’ex-président américain Donald Trump. C’est le peintre albanais de 69 ans, Avni Delvina, fervent admirateur autoproclamé de Trump, qui est à l’origine de cette quarantaine d’œuvres pour le moins insolites et provocatrices.
Trump en César et en Titan
Dans cette galerie haute en couleurs et en symboles, Trump est représenté sous les traits de figures mythologiques et historiques puissantes. « Donald Trump en Prométhée, en Titan qui s’oppose à Zeus, en lion, en taureau de Wall Street… » énumère Delvina, qui n’a pas lésiné sur les moyens pour glorifier son « idole ». Sur l’un des tableaux les plus marquants, le 45ème président des États-Unis, grimé en César romain, enlace tendrement la statue de la Liberté arborant étonnamment les traits de son épouse Melania.
Une Cène trumpienne
L’artiste n’hésite pas non plus à revisiter des scènes bibliques en y intégrant son héros. Ainsi, dans l’œuvre intitulée « None of You will betray me », le dernier repas du Christ se transforme en un banquet où chaque apôtre arbore le visage de Donald Trump. Une manière pour Delvina de mettre en scène l’importance quasi-divine qu’il accorde à l’ancien locataire de la Maison Blanche.
L’Europe caricaturée
Les dirigeants européens en prennent également pour leur grade. Sur l’une des toiles, on les voit sourire béatement, affublés de gilets de sauvetage oranges à bord d’un canot de sauvetage. Pendant ce temps-là, un Trump en smoking joue nonchalamment du violon, rappelant l’orchestre du Titanic qui continua à jouer jusqu’au naufrage. Une critique à peine voilée de l’aveuglement supposé de l’Europe face aux crises.
Tous les tableaux invitent le public à s’engager dans un dialogue pour voir dans le triomphe de Trump l’histoire d’un monde en crise existentielle.
– Explique Avni Delvina à l’AFP
Musk fessant Zuckerberg
L’exposition n’épargne pas non plus les géants de la tech américaine. Elon Musk y est représenté en train de donner une fessée à Mark Zuckerberg, dans une scène pour le moins décalée. Les artistes ouvertement anti-Trump sont quant à eux caricaturés en réfugiés.
La vérité de Delvina
« Avec un langage artistique riche et dynamique, des sujets provocateurs et une ironie mordante, Delvina est un peintre engagé qui a choisi de présenter sa vérité » analyse Manjola Xhavara, la curatrice de l’exposition. Une vérité née « d’une forte indignation face aux attaques contre un esprit libre comme Trump » confie l’artiste.
Ultime hommage, le tableau « The Wave » représente Trump émergeant d’une vague portant le slogan « To make America great again ». Une œuvre que le peintre albanais aimerait offrir en personne au principal intéressé, en guise de reconnaissance pour ces 4 années de travail acharné.
L’art comme invitation à la réflexion
Si le propos est clivant, l’exposition ne laisse en tout cas personne indifférent. Pour Laura Brivio, une touriste italienne venue assister au vernissage, il s’agit d’« une vision très intéressante sur le monde réel et l’art qui, que l’on soit pour ou contre Trump, mène à la réflexion. »
Et c’est peut-être là tout l’intérêt de cette exposition atypique : bousculer les codes, déranger et surtout faire réagir en utilisant la figure clivante de Trump comme catalyseur. En transformant ce lieu chargé d’histoire en un temple trumpien, Avni Delvina interroge la place de l’art, du pouvoir et des idéologies dans nos sociétés. Une démarche audacieuse, à l’image du personnage central de ses tableaux.