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Journaliste Suspendu Placé en Garde à Vue au Niger

Un rédacteur en chef d'une grande chaîne de télévision nigérienne a été suspendu puis placé en garde à vue suite à un reportage critique du régime militaire. Après le coup d'État de juillet 2023, la pression s'accroît sur les médias...

La liberté de la presse est une nouvelle fois mise à mal au Niger. Seyni Amadou, rédacteur en chef de la chaîne de télévision privée Canal 3 TV, a été interpellé et placé en garde à vue ce samedi 18 janvier 2025. Cette arrestation fait suite à sa suspension la veille par le ministère de la Communication, ainsi qu’à celle de sa chaîne pour une durée d’un mois.

Un sujet sur la « performance » du gouvernement à l’origine des sanctions

Selon des sources proches du dossier, c’est la diffusion d’un reportage portant un regard critique sur l’action du gouvernement militaire, arrivé au pouvoir par un coup d’État en juillet 2023, qui serait à l’origine de ces sanctions. L’arrêté ministériel annonçant les suspensions n’a cependant pas fourni de motifs officiels.

La télévision d’État Télé Sahel a quant à elle justifié les mesures par une « violation des règles d’éthique et de déontologie » de la part de Canal 3 TV. Depuis vendredi, les programmes de la chaîne sont suspendus.

Une décision sans précédent dénoncée par les professionnels des médias

Pour le Cadre d’action des professionnels des médias (CAP-Médias-Niger), cette double sanction est inédite dans l’histoire de la régulation médiatique au Niger, « y compris en période dite d’exception ». Dans un communiqué, l’association demande au ministre de la Communication de revenir sur sa décision.

« Jamais dans l’histoire de la régulation médiatique au Niger, la décision de la suspension d’un média n’a été portée par l’exécutif, y compris en période dite d’exception »

– CAP-Médias-Niger

Un contexte de pression croissante sur les médias depuis le coup d’État

Cette affaire s’inscrit dans un contexte de durcissement envers les médias au Niger depuis l’arrivée au pouvoir des militaires en juillet 2023. Plusieurs journalistes ont été arrêtés et détenus ces derniers mois :

  • Idrissa Soumana Maiga, directeur du quotidien « L’Enquêteur », emprisonné d’avril à juillet 2024 pour « atteinte à la défense nationale »
  • Samira Sabou, interpellée et détenue au secret en septembre et octobre 2023, avant d’être mise en examen notamment pour diffusion de données de nature à troubler l’ordre public

Le régime a également suspendu la diffusion de plusieurs médias internationaux comme RFI, France 24 et la BBC. Dans le classement 2024 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières, le Niger occupe seulement la 80e place sur 180 pays.

Vers une escalade des tensions entre pouvoir et presse ?

Alors que le Niger traverse une période politique trouble depuis le putsch de 2023, cette nouvelle affaire risque d’aggraver les tensions entre le gouvernement militaire et les médias. Les journalistes nigériens, soutenus par les associations professionnelles, semblent déterminés à défendre leur liberté d’informer malgré les pressions.

De son côté, le pouvoir ne montre aucun signe d’apaisement, bien au contraire. La mise en garde à vue de Seyni Amadou apparaît comme un avertissement clair à l’ensemble de la profession. Il reste à savoir jusqu’où le bras de fer entre autorités et organes de presse est susceptible de s’engager dans les prochains mois.

Une chose est sûre : dans un pays encore fragile sur le plan démocratique, cette escalade fait peser de lourdes menaces sur le droit fondamental à une information libre et plurielle. La communauté internationale, les défenseurs des droits humains et l’opinion publique nationale seront attentifs à l’évolution de la situation.

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