En vue de la libération imminente de détenus palestiniens en Israël dans le cadre d’un accord de trêve avec le Hamas, les autorités israéliennes ont pris des mesures pour « prévenir toute manifestation publique de joie » autour de cet événement, selon un communiqué officiel.
D’après une source proche du dossier, l’Autorité pénitentiaire israélienne se prépare à libérer des prisonniers palestiniens conformément aux termes d’un accord auquel le cabinet de sécurité israélien a donné son feu vert. Les premiers élargissements, qui doivent s’étaler sur 42 jours à compter de dimanche, verront les détenus regroupés dans deux lieux : la prison d’Ofer en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967, et le centre de détention Shikma près d’Ashkelon dans le sud d’Israël.
Des consignes strictes pour encadrer les libérations
Le chef du service des prisons, le général Kobi Yakobi, a donné des instructions fermes pour empêcher toute démonstration de joie publique lors de ces libérations sensibles. Ainsi, le transport des prisonniers libérés depuis Shikma ne sera pas assuré par la Croix-Rouge comme à l’accoutumée mais par des unités spéciales, précise le communiqué.
Cet accord de trêve et d’échange de prisonniers, obtenu après une médiation du Qatar épaulée par les États-Unis et l’Égypte, doit encore être formellement entériné par le Conseil des ministres israélien ce vendredi. Il vise à mettre un terme à plus de 15 mois de guerre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza.
Un échange en deux temps
Dans un premier temps, sur une période de six semaines, Israël doit libérer des centaines de prisonniers palestiniens en échange de 33 otages israéliens retenus à Gaza depuis le 7 octobre 2023. Mais cet accord ne fait pas l’unanimité au sein du gouvernement israélien.
Itamar Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale mais minoritaire au cabinet, a vivement dénoncé le fait que des Palestiniens « condamnés à perpétuité » pour avoir tué des Israéliens soient relâchés dans le cadre de cet accord. Une libération qui ravive les tensions et les plaies dans une région déchirée par des décennies de conflit.
Des mesures de précaution controversées
Si les mesures prises par les autorités israéliennes visent à prévenir tout débordement, elles suscitent aussi la controverse. Pour certains, empêcher l’expression de la joie des familles palestiniennes retrouvant leurs proches relève de la punition collective.
Ils ont le droit de célébrer la libération de leurs enfants, de leurs maris. En les en empêchant, Israël ne fait qu’attiser la colère et le ressentiment.
Un militant des droits humains à Gaza
D’autres en Israël estiment au contraire que toute réjouissance autour de la libération de « terroristes ayant du sang sur les mains » est inacceptable et constituerait une provocation dangereuse.
Un accord pour sortir de l’impasse ?
Malgré les crispations, l’accord de trêve et d’échange de prisonniers apparaît comme une étape cruciale pour sortir de l’impasse dans laquelle le conflit israélo-palestinien semble englué depuis la reprise de la guerre à Gaza il y a plus de 15 mois.
Reste à savoir si ce fragile compromis résistera aux pressions des faucons des deux camps et permettra d’ouvrir la voie à une désescalade durable. Les prochaines semaines, avec la libération progressive des détenus, seront à cet égard décisives et potentiellement explosives.
Dans cette poudrière qu’est le Moyen-Orient, chaque geste, chaque décision est scrutée et peut avoir des répercussions incalculables. La libération de prisonniers palestiniens par Israël, aussi encadrée soit-elle, est un de ces événements à haut risque qui cristallise les passions et les peurs de part et d’autre.
Seule une réelle volonté politique de dialogue et de compromis permettra de transformer cet acte en un premier pas vers la paix plutôt qu’en un nouveau détonateur de violence. Un pari audacieux mais nécessaire pour sortir de l’engrenage tragique dans lequel Israéliens et Palestiniens sont enfermés depuis trop longtemps.
Car au-delà des mesures sécuritaires et des controverses politiques, ce sont des vies humaines, des familles brisées, des espoirs anéantis qui se jouent à chaque épisode de ce conflit sans fin. Peut-être est-il temps, à l’occasion de ces libérations, de laisser une chance à l’humanité de part et d’autre. De permettre, même l’espace d’un instant, à la joie de s’exprimer malgré la douleur et les blessures. Une lueur d’espoir dans l’obscurité.