ActualitésInternational

La suspension de X dans l’UE : Scénarios possibles et enjeux

L'ex-commissaire européen Thierry Breton a évoqué une possible suspension de X dans l'UE. Entre sanctions graduelles et réactions politiques, le débat s'intensifie autour de la régulation des géants du numérique. Quels sont les scénarios envisageables pour l'avenir de X en Europe ?

Les récentes accusations visant l’algorithme de X et son propriétaire Elon Musk ont ravivé le débat sur la régulation des géants du numérique en Europe. Alors que certains évoquent une possible suspension du réseau social, quels sont les scénarios envisageables et les enjeux d’une telle décision ?

Un cadre réglementaire européen renforcé

Avec l’entrée en vigueur du Digital Services Act (DSA) et du Digital Markets Act (DMA) en 2024, l’Union européenne s’est dotée d’un arsenal juridique pour mieux encadrer les pratiques des grandes plateformes numériques. Le DSA impose notamment des obligations accrues en termes de modération des contenus pour les réseaux sociaux comptant plus de 45 millions d’utilisateurs actifs mensuels, comme X.

Ce règlement met l’accent sur les risques que font peser ces plateformes sur la liberté et le pluralisme des médias, ainsi que sur les processus démocratiques. Cependant, prouver qu’un algorithme est biaisé en faveur de certains contenus peut s’avérer complexe en pratique, comme le souligne Alexandre De Streel, expert des législations numériques :

Prouver qu’un algorithme est biaisé en faveur de certains contenus, (…) ce n’est pas évident puisqu’il faut avoir accès à l’algorithme lui-même et comprendre comment il fonctionne.

Alexandre De Streel, expert des législations numériques pour le Center on regulation in Europe

Les sanctions possibles en cas d’infraction

Si une plateforme comme X venait à enfreindre les règles du DSA, plusieurs sanctions sont prévues, allant jusqu’à une suspension temporaire en dernier recours. Cette mesure extrême ne peut intervenir qu’après une décision de justice et succéderait à d’éventuelles amendes pouvant atteindre 6% du chiffre d’affaires mondial annuel de l’entreprise.

Toutefois, ce processus de sanctions graduelles s’inscrirait nécessairement dans la durée. Jean Cattan, secrétaire général du Conseil du numérique en France, estime ainsi que le DSA ne permet pas de réagir suffisamment rapidement face à certaines situations, comme les soupçons d’ingérence russe via TikTok lors de l’élection présidentielle roumaine.

Mobilisation politique et débats au Parlement européen

Face aux inquiétudes suscitées par X, une trentaine d’eurodéputés issus de divers groupes politiques ont interpellé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Dans leur courrier, ils l’invitent à examiner la conformité de la plateforme au regard du DSA, citant notamment le soutien affiché d’Elon Musk au parti d’extrême droite allemand AfD dans le cadre de la campagne électorale en cours.

Parallèlement, certaines voix s’élèvent pour défendre le nouveau propriétaire de X au nom de la liberté d’expression. Un eurodéputé slovène est même allé jusqu’à plaider pour l’attribution du prix Nobel de la paix à Elon Musk. Un débat est prévu mardi prochain au Parlement européen à Strasbourg pour discuter des accusations d’ingérences visant le milliardaire.

Le rôle des États membres dans la régulation

Si la Commission européenne est en première ligne pour faire appliquer le DSA, certains États membres souhaiteraient retrouver davantage de latitude pour agir directement contre les plateformes numériques. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a ainsi exprimé son agacement face au manque de réactivité de Bruxelles :

Soit la Commission européenne applique avec la plus grande fermeté les lois que nous nous sommes données pour protéger notre espace public, soit elle ne le fait pas et alors il faudra qu’elle consente à rendre aux Etats membres de l’UE la capacité de le faire.

Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères

Cependant, dans le cas de X, c’est l’Irlande qui est compétente pour prendre d’éventuelles mesures en vertu du DSA, le réseau social y ayant établi son siège européen. Les marges de manœuvre pour une action unilatérale de la France apparaissent donc limitées, en dehors de cas relevant de la sécurité nationale comme la suspension temporaire de TikTok en Nouvelle-Calédonie lors d’émeutes meurtrières en 2022.

Quelles perspectives pour X en Europe ?

À ce stade, une suspension de X dans l’Union européenne reste une hypothèse extrême et lointaine. La priorité des institutions et des États membres est d’abord de faire la lumière sur les pratiques du réseau social et de son algorithme, afin de déterminer s’il respecte les nouvelles obligations issues du DSA.

Si des infractions venaient à être constatées, un processus de sanctions graduelles se mettrait en place, laissant à la plateforme la possibilité de se mettre en conformité. L’enjeu pour X sera de rassurer sur sa capacité et sa volonté de lutter contre la désinformation et les ingérences, sans quoi sa position déjà fragilisée en Europe risquerait de se dégrader davantage.

Plus largement, le cas X illustre les défis posés par la régulation des géants du numérique à l’échelle européenne. Entre nécessité d’agir vite face à certaines dérives et respect des procédures, entre compétences des institutions communautaires et prérogatives des États membres, l’UE continue de chercher le bon équilibre pour préserver son espace public sans entraver l’innovation.

Face aux inquiétudes suscitées par X, une trentaine d’eurodéputés issus de divers groupes politiques ont interpellé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Dans leur courrier, ils l’invitent à examiner la conformité de la plateforme au regard du DSA, citant notamment le soutien affiché d’Elon Musk au parti d’extrême droite allemand AfD dans le cadre de la campagne électorale en cours.

Parallèlement, certaines voix s’élèvent pour défendre le nouveau propriétaire de X au nom de la liberté d’expression. Un eurodéputé slovène est même allé jusqu’à plaider pour l’attribution du prix Nobel de la paix à Elon Musk. Un débat est prévu mardi prochain au Parlement européen à Strasbourg pour discuter des accusations d’ingérences visant le milliardaire.

Le rôle des États membres dans la régulation

Si la Commission européenne est en première ligne pour faire appliquer le DSA, certains États membres souhaiteraient retrouver davantage de latitude pour agir directement contre les plateformes numériques. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a ainsi exprimé son agacement face au manque de réactivité de Bruxelles :

Soit la Commission européenne applique avec la plus grande fermeté les lois que nous nous sommes données pour protéger notre espace public, soit elle ne le fait pas et alors il faudra qu’elle consente à rendre aux Etats membres de l’UE la capacité de le faire.

Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères

Cependant, dans le cas de X, c’est l’Irlande qui est compétente pour prendre d’éventuelles mesures en vertu du DSA, le réseau social y ayant établi son siège européen. Les marges de manœuvre pour une action unilatérale de la France apparaissent donc limitées, en dehors de cas relevant de la sécurité nationale comme la suspension temporaire de TikTok en Nouvelle-Calédonie lors d’émeutes meurtrières en 2022.

Quelles perspectives pour X en Europe ?

À ce stade, une suspension de X dans l’Union européenne reste une hypothèse extrême et lointaine. La priorité des institutions et des États membres est d’abord de faire la lumière sur les pratiques du réseau social et de son algorithme, afin de déterminer s’il respecte les nouvelles obligations issues du DSA.

Si des infractions venaient à être constatées, un processus de sanctions graduelles se mettrait en place, laissant à la plateforme la possibilité de se mettre en conformité. L’enjeu pour X sera de rassurer sur sa capacité et sa volonté de lutter contre la désinformation et les ingérences, sans quoi sa position déjà fragilisée en Europe risquerait de se dégrader davantage.

Plus largement, le cas X illustre les défis posés par la régulation des géants du numérique à l’échelle européenne. Entre nécessité d’agir vite face à certaines dérives et respect des procédures, entre compétences des institutions communautaires et prérogatives des États membres, l’UE continue de chercher le bon équilibre pour préserver son espace public sans entraver l’innovation.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.