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Le Service National Universel Supprimé : Un Projet Macroniste en Sursis

Coup de théâtre au Sénat ! Les crédits du Service National Universel, projet phare d'Emmanuel Macron, viennent d'être supprimés. Jugée "ni possible ni souhaitable", la généralisation du dispositif est plus que jamais compromise. Le gouvernement parviendra-t-il à sauver ce qui reste du SNU ? Rien n'est moins sûr...

C’est un revers cinglant pour l’un des projets phares du quinquennat d’Emmanuel Macron. Jeudi 16 janvier, les sénateurs ont voté la suppression de la quasi-totalité des crédits alloués au Service National Universel (SNU) dans le budget 2023, jugeant sa généralisation « ni possible ni souhaitable ». Une décision lourde de conséquences pour l’avenir de ce dispositif tant défendu par le chef de l’État, mais qui peine à convaincre au Parlement.

Un vote sans appel du Sénat

C’est à une large majorité que la Haute Assemblée a adopté un amendement visant à amputer de 100 millions d’euros les fonds prévus pour le déploiement du SNU, ne laissant subsister que 20 millions, majoritairement réaffectés au budget des Sports. Porté par le rapporteur socialiste Éric Jeansannetas, cet amendement a reçu le soutien des sénateurs de droite comme de gauche :

Après cinq ans d’expérimentation, le SNU n’apporte pas une plus-value suffisante en comparaison des autres politiques d’engagement de la jeunesse pour justifier la poursuite de son déploiement.

Éric Jeansannetas, sénateur PS

Au cœur des critiques : l’incapacité à trouver suffisamment de centres pour accueillir tous les jeunes concernés, et surtout le coût « faramineux » du dispositif une fois généralisé, estimé entre 3,5 et 5 milliards d’euros par an par la Cour des comptes.

Un abandon presque acté à l’Assemblée

Si le gouvernement, par la voix de la ministre des Sports et de la Jeunesse Marlène Schiappa, continue de défendre le SNU, la messe semble dite. À l’automne dernier, la commission des Finances de l’Assemblée nationale avait elle aussi voté la suppression des crédits alloués au dispositif. Sauf concessions majeures ou utilisation du 49.3, l’exécutif aura donc les pires difficultés à faire passer son projet de budget pour le SNU.

Des débuts pourtant prometteurs

Lancé en fanfare en 2019, le Service National Universel visait à promouvoir l’engagement des jeunes de 15 à 17 ans autour d’un « séjour de cohésion » associant activités sportives, culturelles et intellectuelles. Véritable promesse de campagne d’Emmanuel Macron, il devait être généralisé à l’horizon 2026, selon les engagements de l’ancien Premier ministre Édouard Philippe.

La phase d’expérimentation, qui s’est étalée sur cinq années, aura accueilli plusieurs milliers de jeunes volontaires dans les départements pilotes. Mais malgré des retours positifs, et la montée en puissance progressive du dispositif, de nombreuses voix se sont élevées pour critiquer son format et ses objectifs.

Un projet clivant dès l’origine

Les adversaires du SNU lui reprochent notamment son caractère obligatoire, contraire au principe du volontariat qui prévaut dans les autres formes d’engagement citoyen comme le Service Civique. Son aspect « militarisant », avec notamment la pratique du salut aux couleurs et le port de l’uniforme, suscite également la controverse.

D’autres critiques portent sur sa pertinence même comme outil d’intégration républicaine. Beaucoup y voient une réponse inadaptée aux défis que doit relever la jeunesse, et s’inquiètent de possibles dérives.

On ne fait pas la guerre pour la démocratie mais pour les intérêts de la France.

Général François Lecointre, ancien chef d’état-major des armées

Vers une réorientation des politiques de jeunesse ?

En parallèle de la probable mise en sommeil du SNU, d’autres pistes sont évoquées pour réformer les dispositifs d’engagement des jeunes. Le gouvernement a notamment évoqué la création d’un Service Civique Écologique, sur la base du volontariat, qui pourrait voir le jour en 2027 et concerner 50 000 jeunes.

De son côté, le philosophe Luc Ferry plaide pour un renforcement du Service Civique « classique », qui permet déjà à des dizaines de milliers de jeunes de s’engager dans des missions d’intérêt général chaque année. Une option moins clivante et coûteuse que le SNU.

Une chose est sûre : avec un budget 2023 en passe d’être adopté sans les crédits du SNU et le rejet massif du dispositif par les parlementaires, l’avenir du grand projet présidentiel s’annonce bien sombre. Entre réforme des retraites et tensions sociales, le gouvernement a-t-il encore la marge de manœuvre pour sauver ce qui peut l’être ? Réponse dans les prochaines semaines, avec l’épilogue des débats budgétaires au Parlement.

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