Face à la détérioration de l’environnement sur le réseau social X depuis son rachat par Elon Musk fin 2022, un nombre croissant d’utilisateurs souhaite quitter la plateforme. Mais beaucoup hésitent, craignant de perdre leur audience durement acquise. Pour les aider dans cette démarche, une équipe de chercheurs français du CNRS a développé « HelloQuitteX », une application permettant de transférer ses abonnés vers des alternatives jugées plus saines.
Une vague d’#eXit s’organise pour le 20 janvier, jour de l’investiture de Trump
Depuis plusieurs semaines, les appels à quitter X se multiplient. Institutions, personnalités publiques, associations… Tous dénoncent la dégradation de l’environnement sur la plateforme, marquée par une modération défaillante et des algorithmes favorisant les contenus clivants et haineux. Comme un symbole, beaucoup ont choisi la date du 20 janvier, jour de l’investiture de Donald Trump, pour opérer leur migration. Un clin d’œil aux liens supposés entre les deux milliardaires controversés.
Plus de 80 associations disent adieu à X
Jeudi dernier, l’Institut Pasteur annonçait quitter X, comme l’ont déjà fait plus de 80 associations. Parmi elles, la Ligue des droits de l’Homme et Emmaüs France, qui ont publié un communiqué dénonçant « l’absence de modération et le paramétrage des algorithmes [qui] favorisent la prolifération des contenus haineux » sur la plateforme. Un constat alarmant partagé par de nombreux observateurs.
HelloQuitteX, l’app française qui facilite la transition
Mais comment concrétiser cet exode massif ? C’est là qu’intervient « HelloQuitteX », l’application développée par David Chavalarias et son équipe du CNRS. Son principe est simple : permettre aux utilisateurs de transférer facilement leurs abonnés et abonnements vers des réseaux alternatifs comme Mastodon ou Bluesky, jugés plus respectueux de la vie privée et de la liberté d’expression.
« Beaucoup d’utilisateurs sont captifs de leur audience sur X. Certains n’arrivent pas à se décider à partir, de peur de perdre leurs sources ou leur public. »
David Chavalarias, chercheur CNRS et créateur de HelloQuitteX
Selon ses concepteurs, HelloQuitteX a déjà séduit plus de 5000 personnes et organisations en une semaine. Un succès qui témoigne d’une réelle volonté de changer d’air numérique, même si comme le reconnaît Jakob Jünger, chercheur allemand en communication, « changer de plateforme est toujours un processus complexe » avec un « risque de ne pas retrouver les mêmes contenus ».
X devenu « incompatible avec un débat public sain » selon les chercheurs
Pour David Chavalarias, également auteur de l’ouvrage « Toxic Data: comment les réseaux manipulent nos opinions », la situation actuelle sur X est devenue intenable :
« X est devenu très dangereux pour les individus et pour la démocratie. Ce réseau n’est plus neutre, il est incompatible avec un débat public sain. C’est devenu une fabrique de division. »
David Chavalarias, chercheur CNRS et créateur de HelloQuitteX
Un avis partagé par plusieurs études récentes montrant une augmentation de la visibilité des contenus d’extrême-droite depuis le rachat par Elon Musk, au détriment des publications plus modérées ou progressistes. Un rééquilibrage inquiétant pour le débat démocratique.
Musk et la liberté d’expression : une vision controversée
Face aux critiques sur la modération, Elon Musk se retranche derrière une conception absolutiste de la liberté d’expression, rejetant toute forme de « censure ». Une approche que semble partager Mark Zuckerberg chez Meta, suscitant l’inquiétude quant à l’avenir de la lutte contre les discours haineux et la désinformation en ligne.
Si le mouvement initié par HelloQuitteX prend de l’ampleur, il pourrait préfigurer d’autres migrations collectives dans un futur proche. Comme le souligne David Chavalarias, « Facebook serait une prochaine étape si son idéologisation continue ». À moins qu’un sursaut éthique ne s’opère chez les géants du web ? L’avenir du débat numérique en dépend.
