C’est un tournant diplomatique majeur qui s’amorce entre le Liban et la Syrie. Lors d’une visite sans précédent à Damas, le Premier ministre libanais Najib Mikati et le nouveau dirigeant syrien Ahmad al-Chareh ont affirmé leur volonté commune d’ouvrir un nouveau chapitre dans les relations entre leurs deux pays. Cet engagement bilatéral vise à construire des liens stratégiques durables après des décennies de relations ambiguës.
Une rencontre historique pour sceller un avenir prometteur
La visite de Najib Mikati est la première d’un chef de gouvernement libanais en Syrie depuis le début du conflit syrien en 2011. Elle intervient dans un contexte de rapprochement entre les deux voisins suite aux changements politiques récents en Syrie, avec la chute du régime de Bachar al-Assad en décembre dernier. Le nouveau dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a exprimé sa conviction que l’élection de Joseph Aoun à la présidence libanaise conduira à une « situation stable » au Liban.
Lors d’une conférence de presse conjointe, M. Chareh a déclaré qu’il y aurait désormais « des relations stratégiques durables, avec de grands intérêts communs » entre les deux pays. Il a appelé à tourner la page sur « l’esprit des relations passées » et à donner une chance aux peuples libanais et syrien d’établir des « relations positives fondées sur le respect et la souveraineté ».
Nous essaierons de résoudre tous les problèmes par la consultation et le dialogue.
– Ahmad al-Chareh, dirigeant syrien
De son côté, le Premier ministre libanais a insisté sur la nécessité de baser ces nouvelles relations sur « le respect mutuel, l’égalité et la souveraineté nationale ». Il a souligné le rôle clé de la Syrie pour le Liban :
La Syrie est la porte naturelle du Liban vers le monde arabe, et tant qu’elle va bien, le Liban ira bien.
– Najib Mikati, Premier ministre libanais
Vers une résolution des dossiers en suspens
Cette rencontre au sommet ouvre la voie à des avancées sur plusieurs dossiers cruciaux pour les deux pays. Parmi les priorités évoquées : le retour des réfugiés syriens, qualifié d’« urgent » par M. Mikati, qui a perçu une volonté de résoudre cette question chez son homologue syrien. Le Liban, qui accueille environ 2 millions de réfugiés, traverse une grave crise économique depuis fin 2019, aggravant une situation déjà précaire.
La délimitation des frontières terrestres et maritimes fait également partie des chantiers diplomatiques. M. Mikati a annoncé un projet de commission conjointe sur ce dossier, en parallèle d’efforts pour « lutter contre la contrebande » frontalière. Le Premier ministre a aussi insisté sur le renforcement des mesures de sécurité mutuelles pour protéger les deux pays.
Des défis intérieurs prioritaires pour la Syrie
Si la Syrie s’engage sur la voie d’une normalisation de ses relations avec le Liban, le nouveau dirigeant syrien a toutefois précisé que la priorité de son gouvernement restait la situation intérieure et le maintien de l’ordre. Le pays sort affaibli d’une décennie de guerre civile qui a fait plus de 500 000 morts.
Un signal diplomatique fort dans la région
Au-delà de la dimension bilatérale, ce rapprochement syro-libanais s’inscrit dans une dynamique diplomatique plus large au Moyen-Orient. Depuis la chute de Bachar al-Assad, les délégations étrangères se succèdent à Damas pour renouer le dialogue avec les nouvelles autorités syriennes.
Cette visite historique marque donc un tournant dans les relations entre le Liban et la Syrie, ouvrant la voie à une coopération renforcée sur des dossiers clés. Si les défis restent nombreux, l’engagement des deux dirigeants est un signal fort pour l’avenir de la région. Les prochains mois seront décisifs pour voir si cette nouvelle page diplomatique porte ses fruits et contribue à une stabilité durable.