L’avionneur américain Boeing semble être pris dans une spirale infernale d’incidents à répétition. Dernier épisode en date : vendredi dernier, un vol Air Canada reliant Montréal à Lyon, opéré en Boeing 787-8 Dreamliner, a été contraint de rebrousser chemin en plein vol après la détection d’un problème de pressurisation dans la cabine. Un nouvel épisode cauchemardesque pour le géant de l’aéronautique, dont la réputation est sérieusement entachée depuis plusieurs mois.
Demi-tour forcé au-dessus de Terre-Neuve
Le vol AC871 d’Air Canada a décollé vendredi soir de l’aéroport international Pierre-Elliott-Trudeau de Montréal, avec 254 passagers à bord, en direction de Lyon-Saint Exupéry. Mais après environ trois heures de vol, alors que l’appareil survolait la province canadienne de Terre-Neuve-et-Labrador, l’équipage a détecté une anomalie au niveau de la pressurisation de la cabine. Par mesure de précaution, le commandant de bord a pris la décision de faire demi-tour et de retourner à Montréal.
Les passagers ont dû débarquer en urgence et ont été pris en charge par la compagnie. Ils ont finalement pu embarquer le lendemain soir, à bord d’un autre appareil, pour rejoindre Lyon avec une escale imprévue à Paris. Quant au Boeing incriminé, il a été immobilisé pour subir une inspection approfondie. « L’avion est en train d’être inspecté par nos professionnels de la maintenance et de l’ingénierie », a sobrement indiqué un porte-parole d’Air Canada.
Boeing face à une inquiétante série noire
Cet incident, même s’il n’a heureusement pas eu de conséquences dramatiques, vient allonger la liste déjà bien fournie des problèmes rencontrés par Boeing ces derniers temps. Début mai, un Boeing 737 MAX 9 de la compagnie Delta Air Lines avait vécu un épisode particulièrement effrayant, avec une porte arrachée en plein vol. Plus récemment, à deux reprises en trois jours, des Boeing ont dû atterrir en urgence au Canada en raison d’une odeur de brûlé dans la cabine.
Les incidents à répétition ternissent sérieusement l’image de Boeing, déjà écornée par les crashs meurtriers des 737 MAX en 2018 et 2019.
– Michel Merluzeau, expert aéronautique
Si ces incidents n’ont pas fait de victimes, leur multiplication à un rythme soutenu suscite une réelle inquiétude. D’autant que l’avionneur américain peine déjà à restaurer sa réputation après les catastrophes des 737 MAX qui avaient fait 346 morts en Indonésie et en Éthiopie.
Un impact dévastateur sur l’image et les finances
Cette accumulation de mauvaises nouvelles pèse lourdement sur le cours de l’action Boeing en bourse, qui a perdu plus de 60% depuis le premier crash du 737 MAX. Le géant de Seattle a aussi vu ses commandes s’effondrer et doit composer avec l’annulation de centaines d’appareils.
- Le carnet de commandes de Boeing s’est réduit de 1 184 appareils en un an, soit une chute de 24%.
- Plus de 700 commandes de 737 MAX ont été annulées depuis le début de la crise.
- La dette à long terme de Boeing a presque triplé entre 2018 et 2021, dépassant les 60 milliards de dollars.
La confiance des compagnies aériennes et des passagers semble durablement ébranlée. Un défi colossal pour le nouveau patron de Boeing, Dave Calhoun, qui s’efforce de redresser l’entreprise depuis son arrivée aux commandes début 2020. Mais les incidents à répétition compliquent singulièrement sa tâche et assombrissent les perspectives de reprise, pourtant vitale pour l’avionneur.
L’épisode du vol Montréal-Lyon forcé à l’atterrissage d’urgence n’est donc qu’un énième accroc pour Boeing. Mais il confirme la spirale préoccupante dans laquelle l’entreprise semble s’enfoncer mois après mois. Un contexte extrêmement délicat pour le géant américain qui, tel Sisyphe et son rocher, doit sans cesse repartir de zéro pour tenter de regagner la précieuse confiance des voyageurs et reconquérir le ciel.