En ce dimanche 19 mai 2024, la Nouvelle-Calédonie est le théâtre d’une opération de grande envergure menée par les forces de l’ordre. Objectif affiché : rétablir la paix et la sécurité sur ce territoire français du Pacifique Sud, secoué depuis plusieurs jours par une vague de violences sans précédent. Retour sur cette intervention choc, à travers des images saisissantes.
600 gendarmes déployés, dont l’élite du GIGN
C’est un véritable déploiement de force auquel on assiste sur la route stratégique reliant Nouméa, la capitale, à son aéroport international. Pas moins de 600 gendarmes ont été mobilisés pour cette opération baptisée “Rétablissement”, dont une centaine de membres du redoutable GIGN, l’unité d’élite de la gendarmerie nationale.
Leur mission : dégager coûte que coûte cet axe vital, bloqué depuis plusieurs jours par de nombreux barrages dressés par des militants indépendantistes en colère. Car au-delà des tensions politiques, c’est tout le sud de la Grande Terre qui se retrouve isolé et confronté à de sérieuses pénuries.
Blindés et bulldozers pour forcer le passage
Dès 6h40 du matin (21h40 samedi à Paris), un imposant convoi s’élance depuis Nouméa. En tête, des blindés de la gendarmerie, suivis par des engins de chantier réquisitionnés pour l’occasion. Leur rôle : forcer le passage en déblayant méthodiquement la route de tous les obstacles qui l’encombrent.
Au sol, les carcasses calcinées de voitures et les amas de ferraille et de bois s’accumulent sur des centaines de mètres. Un spectacle de désolation, témoin de l’intensité des affrontements qui ont eu lieu ces derniers jours sur ce point névralgique du territoire.
Des heurts sporadiques malgré une progression régulière
Si une quarantaine de barrages restent encore à démanteler selon les autorités, la progression des forces de l’ordre se fait de manière régulière. “Une soixantaine de barrages ont été percés”, a ainsi déclaré le haut-commissaire de la République Louis Le Franc lors d’un point presse en fin de journée.
Le représentant de l’État sur l’archipel a toutefois reconnu que cette avancée ne s’était pas faite sans heurts, évoquant de “légers accrochages” avec des manifestants. Des incidents qui restent cependant sporadiques, preuve selon lui de l’efficacité du dispositif mis en place.
Je veux dire aux émeutiers : stop, retour au calme, rendez vos armes !
Louis Le Franc, haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie
Le spectre d’une crise politique et économique majeure
Car au-delà du volet sécuritaire, c’est bien la situation politique et économique de la Nouvelle-Calédonie qui inquiète le gouvernement. Les violences de ces derniers jours trouvent en effet leur origine dans la colère des indépendantistes kanak, ulcérés par une récente réforme électorale limitant l’accès au corps électoral pour le prochain référendum sur l’indépendance, prévu en 2025.
Un projet de loi qui a mis le feu aux poudres et plongé l’archipel dans une spirale de violences, marquée par des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre, des pillages et des incendies. Avec à la clé, un lourd tribut économique pour ce territoire déjà fragilisé, plusieurs entreprises et commerces ayant dû mettre la clé sous la porte.
L’enjeu de la desserte aérienne
D’où l’importance pour l’exécutif de reprendre au plus vite le contrôle de l’axe Nouméa-aéroport, indispensable au réapprovisionnement de la capitale et du sud de la Grande Terre. Mais aussi et surtout pour permettre une reprise du trafic aérien commercial, interrompu depuis mardi dernier.
Car c’est tout le désenclavement de la Nouvelle-Calédonie qui est en jeu, avec près de 3000 passagers actuellement bloqués sur le Caillou, dans l’impossibilité de rejoindre la métropole ou d’autres destinations dans le Pacifique. Une situation intenable à long terme pour ce territoire ultramarin distant de plus de 16 000 km de Paris.
Vers un retour au calme durable ?
Si les autorités se veulent rassurantes quant à l’issue des opérations en cours, beaucoup s’interrogent sur la capacité du gouvernement à ramener un calme durable en Nouvelle-Calédonie. Car au-delà de la réouverture de la route de l’aéroport, c’est tout le dialogue politique qu’il va falloir renouer entre loyalistes et indépendantistes.
Un défi de taille pour le haut-commissaire Louis Le Franc, qui a promis de recevoir tous les acteurs politiques, économiques et coutumiers une fois que “l’ordre républicain sera rétabli”. Avec l’espoir d’apaiser les tensions et de remettre la Nouvelle-Calédonie sur les rails d’un destin commun apaisé. Une gageure au vu du climat actuel.