Ce mercredi, les étals des marchés lyonnais risquent de rester désespérément vides. En cause ? Un mouvement de grève inédit des agents placiers, ces employés municipaux chargés d’organiser l’installation des commerçants et la fermeture des marchés. Derrière ce coup de semonce, une exaspération grandissante face à la multiplication des agressions verbales de la part de certains marchands.
Des agents à bout, un dialogue social rompu
« La situation est devenue intenable », déplore Sébastien Douillet, secrétaire général du syndicat CGT de la ville de Lyon, à l’origine de l’appel à la grève. Dimanche dernier, un énième incident a mis le feu aux poudres : un agent a été copieusement insulté sur le marché de la Croix-Rousse, nécessitant l’intervention de la police municipale. La goutte d’eau qui a fait déborder un vase déjà bien plein.
En début d’année, un autre agent s’est fait menacer de mort par un commerçant. Commerçant avec lequel il a dû travailler sur chaque marché pendant trois mois.
– Sébastien Douillet, secrétaire général du syndicat CGT de la ville de Lyon
Un climat délétère qui s’est considérablement dégradé depuis le 1er janvier 2024, date à laquelle les agents placiers ont hérité d’une nouvelle mission : la fermeture des marchés, en plus de leur tâche habituelle de placement des commerçants. Une responsabilité supplémentaire qui cristallise les tensions, les agents étant désormais chargés de faire respecter le tri des déchets par les marchands.
Lyon, seule ville à ne pas facturer ce service
Une source de crispation d’autant plus vive que Lyon fait figure d’exception : c’est la seule grande ville à ne pas faire payer ce service de fermeture et de gestion des déchets aux commerçants. Un choix politique qui se répercute directement sur les conditions de travail des agents placiers, en première ligne face au mécontentement des marchands.
Des alertes répétées, restées sans réponse
Face à cette situation explosive, les syndicats tirent la sonnette d’alarme depuis des mois, en vain. Leurs multiples courriers à la municipalité pour l’alerter sur les commerçants agressifs sont restés lettre morte. Un dialogue de sourds qui a fini par convaincre les agents de la nécessité d’un mouvement social d’ampleur.
On demande simplement à la mairie de prendre en compte nos alertes et d’agir contre les marchands qui nous agressent. Mais visiblement, il faut en passer par la grève pour être entendu.
– Un agent placier lyonnais
Un mouvement inédit qui en dit long
C’est donc un bras de fer qui s’engage entre la mairie de Lyon et ses agents des marchés. Un conflit social d’un genre nouveau qui met en lumière la dégradation des conditions de travail de ces employés municipaux souvent méconnus. Reste à savoir si ce coup de semonce suffira à faire bouger les lignes et à instaurer un véritable dialogue pour apaiser des relations devenues explosives. Les prochains jours s’annoncent décisifs.
Les marchés lyonnais, une institution fragilisée
Au-delà du sort des agents, c’est toute l’institution des marchés lyonnais qui vacille. Ces lieux de vie et de commerce, emblématiques de la ville, se retrouvent fragilisés par ces tensions croissantes. Un constat amer pour de nombreux habitants, attachés à ces rendez-vous conviviaux.
Les marchés, c’est l’âme de Lyon. Si même eux se mettent à dysfonctionner, où va-t-on ?
– Une habituée du marché de la Croix-Rousse
Une inquiétude partagée par les élus d’opposition, qui pointent la responsabilité de la mairie dans cette crise sans précédent. Pour eux, l’exécutif doit impérativement reprendre la main pour rétablir un climat apaisé et pérenniser ce patrimoine lyonnais que constituent les marchés.
Le mouvement de grève de ce mercredi sera donc scruté de près. Au-delà de son impact immédiat sur le fonctionnement des marchés, il dira beaucoup de la capacité de la municipalité à régler ce conflit inédit. L’avenir d’une institution locale est en jeu.