Au cœur d’un Soudan ravagé par une guerre fratricide depuis près de deux ans, une lueur d’espoir vient de s’allumer. Pour la première fois depuis le début du conflit meurtrier entre l’armée régulière et les paramilitaires, un convoi humanitaire a réussi à atteindre les populations assiégées au sud de la capitale Khartoum. Un soulagement vital pour des centaines de milliers de civils au bord de la famine, mais qui ne représente qu’une goutte d’eau face à l’immensité des besoins.
28 camions pour 200 000 âmes en détresse
C’est dans la localité de Jebel Aulia, à 40 km au sud de Khartoum, que le petit miracle a eu lieu. Selon un réseau local de bénévoles, 28 camions chargés de nourriture, de médicaments et de matériel médical ont pu rejoindre cette zone coupée du monde depuis le début de la guerre en avril 2023. Parmi eux, 22 poids lourds affrétés par le Programme alimentaire mondial de l’ONU, ainsi que des véhicules de Médecins sans frontières, Care et l’Unicef.
D’après l’Unicef, ces précieuses cargaisons devraient permettre de «répondre aux besoins urgents en matière de santé et de nutrition d’environ 200 000 enfants et familles». Une aide plus que nécessaire dans cette région emblématique des nombreuses zones du Soudan confrontées à une famine de masse, en raison du blocus imposé par les belligérants.
Le défi titanesque de l’accès humanitaire
Mais l’arrivée de ce premier convoi ne doit pas masquer l’ampleur des défis à surmonter pour déployer l’aide humanitaire à travers le pays. Car depuis le début de la guerre, rien n’entre ni ne sort des zones de combat sans l’aval des parties en conflit. Un feu vert qui se fait attendre pendant des semaines, voire des mois, au prix d’intenses négociations et de risques constants pour le personnel humanitaire.
L’accès à la zone a été essentiellement coupé en raison du conflit. Il a fallu trois mois de négociations pour faire passer le convoi. Les camions ont été arrêtés à plusieurs reprises, et les chauffeurs étaient naturellement réticents compte tenu des risques encourus.
Sheldon Yett, représentant de l’Unicef au Soudan
Un travail de titan mené sur le terrain par des volontaires locaux, constamment soupçonnés et menacés par les belligérants. Sans leur abnégation, aucune aide ne pourrait être distribuée dans ces régions assiégées où la faim est devenue une arme de guerre contre les civils.
La moitié du pays au bord du gouffre
Car la situation humanitaire au Soudan n’a cessé de s’aggraver depuis le début des combats. Selon l’ONU, plus de 24 millions de personnes, soit près de la moitié de la population, sont confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë. Dans certaines régions, comme l’État de Khartoum et celui d’Al-Jazira plus au sud, la famine pourrait déjà faire des ravages. Mais impossible d’évaluer précisément son ampleur en l’absence d’accès et de données fiables.
Au-delà de la faim, c’est tout le pays qui s’enfonce dans l’une des pires crises humanitaires de la planète. Depuis avril 2023, la guerre a tué des dizaines de milliers de personnes et jeté sur les routes plus de 12 millions de déplacés et de réfugiés. Des chiffres vertigineux qui ne cessent de grimper au fil des combats.
La communauté internationale appelée à agir
Face à ce drame, les organisations humanitaires tirent la sonnette d’alarme et appellent la communauté internationale à intensifier son soutien. Car sans une action urgente et massive, le Soudan pourrait basculer dans un chaos encore plus profond, aux conséquences dévastatrices pour toute la région.
Mais au-delà de l’aide d’urgence, c’est aussi une solution politique qui est plus que jamais nécessaire pour mettre fin à cette guerre fratricide qui déchire le pays. Un chemin semé d’embûches, tant les deux camps semblent pour l’heure déterminés à poursuivre leur sanglante lutte de pouvoir, quitte à précipiter le Soudan dans l’abîme.