C’est un revers inattendu pour un traitement qui suscitait beaucoup d’espoir. Mardi 4 juin, un comité consultatif d’experts américains s’est prononcé contre l’autorisation d’un traitement révolutionnaire du stress post-traumatique (TSPT) utilisant de la MDMA, plus connue sous le nom d’ecstasy. Une substance actuellement illégale aux États-Unis, mais qui pourrait bien bouleverser la prise en charge de ce trouble psychologique invalidant touchant des millions de personnes.
Un traitement innovant combinant ecstasy et psychothérapie
Développé par le laboratoire Lykos Therapeutics, ce traitement prometteur consiste à administrer de la MDMA lors de séances de psychothérapie. L’objectif : permettre aux patients de revivre leurs traumatismes dans un cadre sécurisant et bienveillant, afin de mieux les surmonter. Lors des essais cliniques, les résultats se sont avérés très encourageants :
- Une réduction significative des symptômes du TSPT chez les participants
- Des effets positifs rapides et durables, se maintenant plusieurs mois après l’arrêt du traitement
- Une amélioration globale de la qualité de vie : moins d’anxiété, de dépression, de pensées suicidaires…
Des résultats qui ont suscité un immense espoir chez les patients et les professionnels de santé. Le TSPT est en effet un trouble complexe et invalidant, qui touche environ 5% de la population américaine. Cauchemars, reviviscences, évitement… Les personnes atteintes ont un risque accru de dépression, d’addiction ou encore de suicide. Et les traitements actuels, essentiellement des antidépresseurs et des psychothérapies, ne sont pas toujours efficaces.
L’espoir d’un changement de paradigme
Dans ce contexte, l’arrivée d’un traitement radicalement nouveau à base d’ecstasy représentait un véritable espoir. D’autant que les scientifiques s’intéressent de plus en plus au potentiel thérapeutique des substances psychédéliques comme la MDMA, mais aussi la psilocybine (champignons hallucinogènes) ou encore le LSD. Des molécules longtemps diabolisées, mais qui pourraient bien révolutionner la prise en charge des maladies mentales dans les années à venir.
Les psychédéliques pourraient transformer la psychiatrie et représenter un changement de paradigme dans le traitement des troubles mentaux.
– Dr John Krystal, psychiatre à l’université de Yale
Pour autant, l’utilisation de ces substances dans un cadre médical soulève encore de nombreuses questions et inquiétudes. D’où la décision des experts de la FDA de rejeter, pour l’instant, le traitement de Lykos Therapeutics.
Les raisons d’un rejet surprenant
Malgré des résultats prometteurs, le comité d’experts indépendants réuni par l’agence américaine du médicament a pointé du doigt plusieurs failles dans le dossier de Lykos Therapeutics :
- Des procédures insuffisamment rigoureuses dans la conduite des essais cliniques
- Un manque de solidité des données pour prouver l’efficacité du traitement
- Des interrogations sur la sécurité et les potentiels effets secondaires d’un médicament à base d’ecstasy
Au final, 9 experts sur 11 ont estimé que le rapport bénéfice/risque du traitement n’était pas suffisant en l’état actuel des connaissances. Un revers cuisant pour Lykos Therapeutics, qui espérait obtenir une autorisation rapide et devenir le premier laboratoire à commercialiser un médicament à base de MDMA.
Et maintenant ? Les prochaines étapes
Si la décision de la FDA n’est pas encore connue, il est peu probable qu’elle aille à l’encontre de l’avis de son comité d’experts. Lykos Therapeutics va donc devoir revoir sa copie et apporter des données complémentaires pour prouver l’intérêt de son traitement. Le chemin vers une éventuelle autorisation s’annonce encore long et semé d’embûches.
Mais malgré cette déconvenue, les défenseurs des psychédéliques à usage thérapeutique ne baissent pas les bras. D’autres essais sont en cours avec la MDMA, mais aussi la psilocybine ou le LSD, dans des indications aussi variées que la dépression, les addictions ou les troubles obsessionnels compulsifs. Avec l’espoir qu’un jour, ces molécules si particulières trouvent enfin leur place dans l’arsenal thérapeutique des médecins.
En attendant, les personnes souffrant de TSPT devront continuer à s’appuyer sur les traitements existants, certes imparfaits mais indispensables. Tout en gardant espoir que la recherche finisse par mettre au point de nouvelles solutions, pour les aider à surmonter leurs traumatismes et retrouver une vie normale.