Au cœur d’un territoire dévasté par plus d’un an de guerre, un fragile espoir renaît. Mi-novembre, une usine de dessalement d’eau de mer a repris ses activités dans la bande de Gaza, marquant le retour discret mais porteur d’un service public essentiel pour les habitants. Confrontés à une pénurie d’eau critique, plus de 600 000 Gazaouis peuvent désormais bénéficier de cette ressource précieuse, acheminée par camions-citernes ou via le réseau de distribution.
Un approvisionnement encore insuffisant face aux besoins
Située près de Deir al-Balah, dans le centre de Gaza, cette station est l’une des trois usines de dessalement du territoire. Avant le conflit, elles répondaient à environ 15% des besoins en eau de la population. Aujourd’hui, malgré une production de 16 000 m3 par jour selon l’Unicef, sa capacité reste limitée face à l’ampleur des besoins, comme le souligne une source au sein de l’Autorité palestinienne de l’énergie et des ressources naturelles (Penra).
La distribution d’eau s’avère également complexe en raison des dommages subis par les canalisations et du manque de moyens de stockage pour les nombreux déplacés vivant dans des abris de fortune. Dans un rapport publié en novembre, l’ONG Human Rights Watch accusait Israël de commettre des « actes de génocide » en restreignant l’accès à l’eau des Gazaouis depuis le début de la guerre, des allégations rejetées par les autorités israéliennes.
Un processus de remise en route semé d’embûches
Le redémarrage de l’usine de Deir al-Balah est le fruit d’un long processus impliquant de multiples acteurs. Tout au long du conflit, la station avait maintenu une activité minimale grâce à des panneaux solaires et des générateurs au fuel, malgré un approvisionnement en carburant au compte-gouttes. Pour retrouver sa pleine capacité, elle devait impérativement être reconnectée au réseau électrique israélien, qui fournit ce service payant à l’Autorité palestinienne.
Fin juin, l’Unicef annonçait un accord avec Israël pour réalimenter l’usine en électricité. Cependant, la ligne censée fournir le courant s’est avérée trop endommagée. « Les travaux ont duré cinq mois pour réparer la ligne provenant de Kissufim (en Israël) », explique Mohammed Thabet, porte-parole de la compagnie d’électricité de Gaza, précisant qu’il s’agit de « solutions d’urgence et temporaires ».
Une coopération inédite dans un contexte tendu
Ce projet a nécessité l’engagement de multiples partenaires, y compris côté israélien, malgré un contexte de tensions. Des sources de sécurité israéliennes affirment avoir suivi « les instructions de l’échelon politique » et mis en place un mécanisme pour « empêcher le vol d’électricité ». Une position qui tranche avec les protestations d’Israéliens s’opposant à l’aide apportée aux Gazaouis ces derniers mois.
Selon plusieurs sources diplomatiques, des acteurs palestiniens, dont certains proches de l’Autorité palestinienne, se sont également impliqués. Cette dernière espère jouer un rôle dans la gouvernance de l’après-guerre à Gaza, alors que ses liens avec le territoire se sont distendus depuis la prise de pouvoir du Hamas en 2007.
Un premier pas vers la reconstruction
Si son impact concret reste encore limité, la remise en service de l’usine de dessalement pourrait avoir une portée politique significative. Ce projet a réuni des acteurs clés susceptibles de participer à la gestion future de la bande de Gaza, un enjeu crucial alors que les espoirs d’un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas ont été ravivés.
Pour les habitants de Gaza, ce retour d’un service public vital est un premier pas vers une possible reconstruction. Après des mois de guerre et de privations, cette lueur d’espoir, aussi ténue soit-elle, laisse entrevoir des jours meilleurs. La coopération inédite entre différents acteurs pour relancer cette infrastructure essentielle pourrait servir de modèle pour d’autres projets d’envergure, indispensables au redressement du territoire palestinien.