ActualitésInternational

La Peur Persiste Sur Les Rives De L’Oskil

Sur les rives de l'Oskil, anciennement lieu de baignade idyllique, la peur et l'incertitude règnent. Alors que Russes et Ukrainiens s'affrontent de chaque côté, les habitants craignent une nouvelle traversée des forces de Moscou et...

Aux abords de la rivière Oskil, dans l’est de l’Ukraine, une atmosphère de peur et d’incertitude plane sur les villages. Jadis havre de paix prisé pour la baignade et les pique-niques, ce cours d’eau est désormais une ligne de front âprement disputée entre forces russes et ukrainiennes. Les habitants, pour beaucoup déplacés, redoutent une nouvelle traversée des troupes de Moscou.

Lioubov Voronova, 72 ans, se remémore avec nostalgie l’époque où l’Oskil était un lieu idyllique. Aujourd’hui, dans son village de Sadovod largement déserté, elle constate amèrement : « Ils sont d’un côté, et nous de l’autre ». Non loin de là, à Dvoritchna, un homme à genoux pleure en racontant les pertes subies, dont sa petite-fille tuée dans une frappe russe.

Une barrière physique et psychologique

Si les forces russes avaient aisément franchi l’Oskil dans les premières semaines de l’invasion en 2022, elles en ont été chassées quelques mois plus tard par une fulgurante contre-offensive ukrainienne. Retranchées depuis sur la rive orientale, elles n’ont jamais renoncé à la reconquérir.

C’est une barrière physique qui a une utilité militaire mais c’est aussi presque une barrière psychologique maintenant.

Mick Ryan, officier australien à la retraite et analyste de la guerre

Selon cet expert, une traversée russe de l’Oskil signifierait que « les choses vont vraiment mal » pour l’armée ukrainienne. Kiev est bien consciente de cet enjeu crucial et s’efforce de fortifier ses positions.

De dangereuses tentatives de percée

En décembre, l’état-major ukrainien a annoncé que les Russes étaient parvenus à établir une tête de pont près de Dvoritchna, envoyant de l’infanterie sur de petits bateaux. Ce groupe aurait depuis été éliminé. Une autre tentative de percée a eu lieu en novembre à Koupiansk, ville traversée par l’Oskil, où des militaires russes déguisés en Ukrainiens ont réussi à s’infiltrer avant d’être repoussés.

Face au risque d’avancée ennemie, les autorités ont récemment ordonné l’évacuation des familles avec enfants vivant près de la rivière. Un impératif douloureux pour les habitants, déjà marqués par les combats acharnés de 2022.

L’angoisse des populations

À Osynové, où un wagon renversé près d’un pont détruit témoigne de la violence des affrontements passés, Mykola, 80 ans, se souvient que les Russes s’étaient emparés de son village « en un clin d’œil » avant de battre en retraite. Cet ancien de l’armée soviétique, qui pêchait et buvait autrefois avec ses amis au bord de l’Oskil, ne peut plus s’en approcher. Aujourd’hui, il a une autre angoisse : « Mes deux fils se battent. Je veux juste qu’ils survivent ».

Plus au sud, à Iatskivka où l’Oskil prend fin, Inna Iourtchenko, commerçante de 52 ans, peine à reconnaître son village jadis bondé de touristes venus profiter de la rivière. « J’ai fondu en larmes en me rappelant comment c’était avant », confie-t-elle, redoutant l’avenir alors que les forces russes intensifient leurs attaques.

Un effort militaire titanesque

Si une traversée de l’Oskil à grande échelle comme en 2022 reste incertaine au vu des moyens colossaux qu’elle nécessiterait, la Russie multiplie les tentatives pour trouver une faille. Selon des analystes ukrainiens, elle aurait ainsi réussi à établir une nouvelle tête de pont près de Dvoritchna.

Moscou comme Kiev semblent déterminés à consolider leurs positions en prévision d’éventuelles négociations de paix. Un regain de tensions qui renforce l’angoisse des riverains de l’Oskil, pour qui ce cours d’eau jadis synonyme d’insouciance est devenu le symbole d’une guerre qui n’en finit pas.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.