Alors que la bataille autour de la réforme des retraites fait rage, le Premier ministre François Bayrou a réaffirmé lundi soir sa position inflexible sur le sujet. Invité sur le plateau de BFMTV, il a écarté toute idée de suspendre ou geler le projet de loi, une demande portée par les oppositions de gauche. Une fin de non-recevoir qui n’exclut pas pour autant la possibilité de compromis.
Bayrou campe sur ses positions mais reste ouvert au dialogue
Malgré la forte contestation, François Bayrou ne compte pas faire marche arrière sur ce dossier brûlant. Interrogé sur une éventuelle suspension de la réforme, le locataire de Matignon a opposé une fin de non-recevoir :
Non, je ne ferai pas ça. Dans quel monde vivent-ils ? Est-ce qu’ils savent que la France est observée, scrutée parce qu’on appelle les agences de notation, et si leurs notes ne sont pas bonnes, alors les taux d’intérêts explosent ?
François Bayrou, Premier ministre
Le chef du gouvernement justifie son refus par la pression des marchés financiers et le risque de voir les taux d’intérêt de la dette française s’envoler en cas de renoncement. Pour autant, il assure rester «ouvert au dialogue» et «prêt à tous les compromis possibles» pour améliorer le texte.
Des aménagements envisageables
Si la suspension pure et simple est exclue, François Bayrou n’écarte pas des ajustements à la marge. Il s’est ainsi dit prêt à ramener de 9 à 6 mois la période de concertation avec les partenaires sociaux initialement prévue. Une main tendue qui ne suffira sans doute pas à convaincre des oppositions vent debout contre le projet.
D’autres pistes sont à l’étude pour rendre la pilule moins amère :
- Aménagement de dispositifs de pénibilité et carrières longues
- Meilleure prise en compte des inégalités femmes-hommes
- Développement de l’emploi des seniors
L’exécutif sous pression pour éviter le blocage
François Bayrou marche sur des œufs sur ce dossier ultra-sensible. Fragilisé par une majorité relative à l’Assemblée, il doit composer avec des alliés LR réticents et une opinion publique majoritairement hostile à la réforme. Un équilibre précaire qui le contraint à un numéro d’équilibriste pour éviter l’enlisement.
Le gouvernement espère toujours faire adopter le texte avant la fin du 1er semestre 2023. Mais le chemin s’annonce semé d’embûches, entre menaces de grève, manifestations et obstruction parlementaire. François Bayrou va devoir redoubler d’habileté pour ne pas voir ce projet phare de son quinquennat capoter.
Un risque politique majeur pour Bayrou et la majorité
En faisant de la réforme des retraites la «mère des batailles», François Bayrou sait qu’il joue très gros. Un échec sur ce dossier serait catastrophique pour son crédit politique déjà entamé. Cela fragiliserait durablement son autorité et plomberait le reste du quinquennat.
À l’inverse, une adoption, même au forceps, lui permettrait de réaffirmer son leadership et de reprendre la main. Mais à quel prix ? Le risque de fracturer durablement le pays est réel, avec à la clé un regain des populismes et de la défiance. Un pari risqué à 4 ans de la présidentielle.
Les retraites, boîte de Pandore de la rentrée
À peine nommé, François Bayrou se retrouve déjà face au mur sur le dossier des retraites. Le rendez-vous s’annonce crucial pour la suite du quinquennat et l’avenir politique du pays. S’il échoue, c’est toute la stratégie de la majorité qui vole en éclats. Mais réussir pourrait aussi avoir un goût amer, celui d’une victoire à la Pyrrhus.
Les prochains mois s’annoncent en tout cas électriques, avec une rentrée sociale qui s’annonce incandescente. Syndicats et oppositions fourbissent déjà leurs armes, bien décidés à ne rien lâcher. La partie d’échecs ne fait que commencer, mais François Bayrou, échaudé par l’épisode Delevoye en 2019, sait qu’il ne peut pas se permettre un faux pas. L’avenir du gouvernement et de la réforme se jouera dans les prochaines semaines.