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Mali : Réquisition d’un An de Prison Ferme Contre un Opposant Critique

Un opposant malien risque un an de prison ferme pour avoir critiqué la junte militaire du Burkina Faso. Son procès soulève des questions sur la liberté d'expression et la répression des voix dissidentes dans la région du Sahel, où les coups d'État se multiplient. Jusqu'où ira cette dérive autoritaire ?

Dans un développement inquiétant pour la liberté d’expression au Mali, un opposant politique fait face à de lourdes accusations pour avoir osé critiquer le régime militaire du Burkina Faso voisin. Issa Kaou N’Djim, figure notable de l’opposition malienne, risque un an de prison ferme suite à des propos remettant en cause la crédibilité de la junte burkinabè. Son procès, qui s’est tenu lundi devant un tribunal de Bamako, soulève de sérieuses questions quant à l’état de la démocratie dans la région du Sahel.

Un Procès aux Allures de Répression Politique

Selon une source judiciaire proche du dossier, l’accusation reproche à M. N’Djim d’avoir « offensé publiquement un chef d’État étranger » et proféré des « injures par le biais d’un système d’information » lors d’une émission télévisée. Des chefs d’inculpation qui semblent davantage viser à museler une voix dissidente qu’à rendre justice. En plus de la peine de prison, le ministère public a réclamé une amende de 5 millions de francs CFA, soit près de 7 600 euros.

Issa Kaou N’Djim n’en est pas à son premier démêlé avec les autorités maliennes. Ancien soutien du colonel Assimi Goïta, l’homme fort du Mali depuis le coup d’État d’août 2020, il avait ensuite pris ses distances en prônant un retour rapide à un régime civil. Une position qui lui a valu d’être condamné en 2021 à six mois de prison avec sursis pour « atteinte au crédit de l’État », puis révoqué de son poste de vice-président du Conseil national de transition, l’organe législatif de la junte.

Répression des Médias et des Voix Critiques

Le cas de M. N’Djim s’inscrit dans un contexte préoccupant de répression de la liberté d’expression au Mali et au Burkina Faso, deux pays dirigés par des juntes militaires issues de coups d’État. Plusieurs médias, notamment étrangers, ont vu leur diffusion suspendue, tandis que des journalistes et autres voix critiques ont été réduits au silence ou jetés en prison.

La télévision Joliba TV News, qui avait diffusé les propos controversés de l’opposant, a ainsi écopé d’une suspension de six mois. Une sanction disproportionnée qui semble davantage punir un média pour avoir offert une tribune à une opinion dissidente que pour un quelconque manquement déontologique.

Une Alliance Militaire Liberticide

Le durcissement du contrôle de l’information intervient alors que le Mali, le Burkina Faso et le Niger ont formé une confédération baptisée « Alliance des États du Sahel » (AES). Si cette union vise officiellement à renforcer la coopération sécuritaire et économique, elle apparaît surtout comme un rempart contre les pressions internationales en faveur d’un retour à l’ordre constitutionnel.

Les juntes semblent davantage préoccupées par leur maintien au pouvoir que par l’instauration d’une véritable démocratie.

Un constat amer partagé par de nombreux observateurs

L’Accusation de Complot, Arme de Prédilection des Régimes

Au Burkina Faso, les autorités affirment régulièrement déjouer des tentatives de déstabilisation, procédant à des interpellations d’officiers et de civils. Un narratif commode pour justifier la répression et entretenir un climat de suspicion, sans qu’aucune preuve tangible ne soit jamais apportée.

C’est justement la remise en question d’un de ces supposés complots qui vaut aujourd’hui à Issa Kaou N’Djim d’être dans le viseur de la justice malienne. Son tort ? Avoir osé émettre publiquement des doutes sur la réalité d’une énième tentative de coup d’État annoncée par Ouagadougou.

La Démocratie en Péril au Sahel

Au-delà du cas individuel de M. N’Djim, c’est la question de l’avenir démocratique du Sahel qui se pose avec acuité. Alors que les militaires consolidaient leur emprise sur le Mali et le Burkina Faso, le Niger a à son tour connu un putsch en juillet dernier. Une contagion qui menace de réduire à néant les fragiles acquis démocratiques de ces dernières décennies.

Face à cette dérive autoritaire, la communauté internationale peine à faire entendre sa voix. Les sanctions économiques et diplomatiques se heurtent à une rhétorique souverainiste et anti-impérialiste, habilement manipulée par des pouvoirs qui cherchent à se légitimer en jouant sur la fierté nationale.

Pendant ce temps, la situation sécuritaire continue de se dégrader, avec une multiplication des attaques jihadistes. Un engrenage dans lequel s’enfoncent des pays pris en étau entre instabilité, terrorisme et tentation totalitaire.

Un Avenir Incertain pour la Liberté d’Expression

Le procès d’Issa Kaou N’Djim apparaît à bien des égards comme un test pour la liberté d’expression au Mali et, au-delà, dans toute la région sahélienne. Son issue, attendue le 30 décembre prochain, sera scrutée avec attention par tous ceux qui espèrent encore voir les idéaux démocratiques l’emporter sur l’arbitraire et la censure.

D’ici là, l’opposant restera en prison, lui qui avait déjà payé le prix de sa liberté de ton par une précédente condamnation et des interdictions de voyager. Un acharnement qui en dit long sur le niveau de tolérance du régime malien à l’égard de la contradiction.

Au-delà de son cas personnel, c’est tout un climat délétère qui s’installe, où toute voix discordante devient suspecte, où tout média indépendant est perçu comme une menace. Un dangereux engrenage qui risque de broyer les derniers espaces de débat et de pluralisme, pourtant essentiels à toute société qui se veut démocratique.

Si rien n’est fait pour enrayer cette spirale répressive, c’est la perspective même d’un retour à un régime civil qui s’éloigne chaque jour davantage.

Un constat alarmant pour l’avenir de la région

Il est plus que temps pour la communauté internationale de réagir, en usant de tous les leviers diplomatiques et économiques à sa disposition pour faire pression sur les juntes militaires. Car laisser les généraux imposer leur loi au mépris des libertés fondamentales, c’est prendre le risque de voir le Sahel sombrer durablement dans l’autoritarisme.

Alors que le verdict du procès de M. N’Djim est attendu, c’est aussi celui des peuples malien, burkinabè et nigérien qui se joue. Celui de leur droit à s’exprimer librement, à choisir leurs dirigeants, à décider de leur destin. En un mot, celui de leur dignité retrouvée après des décennies de mal-gouvernance et d’ingérence étrangère. Un combat vital pour l’avenir de toute une région, et qui mérite toute notre attention et notre solidarité.

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