Alors que la guerre fait rage au Soudan entre l’armée régulière et les paramilitaires, des dizaines de milliers de civils cherchent refuge de l’autre côté de la frontière, au Soudan du Sud. Mais selon l’ONG Médecins Sans Frontières (MSF), ce pays déjà fragilisé par des années de conflit interne peine à faire face à cet afflux massif de réfugiés soudanais.
Un afflux record qui submerge les ressources locales
Chaque jour en décembre, plus de 5 000 personnes ont traversé la frontière pour se mettre à l’abri au Soudan du Sud, relate MSF dans un communiqué alarmant publié ce lundi. Depuis le début du conflit au Soudan en avril dernier, le nombre total de déplacés dépasserait déjà les 11 millions.
Dans la ville frontalière de Renk, au nord-est du Soudan du Sud, les deux centres de transit, initialement prévus pour accueillir un maximum de 8 000 personnes, en abritent aujourd’hui plus du double. « L’afflux de personnes à Renk et dans ses environs a submergé des ressources déjà rares, laissant les déplacés dans une situation de crise », déplore Emanuele Montobbio, coordinateur des urgences MSF dans la zone.
De graves pénuries dans tous les domaines
Sur place, MSF fait état de « pénuries critiques de nourriture, d’eau potable, d’abris et de soins ». Des milliers de réfugiés, contraints de vivre dans des abris de fortune ou même à la belle étoile, n’ont qu’un accès très limité aux services de base.
Les structures de santé locales sont elles aussi débordées. Plus d’une centaine de blessés, dont beaucoup souffrent de blessures graves liées au conflit, attendent toujours d’être opérés. « Notre village était en flammes. Nous avons été déplacés et vivons maintenant sous un arbre », raconte Alhida Hammed, un réfugié soudanais soigné pour une blessure par balle à l’hôpital de Renk.
Un pays hôte lui-même en proie à de multiples crises
Pour le Soudan du Sud, le plus jeune pays du monde qui a acquis son indépendance en 2011, l’accueil de ces réfugiés constitue un immense défi. Déjà fragilisé par des années de guerre civile ayant fait près de 400 000 morts, le pays doit aussi composer avec des violences communautaires récurrentes et des catastrophes climatiques à répétition.
Malgré un accord de paix signé en 2018, la situation sécuritaire et humanitaire reste très précaire. Selon l’ONU, plus des deux tiers de la population, soit environ 8,9 millions de personnes, ont besoin d’une aide humanitaire pour survivre en 2023. Un chiffre qui risque encore de gonfler avec l’arrivée massive de réfugiés soudanais.
Un appel à la communauté internationale
Face à l’ampleur de la crise, MSF appelle la communauté internationale à se mobiliser d’urgence pour venir en aide aux réfugiés soudanais ainsi qu’à la population sud-soudanaise. « Nous avons besoin d’un soutien immédiat et conséquent de la part des acteurs humanitaires pour répondre aux besoins croissants », insiste Roselyn Morales, coordinatrice médicale adjointe de MSF au Soudan du Sud.
Cela passe notamment par un renforcement de l’assistance médicale, avec l’envoi de personnel soignant et de matériel supplémentaire, mais aussi par une augmentation de l’aide alimentaire et des financements alloués à l’hébergement des réfugiés. Sans une réaction rapide, MSF craint une aggravation dramatique de la situation dans les prochaines semaines.
La communauté internationale doit prendre la mesure de l’urgence et agir maintenant pour éviter une catastrophe humanitaire.
Emanuele Montobbio, MSF
Mais au-delà de l’aide d’urgence, c’est aussi un soutien sur le long terme dont le Soudan du Sud a cruellement besoin pour sortir durablement de la crise et offrir un avenir à sa population. Un immense chantier qui nécessitera l’engagement et la coopération de tous les acteurs, locaux comme internationaux.