Depuis plus d’un an, Israël est en proie à une guerre sur plusieurs fronts qui n’épargne pas les familles de soldats. Face à ce lourd tribut, une colère gronde parmi les épouses et mères de soldats concernant les exemptions de service militaire dont bénéficient les ultra-orthodoxes, une situation jugée de plus en plus intenable et inéquitable.
Un face à face tendu chaque samedi soir
Chaque samedi soir, le pont séparant Bnei Brak, une localité ultra-orthodoxe, et Givat Shmuel, bastion de juifs religieux sionistes très présents dans l’armée, est le théâtre de vives tensions. D’un côté, des manifestants brandissent des drapeaux israéliens et des pancartes appelant à la conscription pour tous. De l’autre, des ultra-orthodoxes tentent de passer, parfois en courant, devant cette haie de protestation.
Une exemption controversée au cœur du débat
Malgré un besoin en effectifs supplémentaires et une décision de la Cour suprême jugeant les exemptions illégales, le gouvernement de Benjamin Netanyahu, qui s’appuie largement sur les partis ultra-orthodoxes, soutient un projet de loi visant à les prolonger pour la grande majorité des « haredim ». Cette exemption, remontant à 1948 quand les ultra-orthodoxes étaient peu nombreux, leur permet d’échapper au service militaire obligatoire en se consacrant à l’étude des textes sacrés.
Nous sommes ici pour demander de l’aide à nos frères qui vivent juste de l’autre côté du pont, leur dire de partager le poids du fardeau avec les réservistes.
– Michal Vilian, manifestante et mère de soldats
Un poids devenu insupportable pour les familles de réservistes
Avec plus de 800 soldats tués depuis octobre 2023 à Gaza, au Liban ou en Cisjordanie, le prix du sang est jugé trop lourd par les sionistes religieux, jusque-là prêts à des compromis sur la question des exemptions. Pour beaucoup, celles-ci mettent désormais concrètement leur vie en danger.
Les épouses de réservistes dénoncent un poids devenu insupportable sur le plan économique et psychologique. Certains réservistes ont été mobilisés plus de 200 jours en un an. Elles estiment que la conscription de ne serait-ce qu’un millier d’ultra-orthodoxes supplémentaires aurait un impact énorme.
Un « incubateur » pour le monde de la Torah qui n’est plus tenable
Si l’exemption visait à l’origine à offrir une sorte d’incubateur au monde religieux décimé par la Shoah, beaucoup considèrent qu’elle n’est plus adaptée à la réalité sécuritaire actuelle d’Israël. Certaines militantes religieuses n’hésitent pas à citer des personnages bibliques appelant le peuple juif à se battre.
Alors que les ultra-orthodoxes représentent 14% de la population, soit 1,3 million d’habitants dont 66 000 hommes en âge de servir, la question de leur participation à « l’effort de guerre » apparaît de plus en plus incontournable aux yeux d’une large part de la société israélienne.