Un séisme politico-judiciaire secoue l’Espagne. Begoña Gómez, l’épouse du Premier ministre Pedro Sánchez, a été citée à comparaître le 5 juillet prochain devant un juge d’instruction de Madrid. Elle sera entendue « en qualité de suspecte » dans le cadre d’une enquête pour corruption et trafic d’influence qui la vise directement. Une convocation qui sonne comme un véritable camouflet pour le chef du gouvernement socialiste.
La justice estime qu’il existe des « indices suffisants »
Tout a commencé le 16 avril dernier, lorsqu’un collectif proche de l’extrême droite a déposé plainte contre Begoña Gómez. Au cœur des accusations : ses liens présumés avec un entrepreneur ayant décroché des contrats publics. Si le parquet avait préconisé un classement sans suite, estimant que les éléments étaient trop minces, le tribunal en a décidé autrement.
Le 29 mai, la justice a en effet jugé qu’il existait des indices « suffisants » pour justifier la poursuite des investigations, malgré un rapport de la Garde civile concluant à l’absence de preuves tangibles. Une décision qui a infligé un sérieux revers au ministère public, forçant de facto la convocation de l’épouse de Pedro Sánchez.
Pedro Sánchez dénonce une « stratégie de harcèlement »
Pour le Premier ministre, il ne fait aucun doute que cette affaire est motivée par des considérations politiques. Fin avril, il avait dénoncé avec virulence une « stratégie de harcèlement et de démolition » orchestrée par des « médias fortement marqués à droite et à l’extrême droite », avec la complicité de l’opposition conservatrice.
L’Espagne mérite un président (du gouvernement) digne et ce n’est pas le cas de Sánchez.
Cuca Gamarra, secrétaire générale du Parti Populaire
Des accusations balayées par ses adversaires politiques, qui se sont réjouis de la décision de la justice. « L’Espagne mérite un président (du gouvernement) digne et ce n’est pas le cas de Sánchez », a taclé Cuca Gamarra, la secrétaire générale du Parti Populaire (PP, droite). Une attaque frontale qui illustre la violence des joutes politiques dans le pays.
Un Premier ministre fragilisé
Cette convocation judiciaire de Begoña Gómez constitue indéniablement un coup dur pour Pedro Sánchez. Lorsque l’enquête préliminaire avait été ouverte en avril, il avait déjà surpris son monde en annonçant envisager une démission. Après une pause de 5 jours loin de la scène publique, il avait finalement choisi de s’accrocher à son poste.
Mais ce nouveau rebondissement risque de le fragiliser encore davantage. Son épouse sera en effet la première « Première dame » à être entendue par la justice dans le cadre d’une affaire de corruption. Une situation inédite qui devrait alimenter pendant de longues semaines la chronique politique et judiciaire espagnole.
Qu’est-il exactement reproché à Begoña Gómez ?
Pour l’heure, les contours exacts des soupçons pesant sur l’épouse de Pedro Sánchez restent flous. On sait simplement que l’enquête se concentre sur ses relations avec un entrepreneur qui aurait obtenu des marchés publics de façon douteuse. Begoña Gómez aurait-elle usé de son influence pour favoriser cet homme d’affaires ? C’est tout l’enjeu de cette convocation du 5 juillet.
Lors de son audition, elle devra s’expliquer sur la nature exacte de ses liens avec cet entrepreneur et sur d’éventuels avantages qu’elle aurait pu lui procurer. Des questions épineuses auxquelles elle va devoir répondre sans détour si elle veut éviter que cette affaire ne se transforme en véritable scandale d’État.
Les précédents judiciaires visant des proches du pouvoir
Si la situation de Begoña Gómez est inédite, d’autres affaires judiciaires ont déjà éclaboussé par le passé l’entourage de chefs de gouvernement espagnols :
- En 2013, le gendre du Premier ministre conservateur Mariano Rajoy avait été mis en examen pour corruption.
- En 2015, c’était au tour du beau-frère de Felipe VI, alors roi d’Espagne, d’être condamné à 6 ans de prison pour une affaire de détournement de fonds.
Des scandales à répétition qui ont contribué à ternir l’image de la classe politique espagnole auprès de l’opinion. Avec cette nouvelle affaire visant l’épouse de Pedro Sánchez, c’est une nouvelle épreuve délicate qui attend la démocratie ibérique. Les prochaines semaines s’annoncent déterminantes pour le chef du gouvernement, qui jouera une grande partie de sa crédibilité et de son avenir politique.