Les images sont apocalyptiques. Des maisons rasées, des routes coupées, des vies brisées. Le passage du cyclone Chido le 14 décembre dernier a laissé l’île de Mayotte exsangue, avec un bilan humain et matériel extrêmement lourd. Face à l’ampleur de la catastrophe, la colère gronde parmi la population qui reproche au gouvernement son inaction et son abandon.
Bruno Retailleau : « La colère des Mahorais est légitime »
Bruno Retailleau, le ministre de l’Intérieur démissionnaire qui s’est rendu sur place lundi dernier, affirme comprendre cette colère. Interrogé par le JDD ce dimanche, il déclare :
Je pense qu’il est naturel qu’après la sidération vienne le moment de colère.
Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur démissionnaire
Il assure cependant que l’État est pleinement mobilisé pour venir en aide aux sinistrés, rappelant que « Mayotte, c’est la France » et que des moyens considérables, civils et militaires, sont déployés. Parmi les mesures annoncées :
- Un pont aérien a été mis en place, acheminant chaque jour 50 tonnes d’eau, de nourriture et de matériel
- 90% de la population sera reliée à l’eau courante dès la fin du week-end, deux jours sur trois pendant 8h
- 1,6 million de litres d’eau seront livrés lundi par un cargo
- Les communes non reliées à l’eau courante seront approvisionnées par distribution de bouteilles
Des efforts jugés encore insuffisants par de nombreux Mahorais qui attendent des actes concrets après des années de promesses non tenues en matière d’infrastructures et de développement de l’île.
Une crise aux multiples facettes
Car au-delà de l’urgence humanitaire, le passage de Chido a brutalement mis en lumière les immenses défis auxquels Mayotte est confrontée, à commencer par la problématique migratoire. Le ministre reconnaît que « l’immigration clandestine a tout aggravé », avec des populations vulnérables entassées dans des habitations de fortune.
Près de la moitié des 270 000 habitants de l’île seraient des immigrés clandestins, venus principalement de l’union des Comores voisine. Faute de logements décents, ils s’entassent dans des bidonvilles insalubres, premières victimes du cyclone. Une situation intenable pour les Mahorais qui réclament des mesures fortes pour juguler ces flux migratoires.
Reconstruire durablement
Au-delà de l’urgence, l’État va devoir s’attaquer aux causes profondes de la précarité et du mal-développement qui minent Mayotte depuis des décennies. Des investissements massifs sont nécessaires pour :
- Construire des logements sociaux décents et accessibles
- Développer les infrastructures de base (routes, eau, électricité, écoles, hôpitaux)
- Dynamiser l’économie locale et créer des emplois
- Lutter contre l’insécurité et les trafics
Un véritable plan Marshall pour ce territoire oublié de la République, promet-on au gouvernement. Mais les Mahorais restent prudents. Ils attendent des preuves tangibles de cet engagement après tant de déceptions.
Si l’État ne règle pas le problème migratoire et n’investit pas massivement, alors nous reconstruirons sur du sable
Un élu local cité par Bruno Retailleau
À l’heure où Mayotte panse ses plaies, il y a urgence à panser aussi celles d’une île et d’une population à bout de souffle. L’État sera jugé sur sa capacité à assumer durablement ses responsabilités régaliennes et redistributives sur son 101e département. L’unité nationale est à ce prix.