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Renault accusé de faire échouer la reprise de la Fonderie de Bretagne

La reprise de la Fonderie de Bretagne par un fonds allemand vient d'échouer. Renault, son principal client, est accusé d'avoir fait capoter le projet mettant en péril 300 emplois. Le torchon brûle entre le constructeur et les salariés...

C’est un coup de tonnerre qui vient de s’abattre sur les 300 salariés de la Fonderie de Bretagne à Caudan dans le Morbihan. Le projet de reprise de ce site industriel par le fonds d’investissement allemand Private Assets, spécialisé dans la fonderie, est tombé à l’eau ce vendredi. Et c’est le constructeur automobile Renault, ancien propriétaire et client quasi-unique de l’usine, qui est montré du doigt.

Représentant 95% du chiffre d’affaires de la fonderie, Renault avait un rôle crucial dans la viabilité du projet de reprise. Or le groupe dirigé par Luca de Meo est accusé d’avoir précipité l’échec des négociations en refusant de s’engager sur des volumes de commandes.

Renault acte son refus de s’engager sur des volumes, et refuse donc les conditions de la négociation. Par cette décision, le groupe aux résultats records net de 2,3 milliards d’euros en 2024 condamne 300 emplois industriels.

– Damien Girard, député Les Écologistes du Morbihan

Cette décision a suscité une vive colère parmi les salariés et leurs représentants syndicaux. La secrétaire générale de la CGT Sophie Binet qualifie même Renault de « patron voyou ». Selon une source proche du dossier, il manquait encore 2,9 millions d’euros et surtout de la visibilité sur les volumes commandés par Renault pour finaliser l’accord.

Renault se défend et pointe la responsabilité du repreneur

De son côté, le constructeur automobile rejette ces accusations et affirme au contraire avoir fait « un effort » en confirmant un engagement financier de 35 millions d’euros, soit 65% du financement nécessaire à la reprise. Renault « regrette le désengagement soudain » du fonds Private Assets qui devait apporter 1,3 million d’euros, un montant jugé dérisoire.

L’État, actionnaire de Renault à hauteur de 15%, et les collectivités locales s’étaient également engagés à soutenir le projet à hauteur de 16 millions d’euros. Mais cela n’aura pas suffi à sauver ce fleuron industriel breton et ses 300 emplois.

Un avenir incertain pour la Fonderie de Bretagne

Spécialisée dans les pièces en fonte pour l’automobile comme les suspensions ou échappements, la Fonderie de Bretagne vit sous perfusion de Renault depuis des années. Mis en vente en 2021 par le constructeur, le site avait été cédé en 2022 au fonds Callista Private Equity. Mais sans engagement de volumes de la part de Renault, son avenir reste plus que jamais incertain.

La direction générale de la Fonderie de Bretagne a fait part de son profond dégoût et sa colère face au cynisme froid de Renault, qui a attendu la crise politique et la veille de Noël pour acter définitivement son refus de faire la moindre concession.

– Direction de la Fonderie de Bretagne

Une décision qui « condamne la faisabilité du projet de reprise de Fonderie de Bretagne et va provoquer à très court terme la fermeture de l’entreprise » selon sa direction. Les regards sont désormais tournés vers l’État qui est appelé à s’impliquer pour trouver une issue favorable et sauver ce site industriel et ses 300 salariés d’une fermeture qui semble inéluctable.

Le douloureux déclin de la fonderie en France

Cette situation reflète les difficultés que traverse le secteur de la fonderie en France, victime de la désindustrialisation et des délocalisations. En 20 ans, le nombre de fonderies a été divisé par deux dans l’hexagone, passant de 400 à 200 entreprises. Une tendance accélérée par la transition vers l’électrique dans l’automobile qui menace les pièces en fonte.

Pour les fonderies restantes, souvent dépendantes de quelques gros clients comme Renault ou Stellantis, le défi est de diversifier leurs débouchés et de monter en gamme pour survivre. Un pari loin d’être gagné face à la concurrence internationale et au manque d’investissements.

L’automobile représente 70% des débouchés de la fonderie française. Sans engagement fort et durable des constructeurs, de nombreux sites sont menacés de fermeture dans les années à venir. C’est tout un pan de notre industrie et de notre savoir-faire qui risque de disparaître.

– Fédération Forge Fonderie

L’avenir de la Fonderie de Bretagne, comme celui de nombreuses entreprises du secteur, reste donc plus que jamais suspendu à la bonne volonté des donneurs d’ordres comme Renault. Les salariés espèrent un sursaut de l’État pour imposer des engagements aux constructeurs et sauver le riche patrimoine industriel que représentent les fonderies françaises. Mais le temps presse avant que le rideau ne tombe définitivement.

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