Une semaine après sa nomination dans la douleur, le nouveau Premier ministre François Bayrou était l’invité ce jeudi soir de l’émission « L’Évènement » sur France 2. L’occasion pour le Béarnais de livrer sa feuille de route et de dévoiler ses plans pour sortir la France de l’impasse politique dans laquelle elle se trouve.
Un gouvernement avant Noël
Première urgence pour François Bayrou : former un gouvernement. Le chef du MoDem espère pouvoir présenter son équipe « dans le week-end », « en tout cas avant Noël, mardi soir ». Face à l’absence de budget et de majorité à l’Assemblée, le locataire de Matignon a lancé un appel à « l’unité nationale » et à la « responsabilité » des forces politiques.
« Nous ne pouvons pas nous en sortir si nous ne sommes pas ensemble. On doit essayer, on peut y arriver. Le chemin existe. »
François Bayrou, Premier ministre
Si la main tendue de François Bayrou n’est pas saisie, le Premier ministre prévient : « Si on ne réussit pas dans cet essai, alors c’est la dernière station avant la falaise. » Une menace à peine voilée de dissolution qui place les partis d’opposition face à leurs responsabilités.
Pas de 49.3, sauf pour le budget
Pour amadouer la gauche, François Bayrou a promis de ne pas recourir au 49.3 « sauf s’il y a blocage absolu sur le budget ». Une concession censée rassurer des députés prompts à brandir la menace d’une motion de censure. Le Premier ministre dit vouloir gouverner « par le dialogue et le compromis », une méthode aux antipodes de celle employée par son prédécesseur.
Retraites : la porte ouverte à des discussions
Autre gage envoyé à la gauche : François Bayrou a suggéré de « reprendre sans suspendre » la réforme des retraites adoptée en 2023 qui repousse l’âge de départ à 64 ans. De quoi ouvrir la voie à de nouvelles discussions avec les syndicats et les partis politiques pendant « neuf mois ».
« J’ai été un militant de la retraite à points. J’accepte qu’on rouvre tous les sujets et que chacun des syndicats mette sur la table ce qu’il considère comme souhaitable et acceptable. »
François Bayrou, Premier ministre
Pour autant, pas question de revenir sur l’équilibre financier du système de retraites. François Bayrou l’assure, sa démarche est « une porte ouverte de bonne foi. » Reste à savoir si cela suffira à convaincre une gauche vent debout contre la réforme.
Un « plan de rééquilibrage » des finances début 2025
François Bayrou n’élude pas la question budgétaire. En l’absence de budget pour 2024, rejeté par les députés début décembre, le Premier ministre promet « un plan de rééquilibrage de nos finances publiques » au début de l’année 2025. L’ancien ministre de l’Économie entend reprendre « la copie qui a été votée » ces dernières semaines pour une adoption espérée « mi-février ».
S’il veut « faire des économies », François Bayrou ne compte pas pour autant imposer un tour de vis budgétaire. « On peut trouver un équilibre qui soit acceptable, soutenable ou recevable », estime-t-il, tout en assurant qu’il « faut des impôts de contribution » et que « chacun aide à la solidarité ».
Bayrou souhaite garder Retailleau au gouvernement
Alors que les tractations se poursuivent en coulisses pour former le futur gouvernement, François Bayrou a dit souhaiter que Bruno Retailleau reste ministre de l’Intérieur. Selon le Premier ministre, le sénateur LR « a montré qu’il avait trouvé des orientations qui répondaient » aux attentes des Français.
Une main tendue à un Les Républicains qui conditionne toujours sa participation au gouvernement. François Bayrou dit attendre « un soutien de la droite républicaine » mais aussi « de la gauche démocratique et de gouvernement ». « Je serais heureux si on peut montrer que se conjuguent ces sensibilités différentes », souligne-t-il.
Bayrou et Macron : « une discussion » avant la nomination
François Bayrou est aussi revenu sur les coulisses de sa nomination à Matignon. Interrogé sur son bras de fer avec Emmanuel Macron, le nouveau Premier ministre a balayé la polémique : « Il y a des gens qui adorent inventer, créer, faire se battre les montagnes ». Selon ses dires, le chef de l’État « a hésité » avant de finalement le choisir lors « d’une discussion ».
François Bayrou « peiné » pour Sarkozy
L’interview a été aussi l’occasion pour François Bayrou de réagir à la condamnation définitive de Nicolas Sarkozy à un an de prison ferme dans l’affaire des « écoutes ». Alors que les deux hommes ont souvent croisé le fer par le passé, le Béarnais a confié avoir eu « de la peine » pour son ancien adversaire.
Il faut dire que François Bayrou n’a jamais été tendre avec l’ex-président de la République qu’il a longtemps combattu, n’hésitant pas à le surnommer « l’homme aux rats ». Une époque visiblement révolue. Preuve que la politique réserve décidément bien des surprises.
