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Des milliers de Syriens manifestent contre l’offensive turque

En Syrie, une manifestation inédite rassemble des milliers de personnes brandissant côte à côte les drapeaux de l'indépendance syrienne et des forces kurdes, unis contre les offensives turques dans le nord-est du pays. Les Kurdes syriens craignent pour leur autonomie si chèrement acquise depuis le début du conflit en 2011. Les regards sont tournés vers Kobané et Manbij, deux villes symboliques menacées...

C’est un rassemblement sans précédent qui s’est tenu jeudi dans les rues de Qamichli, grande ville du nord-est de la Syrie. Des milliers de manifestants se sont réunis, brandissant côte à côte les drapeaux de l’indépendance syrienne et ceux des forces kurdes. Un symbole fort de l’unité face à l’adversité, alors que les combattants soutenus par la Turquie multiplient les offensives dans la région.

Les slogans scandés par la foule ne laissent aucun doute sur la détermination des protestataires : « Vive la résistance des FDS », « Le peuple syrien est uni » ou encore « Non à la guerre, non à l’agression turque contre le Rojava ». Le Rojava, c’est le nom donné par les Kurdes à leur région autonome dans le nord-est syrien, une autonomie durement acquise et aujourd’hui menacée.

La crainte de perdre une autonomie chèrement gagnée

Pour Mazloum Ahmed, 39 ans, habitant de Qamichli venu prendre part au rassemblement, l’enjeu est clair : « Nous sommes les enfants de cette terre depuis des milliers d’années. Nous devons obtenir nos droits dans la nouvelle Constitution syrienne ». Un sentiment partagé par Salha Kalach, une Kurde de 50 ans qui revendique « une Syrie démocratique, où chacun a ses droits » et « une place dans une Syrie juste et équitable ».

Depuis la chute du régime de Bachar al-Assad en 2011 et le début de la guerre civile, la communauté kurde du nord-est syrien a en effet conquis une autonomie relative, mettant fin à des décennies d’oppression. Mais avec le retour en force du pouvoir central à Damas et les ambitions territoriales de la Turquie voisine, cette liberté si chèrement gagnée apparaît aujourd’hui bien fragile.

Kobané et Manbij, symboles de la lutte kurde, de nouveau menacées

Parmi les villes du nord-est syrien où la tension est particulièrement palpable, il y a Kobané. Située près de la frontière turque, elle est devenue le symbole de la lutte contre le groupe Etat Islamique, territorialement vaincu par les forces kurdes en 2019. Selon les FDS (Forces Démocratiques Syriennes), des groupes pro-turcs se prépareraient à lancer un assaut sur la ville. Dans un communiqué publié jeudi, elles ont exhorté les habitants à « participer activement à la résistance et à prendre les armes ».

A Manbij aussi, autre ville stratégique de la région sous contrôle kurde, la situation est explosive. Malgré une trêve négociée sous l’égide des Etats-Unis, des factions soutenues par Ankara ont lancé mercredi une offensive, faisant 21 morts parmi les combattants pro-turcs selon l’OSDH (Observatoire Syrien des Droits de l’Homme).

Ankara déterminé, Damas vise les zones kurdes

Du côté turc, la détermination ne faiblit pas. Dans un communiqué publié jeudi, le gouvernement a affirmé que les préparatifs militaires se poursuivraient « jusqu’à ce que les combattants kurdes déposent les armes ». Une position intransigeante qui fait écho aux ambitions des nouvelles autorités de Damas. Comme l’a affirmé mercredi le chef militaire du groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham, qui mène la coalition au pouvoir, l’objectif est désormais « d’étendre l’autorité sur les zones kurdes ».

Face à ces menaces, les manifestants de Qamichli ont envoyé un message clair : les Kurdes syriens n’abandonneront pas sans lutte ces droits et cette autonomie pour lesquels ils se battent depuis le début du soulèvement en 2011. Une lutte qui s’annonce longue et difficile, mais que beaucoup considèrent comme existentielle pour l’avenir de leur communauté et de leur région.

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