En pleine spéculation sur le lancement d’un éventuel processus de paix autour de l’Ukraine, le président russe Vladimir Poutine a déclaré jeudi être prêt à rencontrer le président élu américain Donald Trump « à n’importe quel moment ». Une main tendue qui intervient alors que le futur locataire de la Maison Blanche a récemment appelé à un « cessez-le-feu immédiat » et à des pourparlers pour mettre fin au sanglant conflit qui déchire l’Ukraine depuis bientôt un an.
« Je ne sais pas quand je vais le voir. Il ne dit rien à ce sujet. Je ne lui ai pas parlé depuis plus de quatre ans. Je suis prêt à le faire, bien sûr. A n’importe quel moment« , a affirmé Vladimir Poutine lors de sa grande conférence de presse annuelle à Moscou, ajoutant qu’il serait « également prêt à une rencontrer, s’il le veut« . Des propos qui font écho à ceux tenus lundi par Donald Trump, qui avait fait part de sa volonté de s’entretenir avec ses homologues russe et ukrainien pour « arrêter le carnage » en cours.
Kiev et les Occidentaux s’inquiètent des concessions promises par Trump
Mais si le président élu américain a promis lors de sa campagne de mettre rapidement un terme à la guerre, ses prises de position suscitent de vives inquiétudes côté ukrainien et européen. Beaucoup craignent en effet que la nouvelle administration Trump, soucieuse de renouer des liens avec Moscou, ne force Kiev à des concessions majeures et n’accorde ainsi une victoire géopolitique majeure au Kremlin.
Lors de sa conférence de presse, Vladimir Poutine a d’ailleurs clairement fait savoir qu’il était prêt à des discussions avec l’Ukraine à condition qu’elles soient basées sur « les réalités du terrain », où les forces russes ont nettement l’avantage militaire depuis le début de l’année. Parmi les exigences de Moscou :
- La cession par l’Ukraine de quatre régions partiellement occupées par la Russie (Donetsk, Lougansk, Zaporijjia, Kherson)
- L’abandon de la Crimée, annexée dès 2014
- Le renoncement de Kiev à son ambition d’intégrer l’OTAN
Des conditions jugées inacceptables jusqu’ici par le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui y voit une atteinte à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de son pays. Mais face aux difficultés croissantes de son armée sur le terrain et aux craintes d’un affaiblissement du soutien occidental avec l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, le dirigeant ukrainien a récemment assoupli sa position, se disant prêt à des « compromis douloureux » pour obtenir la paix.
L’unité des alliés occidentaux à l’épreuve
Signe de la fébrilité ambiante à Kiev, Volodymyr Zelensky a appelé jeudi les Européens à « ne pas abandonner » l’Ukraine et à « faire preuve d’unité« , y compris avec les États-Unis, à l’approche de la passation de pouvoir à Washington. Un message qui fait écho aux propos tenus la veille par le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg :
Il est important que nous restions unis […] Les dirigeants vont changer aux États-Unis et dans d’autres pays, mais notre engagement envers l’Ukraine doit demeurer fort.
Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN
Mais déjà, des divergences apparaissent au sein du camp occidental. Selon des sources diplomatiques, certains pays européens seraient prêts à assouplir les sanctions contre la Russie en échange d’avancées dans le processus de paix, une option catégoriquement rejetée par d’autres. Du côté des États-Unis, si l’administration Biden s’est engagée à poursuivre son soutien à l’Ukraine, Donald Trump a lui clairement fait savoir que Kiev devait s’attendre à recevoir « probablement moins d’aide » de la part de Washington.
2023, une année charnière pour l’avenir de l’Ukraine
Alors que le conflit entre dans sa deuxième année, la perspective d’une rencontre au sommet entre Vladimir Poutine et Donald Trump pourrait donc marquer un tournant décisif. Affaiblie militairement et économiquement, contrainte à des concessions douloureuses, l’Ukraine parviendra-t-elle à préserver son indépendance et son intégrité territoriale ? Ou devra-t-elle se résoudre à une forme de finlandisation, avec une souveraineté limitée sous influence russe ?
Une chose est sûre : l’année 2023 s’annonce cruciale pour l’avenir du pays et plus largement, pour la stabilité et la sécurité du continent européen. Face à l’offensive diplomatique russe, c’est la détermination et la cohésion du camp occidental qui seront mises à l’épreuve dans les mois à venir. Un test majeur pour Joe Biden et les dirigeants européens, qui devront manœuvrer avec habileté pour défendre les intérêts de l’Ukraine tout en évitant une escalade potentiellement dévastatrice avec Moscou.