Une nouvelle ère commence dans les salles de classe brésiliennes. Fini les sonneries intempestives, les distractions incessantes et les tentations de l’écran. Le Congrès vient d’adopter une loi interdisant purement et simplement l’utilisation des téléphones portables dans les écoles primaires et secondaires du pays. Une décision radicale qui ne fait pas l’unanimité, mais qui témoigne d’une prise de conscience croissante des effets délétères du tout-numérique sur les plus jeunes.
Préserver la santé mentale des élèves
L’objectif affiché de cette mesure ? « Préserver la santé mentale, physique et psychologique des enfants et des adolescents », selon les termes du texte voté par les sénateurs. Car l’omniprésence des smartphones dans le quotidien des jeunes Brésiliens n’est plus à démontrer. D’après les chiffres du Comité directeur sur l’internet brésilien, plus de la moitié des enfants de 10 à 13 ans possèdent leur propre téléphone portable. Une proportion qui grimpe à 87,6% chez les 14-17 ans.
Face à cette généralisation précoce, les autorités s’inquiètent des conséquences sur la concentration, la socialisation et l’équilibre psychologique des élèves. Le ministre de l’Éducation, Camilo Santana, n’a pas hésité à pointer du doigt « l’origine d’un déficit d’attention » et à plaider pour « une limitation » de ces appareils « qui ont mis fin à la socialisation des gens ».
Un enjeu de santé publique
Au-delà des salles de classe, c’est un véritable enjeu de santé publique qui se dessine. L’exposition excessive aux écrans et la dépendance numérique chez les plus jeunes font l’objet de mises en garde répétées de la part des experts. Troubles du sommeil, de l’alimentation, anxiété, dépression… Les risques sont multiples et bien réels.
En limitant drastiquement l’usage des smartphones à l’école, le Brésil espère ainsi protéger le développement cognitif et émotionnel de sa jeunesse. Une initiative saluée par 82% des parents d’élèves, selon un récent sondage.
Vers de meilleurs résultats scolaires ?
Au-delà des enjeux de bien-être, cette loi vise aussi à améliorer les performances académiques des élèves brésiliens. Comme le soulignait l’Unesco dans un rapport publié en 2023 :
L’interdiction des téléphones portables dans les écoles améliore les résultats scolaires, en particulier pour les élèves en difficulté.
En bannissant la source majeure de distraction que représentent les smartphones, le gouvernement mise sur un regain de concentration et d’implication de la part des jeunes. Objectif : combler les lacunes et réduire les inégalités face aux savoirs fondamentaux.
Les limites de l’interdiction
Malgré ses intentions louables, cette mesure radicale ne fait pas l’unanimité. Certains y voient une forme de stigmatisation des nouvelles technologies, pourtant incontournables dans la société actuelle. D’autres s’inquiètent d’une rupture entre les usages scolaires et extrascolaires, créant un décalage préjudiciable.
Comme le rappelait justement l’Unesco, « protéger les élèves des technologies nouvelles et innovantes peut les désavantager ». Le défi consiste donc à trouver le juste équilibre entre protection et éducation au numérique.
Une tendance mondiale ?
Avec cette loi, le Brésil rejoint le club encore restreint des pays ayant légiféré sur l’usage des téléphones portables en classe. Selon les données de l’Unesco, moins d’un quart des nations disposent actuellement de telles réglementations. Mais la tendance semble s’accélérer, au vu des défis éducatifs et sanitaires posés par l’hyperconnexion des jeunes.
La France, par exemple, a interdit dès 2018 l’utilisation des téléphones portables dans les écoles et collèges. Une mesure qui, selon les premiers retours, aurait permis de « pacifier le climat scolaire » et de « recentrer les élèves sur les apprentissages ».
Quel avenir pour les smartphones à l’école ?
Au Brésil, la nouvelle loi doit encore être promulguée par le président Lula avant d’entrer en vigueur. Son application concrète soulève de nombreuses questions. Comment gérer les situations d’urgence ou les usages pédagogiques des appareils mobiles ? Quelles sanctions en cas d’infraction ?
Une chose est sûre : l’ère du smartphone roi dans les écoles brésiliennes touche à sa fin. Place désormais au dialogue, à l’attention et à l’épanouissement des élèves. Un pari audacieux, qui fera sans doute des émules à travers le monde. Les salles de classe de demain seront-elles enfin libérées de la tyrannie des écrans ? L’avenir nous le dira.
