Alors que le débat budgétaire pour 2025 s’annonce déjà houleux, le secteur aérien français s’inquiète d’une possible hausse de sa fiscalité. Les compagnies aériennes et les acteurs du transport aérien appellent le futur gouvernement à revenir à un projet « plus équilibré », à l’image de celui voté par le Sénat avant la censure.
Un secteur sous pression fiscale
Dans son projet de loi de finances pour 2025, le gouvernement de Michel Barnier avait prévu de tripler la taxe de solidarité sur les billets d’avion et d’augmenter la taxation des jets privés. Des mesures qui devaient rapporter un milliard d’euros de recettes supplémentaires, mais qui ont fait bondir les professionnels de l’aérien.
Malheureusement, je pense que le sujet sera remis sur la table.
Pascal de Izaguirre, président de la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers
Avec la censure du gouvernement le 4 décembre, l’examen des textes budgétaires a été interrompu. Mais le secteur craint que la question de sa fiscalité ne revienne rapidement sur le tapis pour boucler le budget 2025.
Trouver un compromis « plus équilibré »
Face à cette menace, les acteurs de l’aérien espèrent que le prochain exécutif s’inspirera du projet retouché par le Sénat fin novembre. La chambre haute avait adopté un amendement réduisant le barème des hausses de taxes et exemptant notamment les vols vers l’outre-mer et la Corse.
Ce que nous espérons, c’est que le gouvernement ne repartira pas de sa copie d’origine, mais de la copie arrêtée par le Sénat, un compromis un peu plus équilibré.
Pascal de Izaguirre
Le secteur aérien plaide depuis longtemps pour un fléchage des recettes fiscales vers le financement de sa décarbonation. Les compagnies se sont en effet engagées à ne plus contribuer au réchauffement climatique à horizon 2050, un défi qui nécessitera de lourds investissements.
Ne pas amputer la capacité d’investir
Pour les transporteurs aériens, une fiscalité trop lourde risquerait de peser sur leur capacité à financer cette transition écologique. D’autant que le secteur reste fragilisé par la crise du Covid-19 et fait face à une concurrence internationale exacerbée.
Nous ne voulons pas que notre capacité à financer ces investissements de décarbonation soit amputée par un niveau excessif de taxation.
Pascal de Izaguirre
Le ministre délégué aux Transports François Durovray a évoqué mi-novembre la possibilité d’un crédit d’impôt pour les compagnies utilisant davantage de carburants durables, en contrepartie d’une hausse de la fiscalité. Reste à savoir si le prochain gouvernement reprendra cette piste.
L’aérien, variable d’ajustement budgétaire ?
Au-delà des enjeux environnementaux, la volonté de taxer davantage le transport aérien s’explique aussi par des impératifs budgétaires. Avec un déficit public persistant, le gouvernement est en quête de nouvelles recettes fiscales.
Mais pour les compagnies aériennes, déjà lourdement taxées, cette approche est contre-productive. Elles craignent qu’une hausse brutale de la fiscalité ne pèse sur le trafic, aggravant la situation d’un secteur en convalescence.
Il faut arrêter de considérer le transport aérien comme une variable d’ajustement. Nous avons besoin d’un cadre fiscal stable et incitatif.
Un représentant d’Air France cité par une source proche du dossier
Signe de la fragilité persistante du secteur, la plupart des grandes compagnies européennes ont vu leurs profits baisser en 2024, plombés par la hausse des coûts du kérosène et des dépenses d’exploitation.
Le défi pour le prochain exécutif sera donc de trouver un équilibre entre les impératifs budgétaires, la compétitivité d’un secteur stratégique et les objectifs climatiques. Un casse-tête qui promet de nourrir les débats lors de l’examen du prochain budget.