C’est une situation pour le moins inédite qui secoue actuellement La Gaîté Lyrique, célèbre salle de spectacle nichée en plein cœur de Paris. Depuis mardi dernier, environ 200 jeunes migrants isolés ont investi les lieux à l’occasion d’une conférence organisée par la Croix-Rouge. Refusant de remettre ces personnes vulnérables à la rue, la direction de l’établissement a pris la difficile décision de fermer temporairement ses portes au public, s’exposant ainsi à un risque conséquent de dépôt de bilan.
Un immense défi humain et financier
Selon une porte-parole de La Gaîté Lyrique, les migrants, pour la plupart originaires d’Afrique subsaharienne, se sont installés dans les différents espaces de la salle de spectacle. Au premier étage dédié aux arts numériques et aux musiques actuelles, des files d’attente se forment chaque matin pour récupérer les petit-déjeuners distribués. Certains se reposent sur les canapés ou à même le sol, entourés de leurs maigres possessions. Une véritable ville dans la ville s’est ainsi constituée en l’espace de quelques jours.
Face à cette situation exceptionnelle, la direction assume pleinement son choix de ne pas expulser ces personnes en grande précarité :
Il est impensable de rejeter ces personnes à la rue. Nous avons une responsabilité morale d’accueil et d’hospitalité, quelles qu’en soient les conséquences pour notre établissement.
Une porte-parole de La Gaîté Lyrique
Car les conséquences risquent en effet d’être lourdes. Avec l’annulation de tous les événements prévus, comme des ateliers, expositions ou concerts, c’est toute l’activité de ce haut lieu culturel qui se retrouve brutalement interrompue. Les pertes financières s’annoncent colossales et font peser un risque sérieux de dépôt de bilan, de l’aveu même de la direction.
Le spectre de la crise migratoire
Au-delà du cas de La Gaîté Lyrique, c’est le défi immense de l’accueil des migrants qui se trouve une nouvelle fois mis en lumière. Partout en France, les structures d’hébergement d’urgence sont saturées, laissant de nombreux exilés livrés à eux-mêmes dans les rues. Beaucoup d’entre eux, souvent très jeunes, se retrouvent dans une grande détresse, sans ressources ni perspectives.
Face à l’urgence de leur situation, certains n’hésitent pas à occuper des bâtiments publics ou privés pour trouver un abri temporaire, comme c’est le cas à La Gaîté Lyrique. Un phénomène qui illustre l’impasse dans laquelle se trouvent de nombreux migrants, ballotés d’un lieu à l’autre au gré des expulsions.
Un appel à la solidarité
Dans ce contexte, La Gaîté Lyrique en appelle à la solidarité et à la responsabilité collective. Selon la direction, les pouvoirs publics doivent prendre leurs responsabilités pour proposer des solutions d’hébergement dignes et pérennes à ces personnes vulnérables :
Nous ne pouvons pas porter seuls le poids de cette crise. Il est urgent que l’État et les collectivités locales se mobilisent pour trouver des alternatives. Ces jeunes migrants ont besoin d’être protégés et accompagnés, pas laissés à la rue.
La direction de La Gaîté Lyrique
Un appel qui résonne comme un cri d’alarme, alors que la situation des migrants en France ne cesse de se dégrader. Avec l’occupation de La Gaîté Lyrique, c’est aussi le monde de la culture qui se retrouve en première ligne, confronté brutalement aux réalités d’une crise migratoire qui déchire notre société.
Reste à savoir combien de temps cette situation inédite pourra perdurer. Si la direction de la salle de spectacle affiche pour l’instant sa détermination à accueillir les exilés, la question de son avenir se pose avec une acuité toute particulière. Car sans activité ni rentrées financières, c’est la survie même de cette institution culturelle qui pourrait rapidement être menacée. Un terrible dilemme entre impératif moral et réalité économique, qui illustre toute la complexité du défi migratoire auquel notre pays est confronté.