Le 16 mai 2023 restera une date marquante pour la santé mondiale. Ce jour-là, le président français Emmanuel Macron a en effet inauguré à Lyon l’Académie de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), un ambitieux centre de formation continue destiné aux professionnels de santé du monde entier. Qualifié de « temple des savoirs » et de « maison commune des soignants » par le chef de l’Etat, ce campus flambant neuf de 11.000 m2, intégralement financé par la France à hauteur de 120 millions d’euros, entend relever un défi de taille : former suffisamment de personnel médical pour faire face aux besoins croissants, en particulier sur le continent africain.
Combler le manque criant de soignants dans le monde
Selon les projections de l’OMS, il manquera près de 10 millions de professionnels de santé dans le monde d’ici 2030, dont la moitié rien qu’en Afrique. Un constat alarmant qui appelle une réponse forte et coordonnée de la communauté internationale. C’est tout l’enjeu de cette Académie, dont la mission est de « recruter, former, former mieux » les soignants, comme l’a souligné Emmanuel Macron, mais aussi de « permettre de démultiplier les découvertes les plus récentes » et « d’utiliser les nouvelles technologies ».
Le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS, abonde dans ce sens. Pour lui, l’objectif est clair : donner aux professionnels de santé « les savoirs et les compétences dont ils ont besoin pour soigner les gens, y compris face aux épidémies, aux pandémies et aux autres risques émergents ». Une ambition partagée de longue date avec le président français, qui avait immédiatement apporté son soutien à ce projet dès 2018.
Des technologies de pointe au service de la formation
Pour remplir sa mission, l’Académie mise sur les outils les plus innovants. Son bâtiment aux lignes futuristes intègre ainsi la réalité virtuelle et l’intelligence artificielle, afin d’offrir une expérience d’apprentissage immersive et interactive. Chaque année, près de 16.000 personnes viendront se former dans ses 24 salles de classe ultramodernes, sa bibliothèque et son centre de réponse d’urgence factice. Mais c’est surtout son immense plateau dédié aux exercices de simulation qui impressionne.
Emmanuel Macron et le Dr Tedros ont d’ailleurs pu assister à l’une de ces mises en situation grandeur nature, où des soignants en combinaison intégrale blanche devaient gérer une contamination massive d’étudiants par un nouveau virus d’origine animale. « Tant que cela restera un exercice, je serai heureux », a commenté, non sans humour, le président français, sur fond de sirènes d’alerte hurlantes.
Toucher 3 millions d’apprenants grâce au digital
L’Académie ne se limitera pas à son site physique de Lyon. Via une plateforme numérique, elle vise à former pas moins de 3 millions de professionnels d’ici 2028, grâce à des cours en ligne disponibles dans les six langues officielles de l’OMS : l’anglais, l’arabe, le chinois, l’espagnol, le français et le russe. Accessibles sur ordinateur comme sur smartphone, ces formations virtuelles, qui ont déjà débuté, s’adressent prioritairement aux soignants (médecins, infirmiers, pharmaciens…), mais aussi aux agents de l’OMS, aux chercheurs et aux décideurs du secteur.
Une initiative saluée par les pays qui en ont le plus besoin, à l’image du Tchad. Son ministre de la santé, le Dr Abdelmadjid Abderahim, espère ainsi que l’Académie aidera son pays à « renforcer » son système de santé « très fragile ». Un enjeu crucial pour l’Afrique, comme l’a rappelé Emmanuel Macron, soulignant que « le soutien au système de santé primaire » devait rester « la priorité de l’OMS et de l’aide publique ».
Un engagement renouvelé de la France envers l’OMS
A cette occasion, le président français a réaffirmé le soutien indéfectible de la France à l’OMS, en dépit des incertitudes politiques dans le pays. Il a ainsi annoncé que Paris « tiendrait ses engagements financiers » envers l’organisation onusienne pour le cycle 2025-2028.
Nous continuerons de nous battre pour avoir une Organisation mondiale de la Santé indépendante, nourrie par cette science libre. Aujourd’hui plus qu’hier, y compris dans les pays où on l’attendrait le moins, il est important de défendre une science libre.
– Emmanuel Macron
Une déclaration qui prend tout son sens dans le contexte géopolitique actuel, marqué par l’hostilité des États-Unis de Donald Trump envers l’OMS. Au cours de son premier mandat, le milliardaire républicain avait en effet amorcé le retrait de Washington de l’organisation, l’accusant d’être inféodée à la Chine. Sa reconduction à la Maison Blanche et la nomination, comme ministre de la Santé, du très controversé Robert F. Kennedy Jr, connu pour son scepticisme vis-à-vis des vaccins, ne laissent présager rien de bon pour la coopération multilatérale en matière de santé.
Dans ce contexte, l’engagement renouvelé de la France aux côtés de l’OMS et l’inauguration de cette Académie apparaissent comme un signal fort en faveur d’une « science libre » et d’une solidarité internationale renforcée face aux défis sanitaires du XXIe siècle. Un « temple des savoirs » qui se veut aussi un rempart contre l’obscurantisme et les tentations du repli sur soi. Plus que jamais, la santé s’impose comme « une condition fondamentale de la paix du monde », comme l’a si justement rappelé Emmanuel Macron. A nous tous d’en prendre soin.