Le réseau social TikTok est dans la tourmente. Malgré son succès fulgurant et son milliard d’utilisateurs actifs, la plateforme propriété du groupe chinois ByteDance fait face à une vague de critiques qui ne cesse d’enfler aux quatre coins du monde. Accusations d’espionnage, soupçons d’ingérence politique, contenus problématiques… Les polémiques s’accumulent et les autorités s’inquiètent, ouvrant des enquêtes et prenant des mesures restrictives. Le phénomène TikTok serait-il en train de devenir incontrôlable ?
Une enquête européenne sur une possible manipulation politique
L’affaire roumaine a mis le feu aux poudres. Selon des soupçons, le candidat d’extrême droite Calin Georgescu, arrivé en tête de l’élection présidentielle de novembre à la surprise générale, aurait bénéficié d’une campagne de soutien orchestrée par Moscou sur TikTok. La Commission européenne vient d’annoncer l’ouverture d’une enquête sur une possible « manipulation coordonnée » via les systèmes de recommandation de l’application. Les publicités politiques et contenus sponsorisés seront aussi passés au crible. En cas d’infractions avérées, TikTok risque des amendes salées pouvant atteindre 6% de son chiffre d’affaires annuel, voire une interdiction pure et simple en Europe pour les cas les plus graves.
ByteDance accusé d’espionnage pour le compte de Pékin
Aux États-Unis, les soupçons d’espionnage battent leur plein. Une loi oblige désormais ByteDance à céder TikTok, accusé de transmettre des données d’utilisateurs américains aux autorités chinoises. Faute de cession d’ici janvier, l’application aux 170 millions d’utilisateurs outre-Atlantique sera purement et simplement interdite sur le sol américain. TikTok conteste ces accusations et a saisi la Cour suprême, dénonçant une entrave sans précédent à la liberté d’expression.
Le temps de cerveau disponible des jeunes Européens n’est pas une monnaie d’échange pour les réseaux sociaux.
– Thierry Breton, ex-Commissaire européen au Numérique
La chasse aux contenus problématiques et illégaux
Au-delà des soupçons d’ingérence et d’espionnage, c’est la nature même des contenus diffusés sur TikTok qui fait polémique. De nombreuses voix s’élèvent contre les dérives de l’algorithme qui enfermerait les utilisateurs, et notamment les plus jeunes, dans des bulles de contenus parfois problématiques voire illégaux :
- Désinformation et fake news
- Contenus violents, obscènes ou choquants
- Mise en danger de la santé mentale des ados
- Promotion de défis dangereux
Face à ces critiques, TikTok avait dû faire marche arrière au printemps dernier et retirer un programme de récompenses encourageant le temps passé sur l’application, jugé délétère pour les jeunes utilisateurs par Bruxelles. Mais les polémiques ne s’arrêtent pas là.
Un réseau jugé nuisible pour l’harmonie sociale
Le pouvoir de mobilisation de TikTok est tel que plusieurs pays ont décidé de sévir face aux risques de troubles à l’ordre public. La France a ainsi suspendu l’application temporairement en Nouvelle-Calédonie lors d’émeutes meurtrières en mai dernier. Le Népal, lui, a carrément interdit TikTok pendant 10 mois en 2023-2024, suite à une manifestation antigouvernementale menée par un leader populaire sur le réseau. La plateforme est aussi bannie en Inde depuis des affrontements meurtriers avec la Chine en 2020.
Dernier fait marquant en date : l’Australie vient de voter une loi interdisant purement et simplement TikTok aux moins de 16 ans, l’une des mesures les plus strictes au monde concernant les réseaux sociaux. Le but : protéger les plus jeunes des dangers de l’application et de son contenu. Une décision radicale qui en dit long sur la défiance grandissante des autorités envers le phénomène TikTok.
Le réseau social aux vidéos courtes et addictives parviendra-t-il à redorer son image écornée et apaiser les inquiétudes ? Rien n’est moins sûr tant les polémiques semblent s’accumuler à mesure que son influence grandit. Une chose est sûre : le succès a un prix et TikTok en fait aujourd’hui les frais. Espionnage, manipulation, contenus problématiques… Autant de zones d’ombre que ByteDance va devoir éclaircir s’il veut préserver l’avenir de son application star. La partie s’annonce serrée.