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Nouvelles Dérogations pour les Véhicules Polluants dans le Grand Paris

Nouveau rebondissement dans la mise en place des ZFE du Grand Paris : face aux critiques, la métropole accorde des dérogations supplémentaires aux véhicules les plus polluants. Mais ces aménagements font débat...

Alors que l’interdiction de circuler pour les véhicules Crit’Air 3 doit entrer en vigueur dès janvier 2025 dans la Zone à Faibles Émissions (ZFE) du Grand Paris, une nouvelle salve de dérogations vient d’être accordée par la métropole aux automobilistes détenteurs des voitures les plus polluantes. Une décision qui ne manque pas de faire réagir, entre critiques et soulagement.

12 jours de circulation libre par an et une année sans contrôle

Face à la grogne d’une partie des habitants et acteurs économiques franciliens, la métropole du Grand Paris a décidé d’assouplir les conditions de circulation des véhicules classés Crit’Air 3 dans le périmètre de la ZFE. Ces derniers, normalement interdits de rouler à partir de 2025, pourront bénéficier d’un « pass 24 heures » leur permettant de circuler librement pendant 24 jours par an dans la zone, en plus des week-ends, soit un total de 139 jours.

De plus, afin de laisser du temps aux automobilistes de s’adapter, aucun contrôle ne sera effectué pendant la première année suivant la mise en place des restrictions. Une « phase pédagogique » durant laquelle les maires devront distribuer un livret d’information aux conducteurs concernés.

22 catégories professionnelles exemptées

En parallèle, pas moins de 22 catégories socio-professionnelles bénéficieront d’une exemption totale pour leurs véhicules Crit’Air 3, parmi lesquelles :

  • Les approvisionneurs des marchés
  • Les déménageurs
  • Les équipes de tournage
  • Les travailleurs en horaires décalés

Les véhicules associatifs d’intérêt général ainsi que les véhicules prioritaires (secours, forces de l’ordre…) ne sont pas non plus concernés par les restrictions de la ZFE.

Le spectre d’une ZFE « virtuelle » en l’absence de contrôle automatisé

Si ces aménagements sont perçus comme un assouplissement bienvenu par certains automobilistes et professionnels, d’autres s’inquiètent d’un affaiblissement du dispositif et d’un report sine die de son efficacité. En cause notamment : le retard pris dans le déploiement des contrôles automatisés, pourtant indispensables pour faire respecter les restrictions de circulation.

En l’absence de contrôle, la ZFE risque de n’être que virtuelle.

Sylvain Raifaud, coprésident du groupe écologiste à la Métropole du Grand Paris

Alors que les contrôles automatisés devaient être opérationnels dès la mise en place des premières interdictions, il faudra finalement attendre 2026, selon les informations communiquées par l’État. Un « retard inadmissible » pour certains élus écologistes.

La suppression des aides à la conversion critiquée

Autre point de crispation : la récente suppression par le gouvernement des aides à la conversion, que la métropole venait jusqu’à présent compléter. Une décision qui risque de pénaliser les ménages modestes selon Patrick Ollier, le président de la métropole :

Les aides passeront de 22.000 euros pour l’achat d’un véhicule neuf à 10.000 euros. Plus de 90% des aides de la Métropole bénéficiaient aux ménages les plus modestes. Supprimer ces aides, c’est fragiliser l’acceptabilité sociale de la ZFE.

Patrick Ollier, président de la Métropole du Grand Paris

Pour certains élus, cette suppression des aides et le retard des contrôles témoignent d’un désengagement de l’État sur le dossier des ZFE, pourtant jugé prioritaire dans la lutte contre la pollution de l’air. Le gouvernement se défend en mettant en avant le renforcement d’autres dispositifs comme la prime à la conversion.

Paris et Lyon, seules métropoles contraintes à durcir leur ZFE en 2025

Si une douzaine de grandes agglomérations françaises se sont déjà dotées d’une ZFE, seules les métropoles de Paris et de Lyon seront dans l’obligation de restreindre la circulation des véhicules Crit’Air 3 dès le 1er janvier 2025. En cause : le dépassement récurrent dans ces deux villes des seuils limites de pollution pour les particules fines et le dioxyde d’azote.

À Lyon, les dérogations accordées seront un peu moins importantes qu’à Paris avec 52 jours de circulation autorisée par an pour les Crit’Air 3. Les travailleurs en horaires décalés bénéficieront là aussi d’une exemption. Des aménagements jugés indispensables par la métropole lyonnaise pour assurer l’adhésion de la population à ce dispositif contraignant mais nécessaire pour réduire la pollution de l’air en ville.

Quel impact sur la qualité de l’air ?

Au delà des débats sur les modalités de sa mise en œuvre, la question de l’efficacité des ZFE pour améliorer durablement la qualité de l’air reste posée. D’après une étude menée par Airparif, respecter les recommandations de l’OMS en matière de pollution permettrait d’éviter 4970 décès prématurés par an dans la métropole du Grand Paris.

Mais pour atteindre cet objectif ambitieux, certains experts estiment que les restrictions de circulation des véhicules polluants devront nécessairement s’accompagner d’autres mesures, comme le développement des transports en commun, l’aide à l’acquisition de véhicules propres ou encore la réduction du trafic routier en général. Autant de chantiers titanesques qui nécessiteront une action résolue et coordonnée de l’ensemble des acteurs publics dans les années à venir.

En attendant, les nouvelles dérogations accordées aux véhicules Crit’Air 3 dans le Grand Paris, si elles apportent un répit temporaire à certains automobilistes, risquent bien de compliquer l’atteinte des objectifs fixés. Un dilemme cornélien pour les élus locaux, pris entre la nécessité d’agir vite et fort face à l’urgence sanitaire et climatique, et le risque de voir une partie de la population se détourner de mesures perçues comme punitives et injustes.

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