Au cœur du camp de réfugiés palestiniens de Yarmouk, au sud de Damas, une scène poignante se déroule. Après des années d’interdiction imposée par le régime de Bachar al-Assad, les habitants peuvent enfin retrouver les tombes de leurs proches dans le cimetière dit « des martyrs ». Un lieu chargé d’émotion et de souvenirs, dévasté par la guerre.
Un accès longtemps interdit par le régime syrien
Depuis la reprise de Yarmouk par les forces loyalistes en 2018, l’accès au cimetière était formellement prohibé. Mais la chute récente de Bachar al-Assad, renversé par une coalition de groupes armés, a changé la donne. Les Palestiniens peuvent désormais se recueillir sur les sépultures de leurs disparus.
Radwane Adwane, 45 ans, empile des pierres pour tenter de reconstruire la tombe de son père. « Sans la chute du régime, il nous aurait été impossible de revoir la tombe de mon père une nouvelle fois », confie-t-il, ému. À ses côtés, sa mère Zeina laisse enfin couler ses larmes : « Mes larmes avaient séché, mais je peux enfin pleurer mon défunt mari. »
Yarmouk, du camp de réfugiés au champ de ruines
Créé dans les années 1950 pour accueillir les Palestiniens chassés de leurs terres, Yarmouk était devenu un important quartier résidentiel où vivaient 160 000 réfugiés ainsi que des milliers de Syriens. Mais le conflit débuté en 2011 a transformé le camp en zone de guerre, successivement rebelle, jihadiste, assiégée puis bombardée par le régime. Aujourd’hui, seules quelques rares habitations tiennent encore debout au milieu d’un paysage de désolation.
« Le régime d’Assad n’a épargné ni les vivants ni les morts. Il n’a épargné personne. »
Mahmoud Badawane, habitant de Yarmouk
À la recherche des disparus
Dans le cimetière en ruine, les hommes fouillent fébrilement la terre et les décombres, tentant de localiser les tombes de leurs proches à l’aide de vieilles photos. La plupart des pierres tombales ont été brisées. Un chaos qui reflète la violence subie par Yarmouk et ses habitants pendant ces longues années de conflit.
Selon des responsables palestiniens, Israël chercherait également, par le biais de médiateurs, à retrouver dans ce cimetière les restes d’un célèbre espion et d’un soldat israéliens. Une information qui ajoute encore au trouble et aux mystères entourant ce lieu chargé d’histoire.
L’espoir d’une reconstruction
Malgré la dévastation et les larmes, un fragile espoir anime les anciens habitants de Yarmouk. Amina Mounawar, 48 ans, offre de l’eau aux visiteurs du cimetière. Adossée au mur en ruine de sa maison, elle confie : « J’ai grand espoir dans la reconstruction du camp, dans un avenir meilleur ». Un vœu partagé par tous ceux qui foulent à nouveau cette terre de mémoire et de deuil, premier pas vers une possible renaissance.
Le cimetière des martyrs de Yarmouk, microcosme des souffrances et des attentes des Palestiniens de Syrie. Un lieu symbole, entre ruines et résilience, où se mêlent la douleur du passé et les fragiles lueurs d’un futur à réinventer.