Dans un contexte d’instabilité politique inédite depuis des décennies, la France traverse une période tumultueuse. Face à l’impasse budgétaire et à la censure du gouvernement, l’Assemblée nationale a dû adopter une mesure d’urgence pour assurer le financement de l’État et de la Sécurité sociale. Cette « loi spéciale », votée lundi par l’ensemble des 481 députés présents, autorise l’exécutif à prélever l’impôt et à emprunter en attendant l’adoption d’un nouveau budget pour 2025.
Une rare concorde teintée de polémique
Si cette décision a été prise à l’unanimité, elle n’en suscite pas moins la controverse. En effet, la plupart des oppositions déplorent que la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, ait déclaré irrecevables des amendements visant à indexer le barème de l’impôt sur le revenu en fonction de l’inflation. Une décision jugée partisane par certains élus, à l’image de Clémence Guetté (La France Insoumise) qui accuse la majorité de « faire payer la censure aux Français ».
De son côté, Yaël Braun-Pivet se défend de toute manœuvre politique, affirmant décider « en droit » et non « en fonction de [son] intérêt ». Reste que cette polémique illustre bien les tensions qui entourent ce que beaucoup nomment déjà « la facture de la censure ». Selon le ministre du Budget démissionnaire Laurent Saint-Martin, l’absence d’indexation pourrait en effet conduire à ce que « 380.000 nouveaux foyers » se retrouvent imposables.
Un fonctionnement provisoire en attendant des jours meilleurs
Cette loi spéciale n’est toutefois qu’une solution temporaire. Elle doit permettre à l’État de continuer à fonctionner en prélevant les impôts sur la base de ceux votés l’an dernier pour 2024. D’après une source proche du dossier, le gouvernement envisagerait de corriger le tir dans un projet de budget ou un autre texte législatif au début de l’année 2025.
En parallèle, la Banque de France a revu à la baisse ses prévisions de croissance pour les années à venir. Ainsi, la croissance du PIB devrait atteindre 0,9% en 2025 (contre 1,2% précédemment annoncé), puis 1,3% en 2026 et 2027. Des projections qui témoignent d’un contexte économique national et international toujours soumis à une « double incertitude ».
Vers une clarification de la situation politique ?
Au-delà des questions budgétaires, c’est bien la stabilité politique du pays qui est en jeu. Depuis la censure du Premier ministre Michel Barnier et son remplacement par François Bayrou, la France traverse une période de turbulences inédite sous la Ve République. Une situation qui inquiète jusqu’au plus haut sommet de l’État et qui appelle à une clarification rapide du paysage politique.
D’ici là, le gouvernement devra composer avec cette « loi spéciale » pour assurer le fonctionnement régalien du pays. Un pis-aller qui ne saurait tenir lieu de politique budgétaire pérenne, mais qui a au moins le mérite de maintenir la France à flot dans cette période agitée. Reste à savoir si les acteurs politiques sauront se montrer à la hauteur des enjeux pour sortir le pays de l’ornière et lui offrir les perspectives stables et sereines dont il a tant besoin.