C’est une découverte qui a de quoi faire tourner la tête des amateurs d’art. Un bronze de Camille Claudel, sculptrice de génie longtemps éclipsée par Auguste Rodin, a refait surface de la plus inattendue des manières. Dissimulée sous un linge dans un appartement parisien inhabité, cette version de L’Âge Mûr, œuvre emblématique de l’artiste, était portée disparue depuis plus d’un siècle. Sa réapparition miraculeuse pourrait bien bouleverser le marché de l’art.
La renaissance d’un chef-d’œuvre oublié
Matthieu Semont, commissaire-priseur en charge de l’inventaire de cet appartement parisien, a eu la surprise de sa vie en soulevant un banal linge qui recouvrait la sculpture. Face à lui se tenait un bronze d’une qualité stupéfiante, qu’il a immédiatement identifié comme étant L’Âge Mûr de Camille Claudel. Une rencontre plus qu’une découverte, qui l’a profondément ému :
C’est magique, j’en ai pleuré. Ce bronze, dont on avait perdu la trace depuis plus d’un siècle, est d’une qualité stupéfiante.
Matthieu Semont, commissaire-priseur
Cette version de L’Âge Mûr, probablement fondue au tout début du 20e siècle, est une pièce majeure dans l’œuvre de Camille Claudel. À travers les trois personnages représentés, elle évoque de manière poignante le cycle de la vie mais aussi la passion déchirante entre la sculptrice et Auguste Rodin.
Une œuvre chargée de symboles
Initialement commandée par l’État à Camille Claudel, L’Âge Mûr n’a finalement jamais été réalisée à grande échelle. Les rares exemplaires connus à ce jour se trouvent dans des collections prestigieuses comme celles des musées d’Orsay et Rodin à Paris ou du musée Camille Claudel à Nogent-sur-Seine.
Au-delà de sa beauté plastique, l’œuvre concentre une forte charge émotionnelle et symbolique. La jeune femme agenouillée, surnommée « l’implorante », incarne la descente aux enfers de Camille Claudel après sa rupture avec Rodin. Selon plusieurs spécialistes, ce dernier aurait fondu en larmes en découvrant cette figure chez le fondeur Eugène Blot, preuve de l’intensité des sentiments qui l’unissaient encore à son ancienne muse et amante.
Les secrets d’une sculpture vagabonde
Comment cette version oubliée de L’Âge Mûr a-t-elle atterri dans cet appartement parisien fermé depuis une quinzaine d’années ? Le mystère reste entier. D’après les informations glanées par Matthieu Semont, elle aurait été exposée et vendue en 1908 avant de disparaître des radars.
Sa valeur historique et artistique est inestimable. Les experts tablent sur un prix de vente oscillant entre 1,5 et 2 millions d’euros lors de sa mise aux enchères prévue le 16 février à la mairie d’Orléans. Un montant qui pourrait même être dépassé tant l’émotion suscitée par ce retour inespéré est grande dans le milieu de l’art.
Camille Claudel, une artiste enfin reconnue à sa juste valeur
Cette réapparition miraculeuse intervient à point nommé pour réhabiliter le génie trop longtemps ignoré de Camille Claudel. Considérée à tort comme une simple élève de Rodin, voire éclipsée par leur liaison tumultueuse, la sculptrice a tardé à être reconnue pour son immense talent propre.
Ces dernières années, les initiatives se multiplient pourtant pour lui redonner la place qu’elle mérite dans l’histoire de l’art. Expositions, ouvrages, ventes aux enchères records : peu à peu, Camille Claudel sort de l’ombre pour rayonner enfin de sa propre lumière.
Un nouveau record pour Camille Claudel ?
Nul doute que la mise en vente de ce bronze oublié constituera un événement majeur sur le marché de l’art. En novembre 2017 déjà, la vente de 17 œuvres de Camille Claudel, préemptées par l’État, avait atteint des sommets, avec un résultat trois fois supérieur aux estimations.
La sculpture L’Abandon notamment, autre pièce emblématique, s’était envolée à 1,187 million d’euros, soit le double de son estimation basse. Tous les voyants semblent au vert pour que L’Âge Mûr pulvérise ce record et, avec lui, offre un nouveau triomphe posthume à Camille Claudel.
Plus qu’une simple vente aux enchères, c’est un pan oublié de l’histoire de l’art qui s’apprête à revivre sous nos yeux ébahis. Et si le destin, dans un ultime pied de nez, avait décidé d’offrir à Camille Claudel la revanche lumineuse dont elle a tant rêvé ? Réponse le 16 février, sous le feu des projecteurs et le marteau du commissaire-priseur. L’art et la passion ont décidément le don de nous surprendre, par-delà le temps et l’oubli.