C’est un procès hors norme qui se tient actuellement à Avignon. Dominique Pélicot, 72 ans, comparaît depuis le 2 septembre devant la cour criminelle pour viols aggravés. Il est accusé d’avoir violé et fait violer son ex-femme, Gisèle Pélicot, par des dizaines d’hommes contactés sur internet. Lundi, lors de sa dernière prise de parole avant que la cour ne se retire pour délibérer, l’accusé a tenu à présenter ses ultimes excuses.
« Je voudrais commencer par saluer le courage de mon ex-femme », a déclaré Dominique Pélicot devant une salle comble. Des mots qui ont résonné avec force dans ce procès où la parole des victimes a été au cœur des débats. Car Gisèle Pélicot, 72 ans elle aussi, a fait le choix courageux de médiatiser cette affaire, à rebours des pratiques habituelles dans ce type de dossiers. Son objectif : que « la honte change de camp ».
Une victime devenue icône féministe
Tout au long des 14 semaines d’audience, cette septuagénaire a impressionné par sa détermination et sa résilience. Malgré l’épreuve des témoignages et des questions, parfois intrusives, elle est restée digne, portant haut la voix des victimes de violences sexuelles. Une posture qui lui a valu de devenir, bien malgré elle, une figure du combat féministe.
À sa sortie du tribunal lundi, Gisèle Pélicot a d’ailleurs été ovationnée par le public, recevant de nombreux messages de soutien. Une reconnaissance de son courage, mais aussi une façon pour toutes ces femmes de dire « plus jamais ça ».
50 accusés, des peines allant jusqu’à 20 ans requises
Face à Gisèle Pélicot, ce sont 51 hommes qui ont comparu pendant ce procès fleuve. Âgés de 26 à 74 ans, ils venaient d’horizons divers : pompier, infirmier, journaliste, gardien de prison… La plupart vivaient dans le sud de la France, où le couple Pélicot s’était installé.
L’accusation a requis des peines allant de 10 à 20 ans de prison contre 49 d’entre eux, poursuivis pour viols aggravés. 20 ans, c’est d’ailleurs la peine maximale encourue par Dominique Pélicot, considéré comme le principal responsable de ces actes. Une peine qui semble presque attendue par ce dernier.
Vous avez le reste de ma vie entre vos mains
– a-t-il lancé aux juges avant qu’ils ne partent délibérer
Un accusé contrit mais une défense trouble
Tout au long du procès, Dominique Pélicot est apparu comme un homme à double visage. Violeur sans scrupule la nuit, il redevenait le jour un grand-père attentionné, décrit par son ex-épouse comme « un super mec »… jusqu’à ce qu’elle découvre l’horreur en 2020.
Certains des accusés ont tenté de se défendre en affirmant avoir cru participer à un jeu sexuel entre époux consentants. Un argument balayé par Dominique Pélicot lui-même, qui a reconnu sa pleine responsabilité dans cette affaire sordide.
Je regrette ce que j’ai fait, faire souffrir depuis quatre ans, je leur demande pardon
– a-t-il déclaré au sujet de son ex-femme et de sa famille.
Il a aussi affirmé avoir dit « la vérité totale » lors des débats et vouloir désormais se « faire oublier », rongé par une « honte intérieure ». Des regrets de dernière minute qui ne devraient cependant pas atténuer la sentence.
Verdict imminent : une décision historique attendue
C’est désormais entre les mains des cinq magistrats que repose ce dossier hors norme. Après des semaines de débats intenses, la cour s’est retirée pour un délibéré à huis clos qui pourrait durer jusqu’à vendredi.
Quel que soit le verdict, ce procès restera comme l’un des plus importants dans le domaine des violences faites aux femmes. Par son ampleur, par le courage de la victime, par la gravité des faits jugés… Cette affaire est devenue le symbole d’un fléau trop longtemps passé sous silence.
Pour Gisèle Pélicot et toutes les victimes, la décision que s’apprête à rendre la justice se doit d’être à la hauteur. Une condamnation ferme et des peines lourdes sont attendues, pour que la honte et la peur changent enfin de camp. Réponse dans quelques jours, pour un jugement qui fera date.
