Alors que François Bayrou vient d’être nommé Premier ministre par Emmanuel Macron, un vent de fronde souffle déjà à l’Assemblée nationale. Manuel Bompard, le coordinateur de la France Insoumise, a annoncé ce lundi matin sur TF1 que son mouvement refusait de se rendre à Matignon pour rencontrer le nouveau chef du gouvernement. Une décision lourde de sens, qui augure de nouvelles tensions politiques dans les prochaines semaines.
La France Insoumise sur le pied de guerre
À peine arrivé à Matignon, François Bayrou se heurte déjà à l’intransigeance des Insoumis. Manuel Bompard a réaffirmé la volonté de son camp de censurer le gouvernement à l’occasion du vote de politique générale. Une menace à peine voilée, alors que la majorité présidentielle ne dispose plus que d’une majorité relative à l’Assemblée nationale depuis les dernières élections législatives.
Je ne vais pas participer à la comédie des lignes rouges.
– Manuel Bompard, coordinateur de la France Insoumise
Pour les Insoumis, pas question de négocier un « pacte de non-censure » ou d’apporter leur soutien à un gouvernement jugé trop libéral. Selon une source proche de LFI, le mouvement mélenchoniste préfère attendre le discours du nouveau Premier ministre pour dégainer sa motion de défiance. Un choix risqué, qui pourrait précipiter la France dans une nouvelle crise politique.
Vers une nouvelle impasse à l’Assemblée ?
En refusant d’emblée le dialogue avec François Bayrou, la France Insoumise prend le risque de faire monter la pression dans un hémicycle déjà électrique. Contrairement aux socialistes, aux écologistes et aux communistes qui ont accepté de se rendre aux consultations à Matignon, les Insoumis campent sur une position de fermeté.
Pourtant, le nouveau Premier ministre a multiplié les signaux en direction de la gauche, en se disant favorable à un ISF climatique et à une « autre réforme des retraites ». Des positions qui n’ont visiblement pas convaincu Manuel Bompard :
Je ne vais pas faire croire aux gens que Monsieur Bayrou va être frappé d’une révélation pour faire la politique qui va à l’inverse de ce que les députés du MoDem ont fait depuis sept ans.
– Manuel Bompard, coordinateur de la France Insoumise
Bayrou sous pression dès son arrivée
Ce bras de fer politique place François Bayrou dans une position délicate. Le président du MoDem, qui a finalement été choisi par Emmanuel Macron pour succéder à Élisabeth Borne, doit composer avec une Assemblée morcelée et des oppositions combatives. Sans majorité absolue, le gouvernement risque de devoir recourir au 49.3 pour faire passer ses réformes.
Selon des sources concordantes, des dissensions seraient déjà apparues au sein de la majorité quant à la stratégie à adopter face aux Insoumis. Certains plaident pour la fermeté, d’autres pour le dialogue. François Bayrou devra trancher rapidement, sous peine de voir sa marge de manœuvre se réduire comme peau de chagrin.
Vers une dissolution de l’Assemblée ?
Si la motion de censure des Insoumis venait à être adoptée, Emmanuel Macron pourrait être tenté de dissoudre l’Assemblée nationale pour provoquer des élections législatives anticipées. Un pari risqué, alors que l’opposition est remontée et que la cote de popularité du président est au plus bas.
- Une dissolution pourrait renforcer les extrêmes et affaiblir encore la majorité présidentielle
- Les partis de gauche pourraient être tentés de s’allier dans une « Union populaire » pour faire barrage à Emmanuel Macron
- Le spectre d’une cohabitation plane sur le quinquennat
Dans ce contexte explosif, François Bayrou va devoir faire preuve de bien des talents de négociateur pour éviter l’enlisement. Son expérience de centriste et sa capacité à dialoguer avec tous les bords seront des atouts précieux. Mais le chemin s’annonce semé d’embûches.
La réforme des retraites, pomme de discorde
Parmi les dossiers brûlants qui attendent le nouveau gouvernement, celui de la réforme des retraites cristallise toutes les tensions. François Bayrou s’est dit ouvert à une « autre réforme », sans pour autant renier l’objectif du report de l’âge légal à 64 ans. Une ligne de crête délicate, qui ne satisfait ni la CFDT, ni les syndicats réformistes.
À gauche, l’opposition est vent debout contre ce projet, considéré comme une « régression sociale ». La France Insoumise a promis « une mobilisation massive » si le gouvernement persistait dans cette voie. De quoi craindre un nouvel embrasement social dans les prochains mois.
Emmanuel Macron joue gros sur ce dossier, qui pourrait plomber durablement son second quinquennat en cas d’échec. François Bayrou aura la lourde tâche de renouer le fil du dialogue social, pour tenter de bâtir un compromis acceptable par tous. Un sacré défi, au vu du climat de défiance qui règne entre le gouvernement et les partenaires sociaux.
L’hypothèse d’un référendum
Pour sortir de l’impasse, certains stratèges de la majorité évoquent l’hypothèse d’un référendum sur la réforme des retraites. Une manière de court-circuiter les oppositions et de redonner la parole aux Français. Mais cette option, un temps envisagée par Emmanuel Macron, semble avoir du plomb dans l’aile.
Avec le climat actuel, un référendum sur les retraites serait perçu comme une forme de passage en force. Le risque serait grand de le perdre et d’affaiblir encore l’exécutif.
– Un conseiller ministériel
Selon des sources concordantes, François Bayrou serait réticent à se lancer dans une telle aventure, préférant privilégier la voie du dialogue et de la négociation. Une prudence qui se comprend, tant les esprits sont échauffés sur le sujet.
Une chose est sûre : la partie d’échecs qui s’engage s’annonce serrée pour le nouveau locataire de Matignon. Entre une opposition déterminée à en découdre et une majorité fébrile, François Bayrou va devoir jouer serré pour éviter le blocage. Avec en ligne de mire, l’avenir des réformes et la stabilité du pays.
Les prochaines semaines s’annoncent donc cruciales. Les Français, eux, attendent des actes et des résultats tangibles pour leur pouvoir d’achat et leurs conditions de vie. François Bayrou n’a pas le droit à l’erreur. L’heure est désormais à la responsabilité et à l’efficacité gouvernementale.