Un tournant historique se profile pour Royal Mail, l’opérateur postal emblématique du Royaume-Uni. Lundi dernier, le gouvernement britannique a donné son feu vert au rachat de l’entreprise par Daniel Kretinsky, un milliardaire tchèque, pour un montant de 3,6 milliards de livres. Cette approbation tant attendue intervient après des mois de négociations, mais elle est assortie de plusieurs conditions visant à protéger les intérêts nationaux.
Un accord sous haute surveillance
Face à l’inquiétude suscitée par cette acquisition étrangère, le gouvernement a tenu à rassurer en annonçant avoir obtenu des garanties de la part de Daniel Kretinsky et de son véhicule d’investissement, EP Corporate Group. Parmi les engagements pris :
- Le maintien du siège social de Royal Mail au Royaume-Uni
- La préservation des emplois et des recettes fiscales sur le territoire
- La continuité du service postal universel à un tarif unique
- La protection de la marque Royal Mail
D’après une source proche du dossier, ces mesures visent à s’assurer que Royal Mail conservera son ancrage britannique malgré le changement d’actionnariat. Le gouvernement se réserve d’ailleurs un droit de regard sur tout changement majeur tel qu’un déplacement des opérations.
Royal Mail, une icône en difficulté
Fondé il y a plus de 500 ans, Royal Mail traverse une passe difficile ces dernières années. Malgré une privatisation en 2013, le groupe peine à s’adapter à la baisse des volumes du courrier et a dû affronter de lourdes grèves sur les salaires. Son cours de bourse a chuté de plus de 50% en un an. Avec plus de 150 000 employés, l’enjeu social est considérable.
Il est assez surprenant que le gouvernement travailliste actuel poursuive dans cette voie, alors que le parti avait par le passé caressé l’idée opposée de renationaliser la distribution du courrier.
Mislav Radic, chercheur à l’UCL
Kretinsky, un investisseur de long terme
Cet homme d’affaires de 47 ans, parfois surnommé le « Sphinx tchèque » pour sa discrétion, s’est bâti un empire diversifié allant de l’énergie aux médias en passant par la grande distribution. Son portefeuille compte des participations dans le géant français Casino, dans les journaux Le Monde et Marianne, ou encore dans le club de foot de West Ham.
En prenant le contrôle de Royal Mail, dont il détenait déjà 27% du capital, Daniel Kretinsky assure vouloir s’engager sur le long terme pour redresser l’entreprise. Son plan : investir dans la modernisation et la performance, sans bouleverser les effectifs.
EP Group est un investisseur à long terme et engagé, dont la mission est de faire de Royal Mail un opérateur postal moderne et performant offrant des services et des produits de haute qualité.
Daniel Kretinsky
Les prochaines étapes
Maintenant que la voie est libre, EP Corporate Group va pouvoir finaliser l’acquisition de Royal Mail, qui inclut aussi GLS, sa branche de colis internationaux. Cette opération devrait être bouclée au premier trimestre 2025 selon la presse financière.
Les syndicats, qui avaient manifesté leur opposition, se retrouvent désormais face à un fait accompli et une nouvelle direction. Reste à voir comment Daniel Kretinsky, rompu aux négociations sociales dans ses diverses entreprises, saura apaiser un climat social particulièrement tendu ces derniers mois.
Le destin de Royal Mail, institution chère aux Britanniques, est plus que jamais entre les mains de cet entrepreneur tchèque qui a su convaincre le gouvernement par ses promesses. L’avenir nous dira s’il parvient à tenir son pari de redressement et à écrire une nouvelle page de la longue histoire de la Royal Mail.