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L’avenir politique incertain de la Corée du Sud après la destitution du président

La Corée du Sud est plongée dans le chaos après la destitution du président Yoon Suk Yeol. Quel avenir politique attend le pays ? Analyse des enjeux clés et des scénarios possibles dans cette jeune démocratie sous haute tension...

La Corée du Sud traverse une période de turbulences politiques sans précédent après la destitution controversée du président Yoon Suk Yeol par le Parlement. Cette décision historique, qui fait suite à une tentative ratée d’imposer la loi martiale, plonge le pays dans l’incertitude quant à son avenir politique immédiat. Retour sur les enjeux majeurs de cette crise institutionnelle qui ébranle la jeune démocratie sud-coréenne.

Un pays en quête de stabilité politique

Suite au vote de destitution, c’est le Premier ministre Han Duck-soo, 75 ans, qui a endossé le rôle de président par intérim. Il aura la lourde tâche d’assurer une gouvernance stable pendant une période pouvant aller jusqu’à 8 mois, le temps que la Cour constitutionnelle se prononce sur la validité de l’éviction de Yoon Suk Yeol. En cas de confirmation, de nouvelles élections devront être organisées dans un délai de 2 mois.

Cette transition politique forcée intervient alors que le pays peine déjà à retrouver ses marques après la destitution en 2017 de l’ancienne présidente Park Geun-hye, elle aussi pour des motifs de corruption. Les Sud-Coréens aspirent plus que jamais à un retour à la normale et à une stabilité politique durable.

Une procédure de destitution sous haute surveillance

Adoptée à une large majorité de 204 voix contre 85, la motion de destitution de Yoon Suk Yeol doit encore être validée par la Cour constitutionnelle. Bien que celle-ci compte actuellement 3 postes vacants sur 9, les experts estiment très probable qu’elle confirme la décision du Parlement. Le président déchu s’étant rendu coupable de violations claires de la Constitution en proclamant la loi martiale, une décision unanime des 6 juges restants suffirait à entériner définitivement son éviction.

Il est évident que M. Yoon a tenté de paralyser les fonctions d’Etat (…) même les universitaires les plus conservateurs ont reconnu que cela avait provoqué une crise dans l’ordre constitutionnel.

Kim Hyun-jung, chercheuse à l’Institut de droit de l’Université de Corée

Vers un retour des manifestations ?

Déjà secoué par d’importantes manifestations au moment de la proclamation de la loi martiale, le pays pourrait à nouveau connaître une mobilisation populaire dans les semaines à venir. Selon des militants des deux camps interrogés par l’AFP, les rassemblements devraient se poursuivre jusqu’à la décision finale de la Cour constitutionnelle, chaque faction souhaitant maintenir la pression sur l’institution.

Les partisans de Yoon Suk Yeol devraient ainsi continuer à contester la légitimité de sa destitution, tandis que ses opposants veilleront à ce que les juges ne reviennent pas sur la sanction du Parlement. La place Gwanghwamun, dans le centre de Séoul, pourrait redevenir l’épicentre de cette confrontation par manifestations interposées.

Le chef de l’opposition en pole position pour la présidentielle

Si de nouvelles élections devaient effectivement être convoquées, c’est le leader de l’opposition Lee Jae-myung qui partirait avec une longueur d’avance. Crédité de plus de 52% d’opinions favorables dans les sondages, loin devant les autres prétendants, il a su tirer profit de la crise politique en faisant preuve d’un leadership affirmé.

Toutefois, Lee Jae-myung n’est pas exempt de controverses. Reconnu coupable de violations des lois électorales en novembre dernier, il a jusqu’ici échappé à une condamnation qui le rendrait inéligible grâce à une immunité de procédure. Une victoire à la présidentielle lui permettrait ainsi de continuer à bénéficier de l’immunité présidentielle et de se mettre à l’abri de poursuites judiciaires.

Du côté du parti au pouvoir, nul ne semble pour l’instant en mesure de rivaliser avec l’opposant malgré l’émergence de quelques prétendants comme le chef de la formation Han Dong-hoon ou le maire de Séoul Oh Se-hoon. Il faudra suivre de près les prochaines semaines pour voir si une figure providentielle réussit à s’imposer et à relancer la majorité dans la course à la Maison bleue.

La démocratie sud-coréenne à l’épreuve

Cette nouvelle crise politique intervient un peu plus de 35 ans après les manifestations historiques de juin 1987 qui avaient conduit à l’adoption d’une nouvelle Constitution et à l’établissement d’une véritable démocratie en Corée du Sud. Si les institutions ont depuis fait preuve d’une résilience certaine, comme en témoigne la destitution de la présidente Park Geun-hye en 2017, le chaos politique actuel met à l’épreuve la solidité du système.

Quelle que soit l’issue de la procédure visant Yoon Suk Yeol, cette séquence politique agitée aura des répercussions durables. Elle pourrait fragiliser la confiance des Sud-Coréens dans leurs institutions et raviver les fractures d’une société polarisée. L’ampleur de la victoire de l’opposition ou la capacité de la majorité à se réinventer seront déterminantes pour l’avenir du pays.

Une Corée du Sud stable et apaisée est plus que jamais un enjeu crucial, au moment où les tensions géopolitiques restent vives dans la péninsule coréenne et où le pays fait face à d’immenses défis économiques et sociaux. Tous les regards seront rivés sur Séoul dans les prochains mois pour savoir si la 10ème puissance mondiale réussira son pari démocratique ou se laissera à son tour gagner par les sirènes de l’instabilité chronique.

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