« S’il avait été allemand, il serait reparti depuis longtemps», déplore le frère de Théo Clerc, un graffeur français de 38 ans, écroué depuis près de 9 mois dans une prison azerbaïdjanaise. Son crime ? Avoir réalisé un tag dans le métro de Bakou, la capitale de ce pays du Caucase où les relations avec la France sont au plus bas.
Peintre de décors de cinéma et de défilés de mode reconnu dans le milieu du street art, Théo Clerc a été condamné en première instance à 3 ans de détention pour « dégradation de biens publics » et « hooliganisme ». Une peine d’une sévérité peu commune pour un simple graffiti, qui interroge sur les motivations réelles derrière ce verdict.
Un road trip artistique qui vire au cauchemar
Fin mars, Théo Clerc et deux autres street artists visitent l’Arménie et la Géorgie, avant de rallier l’Azerbaïdjan, ultime étape de leur périple caucasien. Là-bas, les trois compères pénètrent dans le métro de Bakou pour taguer des rames. Un « jeu du chat et de la souris » habituel pour ces artistes en quête d’adrénaline et de supports originaux, qui ne pensaient risquer qu’une amende en cas d’interpellation.
Mais le lendemain, la police revient embarquer Théo Clerc, cette fois pour de bon. Ses deux acolytes, un Australien et un Néo-zélandais, seront finalement relâchés contre une amende de 3000 dollars. Le Français, lui, commence un long calvaire judiciaire aux allures de bras de fer diplomatique.
Théo Clerc, « otage » des tensions France-Azerbaïdjan?
Car entre Paris et Bakou, le torchon brûle. La France est accusée de soutenir l’Arménie dans le conflit du Haut-Karabakh, tandis que l’Azerbaïdjan est soupçonné d’ingérence dans les territoires d’outre-mer français. Boycott de la COP29 à Bakou, arrestation d’un autre Français pour « espionnage », interdiction de quitter le territoire pour un troisième… Les incidents se multiplient.
« L’injustice est réelle, mon frère paie les relations qu’on entretient avec l’Azerbaïdjan. Il n’y a pas de secret là-dessus. »
Charlie Clerc, frère de Théo
Pour son avocate, Margot Fontaine, Théo Clerc est devenu « un otage diplomatique, pris au piège des mauvaises relations entre la France et l’Azerbaïdjan ». Un pion sacrifié sur l’autel de la géopolitique, au mépris du droit.
Jusqu’à 7 ans de prison pour « hooliganisme » ?
Car les charges retenues contre le graffeur français sont particulièrement lourdes. Outre les « dégradations » qui lui sont reprochées, passibles de 7 ans de prison, c’est surtout l’accusation de « hooliganisme » qui inquiète ses proches et son avocate.
Ce chef d’inculpation fourre-tout, qui sanctionne le fait de « porter atteinte aux intérêts de l’État ou de manquer de respect à la société », est souvent utilisé contre les opposants politiques en Azerbaïdjan. Il est passible de 5 ans d’emprisonnement.
Pourtant, les fresques réalisées par Théo Clerc à Bakou, représentant seulement « des lettres correspondant aux noms d’artistes des graffeurs, étaient dénuées de tout caractère politique ou obscène », souligne Me Fontaine.
Un procès en appel crucial
Lundi doit se tenir le procès en appel de Théo Clerc. Une audience cruciale, qui pourrait confirmer sa lourde peine, voire l’alourdir. En attendant, l’artiste parisien, décrit comme « extrêmement stressé » et en proie à des « trous de mémoire » par son frère lors de sa première visite en prison, ronge son frein dans sa geôle azerbaïdjanaise.
De son côté, le Quai d’Orsay assure suivre l’affaire de près et fournir une assistance consulaire au détenu. Mais beaucoup dénoncent la timidité des autorités françaises et réclament une intervention au plus haut niveau de l’État pour sortir Théo Clerc de ce qui ressemble de plus en plus à une impasse judiciaire et diplomatique.
Une chose est sûre: au-delà d’un fait divers, l’affaire Théo Clerc illustre la dégradation continue des relations entre Paris et Bakou. Et pose la question du sort des ressortissants français pris dans les filets de la justice azerbaïdjanaise, sur fond de bras de fer géopolitique.
De son côté, le Quai d’Orsay assure suivre l’affaire de près et fournir une assistance consulaire au détenu. Mais beaucoup dénoncent la timidité des autorités françaises et réclament une intervention au plus haut niveau de l’État pour sortir Théo Clerc de ce qui ressemble de plus en plus à une impasse judiciaire et diplomatique.
Une chose est sûre: au-delà d’un fait divers, l’affaire Théo Clerc illustre la dégradation continue des relations entre Paris et Bakou. Et pose la question du sort des ressortissants français pris dans les filets de la justice azerbaïdjanaise, sur fond de bras de fer géopolitique.