Le gouvernement italien vient de prendre une décision qui ne passe pas inaperçue : accorder la nationalité italienne à Javier Milei, le très controversé président argentin ultralibéral. Cette mesure, rendue possible par les origines italiennes de M. Milei, suscite l’indignation de l’opposition transalpine qui dénonce une injustice envers les nombreux étrangers vivant en Italie.
Un président argentin au look rock star qui reçoit la nationalité italienne
Élu en 2023 à la présidence argentine, Javier Milei se distingue par son look échevelé et sa personnalité exubérante qui n’est pas sans rappeler une rock star. Mais derrière ces apparences se cache un homme politique aux idées très arrêtées, grand défenseur de l’ultralibéralisme économique. C’est donc une figure clivante du paysage politique sud-américain qui vient de se voir octroyer, ainsi qu’à sa sœur Karina, la nationalité italienne.
Selon une source proche du dossier, cette décision a été prise en urgence par le gouvernement de Giorgia Meloni, la Première ministre italienne d’extrême droite avec qui M. Milei entretient d’étroites relations. Les deux dirigeants devaient d’ailleurs se rencontrer à Rome dans le cadre d’un festival organisé par le parti Fratelli d’Italia de Mme Meloni.
Un geste symbolique qui indigne l’opposition italienne
Au-delà de l’amitié affichée entre les deux dirigeants, illustrée par le cadeau d’une statuette à l’effigie de M. Milei brandissant une tronçonneuse, cette naturalisation accélérée passe très mal auprès de l’opposition italienne. Elle y voit une « insulte » et une « discrimination intolérable » envers les nombreux jeunes étrangers nés et vivant en Italie qui peinent à obtenir la nationalité.
Pour des millions d’Italiens sans nationalité, nés en Italie, qui ont grandi dans notre pays, qui ont étudié ici, qui travaillent ici, qui payent des impôts dans notre pays – contrairement au président Milei – obtenir la nationalité italienne est un parcours du combattant.
– Riccardo Magi, député du parti d’opposition Europa
Un débat qui ravive les tensions sur les règles d’accès à la nationalité italienne
En Italie, les règles pour obtenir la nationalité sont parmi les plus restrictives d’Europe. Les étrangers doivent résider légalement depuis au moins 10 ans sur le sol italien pour pouvoir entamer une procédure de naturalisation. Quant aux enfants nés en Italie de parents étrangers, ils ne peuvent prétendre à la nationalité qu’à leur majorité, à 18 ans.
L’opposition, soutenue par des ONG comme Oxfam, milite pour un assouplissement de ces règles jugées trop dures, en ramenant par exemple la durée de résidence à 5 ans comme c’est le cas au Royaume-Uni, en France ou en Allemagne. Mais ces propositions se heurtent au refus catégorique de la coalition de droite et d’extrême droite au pouvoir.
Javier Milei, le symbole d’une politique migratoire à deux vitesses ?
En accordant aussi rapidement la nationalité italienne à Javier Milei, une personnalité politique étrangère controversée, le gouvernement Meloni s’expose à l’accusation de pratiquer une politique de « deux poids, deux mesures » en matière d’immigration et d’accès à la citoyenneté.
Cette décision risque d’attiser les frustrations de la nombreuse communauté étrangère vivant et travaillant en Italie qui ne bénéficient pas des mêmes facilités. Certains élus d’opposition, comme Riccardo Magi, n’ont pas hésité à ironiser en conseillant à ces Italiens de fait mais sans papiers de « prendre une tronçonneuse, une vraie ou une fausse » pour faire avancer leur cause.
Cette polémique illustre une nouvelle fois les paradoxes et les difficultés de la politique migratoire italienne, tiraillée entre une réalité sociale et économique qui rend incontournable la présence des étrangers et une volonté politique de freiner l’immigration et l’accès à la nationalité. Reste à savoir si le « cadeau » fait à Javier Milei fera bouger les lignes de ce débat sensible.