Jeudi dernier, le gouvernement canadien a dévoilé ses nouveaux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2035. Cependant, ces cibles ont rapidement été jugées trop peu ambitieuses par plusieurs organisations de défense de l’environnement. Cette annonce intervient alors que le Canada, grand producteur d’énergies fossiles, peine à tenir ses engagements climatiques.
Un objectif de réduction de 40 à 45% d’ici 2035
Selon le plan présenté par Ottawa, le Canada vise désormais à réduire ses émissions de 40 à 45% par rapport aux niveaux de 2005, et ce d’ici 2035. L’objectif final reste d’atteindre la carboneutralité en 2050. Cependant, cette nouvelle cible ne représente qu’une amélioration de 5% par rapport à l’engagement précédent fixé pour 2030.
Le ministre de l’Environnement Steven Guilbeault a défendu ces objectifs, les qualifiant de « réalistes et atteignables ». Il a affirmé qu’ils permettraient de « tenir la promesse faite aux générations futures de leur laisser un monde sûr, durable et prospère ».
Des ONG environnementales peu convaincues
Toutefois, cet optimisme n’est pas partagé par tous. Plusieurs organisations écologistes, dont 350.org et le Climate Action Network, se sont dites « très préoccupées » et ont dénoncé des cibles « faibles » et « insuffisantes » pour faire face à l’urgence climatique.
Bien que responsable de moins de 2% des émissions mondiales, le Canada figure parmi les plus gros émetteurs par habitant, en raison notamment de son industrie pétrolière et gazière. Et jusqu’à présent, le pays a systématiquement manqué ses objectifs intermédiaires de réduction.
Un audit réalisé en novembre par le commissaire à l’environnement a alerté sur le « peu de temps restant avant 2030 » et les « progrès insuffisants » du Canada en la matière.
Un défi politique pour Justin Trudeau
Outre les défis techniques et économiques, ces nouveaux objectifs climatiques représentent aussi un challenge politique pour le Premier ministre Justin Trudeau. Son gouvernement minoritaire fait face à une opposition grandissante sur la question, menée par le chef conservateur Pierre Poilievre.
Ce dernier, en tête dans les sondages, appelle à des élections anticipées et réclame la suppression de la taxe carbone mise en place par les libéraux. Une mesure phare mais controversée de la stratégie canadienne de lutte contre le changement climatique.
Dans ce contexte, l’accélération des efforts pour le climat prônée par les experts et les ONG s’annonce délicate. Trudeau devra convaincre de la pertinence économique et sociale de sa politique verte, alors que son opposition joue la carte de la défense des consommateurs et des travailleurs du secteur des énergies fossiles.
Un long chemin vers la carboneutralité
Malgré les promesses répétées, la route vers des émissions nettes nulles d’ici 2050 s’annonce semée d’embûches pour le Canada. Les derniers chiffres font état d’une baisse de seulement 7,1% des gaz à effet de serre depuis 2005, à 708 mégatonnes équivalent CO2.
Pour tenir la trajectoire fixée, il faudrait donc accélérer fortement le rythme de réduction au cours des 15 prochaines années. Un défi herculéen qui nécessitera la mobilisation de toute la société canadienne et d’importants investissements pour transformer l’économie.
Face aux doutes et aux critiques, le ministre Guilbeault se veut rassurant. « Nous avons toutes les chances d’atteindre notre objectif pour 2030 », a-t-il déclaré. Reste à transformer ces paroles en actes, pour prouver la crédibilité climatique du Canada sur la scène internationale et léguer un avenir plus durable aux prochaines générations.