La ville de Kabkabiya, au cœur du Darfour-Nord, a été le théâtre d’un drame effroyable ce lundi. Alors que les habitants des villages alentours affluaient pour le marché hebdomadaire, une frappe aérienne d’une violence inouïe s’est abattue sur la foule, faisant plus d’une centaine de morts et des centaines de blessés, dont de nombreuses femmes et enfants.
D’après une organisation d’avocats prodémocratie qui documente les atrocités commises depuis le début de la guerre civile il y a 20 mois, ce raid meurtrier fait partie d’une campagne d’escalade continue qui vise délibérément les zones résidentielles densément peuplées. Les belligérants, l’armée régulière et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), sont accusés de bombarder sans discernement en utilisant notamment des barils explosifs, comme à Nyala, la capitale du Darfour-Sud.
Un conflit qui n’en finit pas de faire des victimes
Depuis avril 2023, le Soudan est déchiré par une guerre fratricide opposant l’armée, conduite par le général Abdel Fattah al-Burhane, aux FSR de son ancien allié le général Mohamed Hamdane Daglo. Ce conflit a déjà fait des dizaines de milliers de morts et jeté sur les routes plus de 11 millions de déplacés, provoquant l’une des pires crises humanitaires de l’histoire récente selon l’ONU.
Malgré les démentis des deux camps qui affirment ne viser que des cibles militaires, ce sont bien les populations civiles qui paient le plus lourd tribut. Le raid sur Kabkabiya en est la tragique illustration. Un autre incident, l’explosion d’un drone non identifié qui s’était écrasé dans le Kordofan-Nord, a également coûté la vie à 6 personnes dont des enfants.
La communauté internationale impuissante
Face à ces drames à répétition, la communauté internationale semble désarmée. Les appels au cessez-le-feu et à la retenue lancés par l’ONU et les chancelleries occidentales restent lettre morte. Les sanctions imposées par certains pays n’ont guère d’effet sur le terrain où la loi du plus fort règne en maître.
Pendant ce temps, la situation humanitaire continue de se dégrader. Privée d’aide, une grande partie de la population n’a plus accès aux biens de première nécessité, à l’eau potable et aux soins. Les organisations humanitaires, qui s’efforcent de porter secours aux victimes dans des conditions très précaires, tirent la sonnette d’alarme. Sans une action d’envergure pour protéger les civils et acheminer l’aide, le Soudan pourrait basculer dans une catastrophe humanitaire sans précédent.
Un avenir bien sombre
Malheureusement, aucune issue ne semble se profiler à court terme dans ce conflit. Aucun des deux camps ne paraît en mesure de l’emporter militairement et les efforts de médiation piétinent. Les rivalités ethniques et les luttes de pouvoir qui minent le Soudan depuis des décennies ont de beaux jours devant elles.
Dans ce contexte, c’est la population civile qui risque de continuer à payer le prix fort. Prise en étau entre des hommes en armes plus soucieux de leurs intérêts que du bien commun, elle est la victime d’une guerre absurde et cruelle dont on ne voit pas la fin. Chaque jour apporte son nouveau lot de morts, de blessés et de déplacés dans l’indifférence quasi-générale.
Le raid sur le marché de Kabkabiya restera comme un symbole de cette folie meurtrière qui ravage le Soudan. Un énième drame dans un pays qui a déjà trop souffert et qui sombre chaque jour un peu plus dans le chaos et la violence. Un terrible gâchis humain qui en dit long sur la faillite de la communauté internationale et l’impuissance des hommes de bonne volonté face à la force aveugle des armes.