Dans un contexte politique tendu au Sénégal, le maire de Dakar, Barthélémy Dias, a exprimé lundi sa détermination à résister à d’éventuelles tentatives du nouveau gouvernement de le déchoir de son mandat à la tête de la capitale. Cette déclaration survient après qu’il ait été déchu de son mandat de député la semaine dernière par l’Assemblée nationale.
Lors d’une conférence de presse, Barthélémy Dias a lancé un avertissement clair à ceux qui chercheraient à le destituer de son poste de maire de Dakar : « Je souhaiterais leur dire tout de suite que je n’accepterais pas ». Il a ajouté, non sans une pointe de défi : « Barthélémy n’est pas violent mais je ne me laisserai pas marcher sur les pieds ».
Une déchéance parlementaire controversée
La semaine dernière, l’Assemblée nationale a en effet déchu M. Dias de son mandat de député, à la demande du ministère de la Justice. Cette décision fait suite à une condamnation pour homicide volontaire prononcée en 2017 à l’encontre de Barthélémy Dias, confirmée en appel en 2022 et validée par la Cour suprême en 2023. Une affaire qui suscite la polémique.
Barthélémy Dias a cependant déclaré lundi qu’il comptait de toute façon renoncer à son mandat de député « pour des raisons personnelles ». Mais il dénonce ce qu’il considère comme un acharnement et une volonté de vengeance à son encontre de la part de ses opposants politiques.
Les tensions avec le Premier ministre Ousmane Sonko
Au cœur de cette confrontation se trouve la relation houleuse entre Barthélémy Dias et l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko. Les deux hommes étaient pourtant alliés lorsqu’Ousmane Sonko était dans l’opposition. Mais depuis l’élection présidentielle de mars 2024, remportée par Ousmane Sonko, et sa nomination au poste de Premier ministre en avril, les tensions n’ont cessé de s’accroître.
Leur rivalité politique a déjà donné lieu à des incidents au cours de la campagne pour les élections législatives de novembre, largement remportées par le camp du Premier ministre. Une victoire qui renforce sa position face à ses opposants.
La menace d’une déchéance municipale
C’est dans ce contexte que plane désormais la menace d’une éventuelle déchéance de Barthélémy Dias de son mandat de maire de Dakar. Un scénario qui rappelle le sort de son mentor, Khalifa Sall, déchu de son poste de maire par décret présidentiel en 2018 suite à une condamnation pour malversations.
Mais Barthélémy Dias se montre combatif face à cette éventualité. Élu maire de Dakar en 2022 dans une coalition l’alliant alors au parti Pastef d’Ousmane Sonko, il entend bien défendre son mandat municipal malgré la rupture de cette alliance et les défis qui se dressent face à lui.
« Je résisterai à toute tentative de me déchoir de mon mandat de maire, obtenu par la volonté des Dakarois. C’est un devoir envers les citoyens qui m’ont élu. »
Barthélémy Dias, maire de Dakar
Un bras de fer politique qui s’annonce
La détermination affichée par Barthélémy Dias laisse présager un bras de fer politique intense dans les semaines et mois à venir. La question de son maintien à la tête de la mairie de Dakar promet d’être au cœur des débats.
D’un côté, le gouvernement d’Ousmane Sonko pourrait chercher à fragiliser un opposant de poids en le privant de son ancrage local. De l’autre, Barthélémy Dias semble prêt à mobiliser ses soutiens pour résister à ce qu’il considère comme une manœuvre politique.
Ce feuilleton politico-judiciaire met en lumière les tensions persistantes dans le paysage politique sénégalais, où les luttes de pouvoir et les rivalités personnelles continuent de s’exprimer, parfois au détriment de la stabilité des institutions. Il illustre aussi la fragilité des alliances politiques dans un contexte de recomposition permanente.
Les enjeux pour la capitale sénégalaise
Au-delà des considerations politiques, c’est aussi l’avenir de Dakar en tant que capitale et mégalopole en développement qui est en jeu. Avec ses défis multiples en termes d’urbanisation, d’infrastructures, de gestion des ressources et de cohésion sociale, la ville a besoin d’une gouvernance stable et efficace.
Les Dakarois seront sans doute attentifs à la capacité de leur maire à défendre son mandat et à poursuivre les projets engagés pour le développement de la capitale. Mais aussi à la volonté du gouvernement central de travailler en bonne intelligence avec les autorités locales, dans l’intérêt des populations.
« Au-delà des rivalités politiques, c’est le bien-être des Dakarois qui doit primer. Nous avons besoin d’une gouvernance apaisée et constructive pour relever les nombreux défis de notre capitale. »
Amadou Diop, analyste politique
Les prochaines semaines seront donc décisives pour Barthélémy Dias et pour l’avenir politique de Dakar. Le maire déchu de son mandat de député semble déterminé à ne pas se laisser déloger de son fauteuil municipal. Mais il lui faudra sans doute mobiliser des soutiens solides et faire preuve de discernement s’il veut sortir vainqueur de ce nouveau combat politique.
Reste à savoir si les intérêts des Dakarois seront réellement au cœur des considérations des différents acteurs de ce bras de fer. Car au-delà des enjeux de pouvoir, c’est aussi la bonne gouvernance de la capitale sénégalaise et le bien-être de ses habitants qui méritent toute l’attention des responsables politiques.
