Vendredi soir, un coup de semonce a retenti dans le paysage économique français. L’agence de notation Standard & Poor’s a dégradé la note de la dette de l’Hexagone, la faisant passer de AA à AA-. Une décision guère surprenante au vu des signaux d’alerte répétés ces derniers mois, mais qui n’en soulève pas moins de légitimes inquiétudes quant à l’avenir des finances publiques françaises.
Le gouvernement se veut rassurant
Dès le lendemain matin, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est employé à minimiser l’impact de cette dégradation, insistant sur le fait que la France conservait malgré tout “une des meilleures signatures” et que sa dette trouvait toujours facilement preneur sur les marchés. Il a également réaffirmé avec force l’ambition du gouvernement de redresser les comptes publics, promettant des réformes structurelles d’envergure.
Nous restons à un niveau de notation très bon, C’est comme si nous étions passés de 18 à 17 sur 20 !
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie
Menaces sur le déficit et la dette
Optimisme de façade ou réelle sérénité ? Les chiffres, eux, ont de quoi préoccuper. Avec un déficit public attendu à 5% du PIB cette année et une dette publique dépassant allègrement les 3000 milliards d’euros, soit près de 120% du PIB, la France fait figure de mauvais élève en Europe. Et la dégradation par S&P vient souligner la fragilité de cette situation, rendant plus compliquée et plus coûteuse la tâche de refinancement de la dette sur les marchés.
Risque de hausse d’impôts ?
Malgré les dénégations répétées du gouvernement, le spectre d’une hausse de la pression fiscale pour tenter de redresser les comptes plane. Emmanuel Macron avait pourtant promis de ne pas alourdir les impôts durant son quinquennat. Pourra-t-il tenir cet engagement si les agences de notation continuent de tirer la sonnette d’alarme et que les marchés se montrent plus exigeants ?
Quelle réaction des marchés ?
C’est la grande inconnue des prochains jours. Si les investisseurs venaient à considérer la signature française comme plus risquée, exigeant des taux d’intérêt plus élevés pour compenser, cela compliquerait sérieusement l’équation budgétaire hexagonale. Pour l’heure, les taux demeurent très bas, mais la dégradation par S&P constitue un avertissement sérieux que le gouvernement ne peut ignorer.
Réformes structurelles indispensables
Au-delà des aspects purement financiers, cette alerte souligne surtout l’urgence pour la France d’engager les réformes structurelles qui lui font défaut depuis trop longtemps : réforme des retraites, de l’assurance chômage, maîtrise des dépenses publiques, gains de compétitivité… Autant de chantiers colossaux et politiquement sensibles que l’exécutif ne pourra plus repousser éternellement s’il veut regagner la confiance des agences de notation et des investisseurs.
La meilleure réponse, c’est de garder le cap sur nos objectifs de réduction des déficits, c’est de faire les réformes nécessaires pour avoir une croissance plus forte dans la durée.
Bruno Le Maire, ministre de l’Économie
Un électrochoc salutaire ?
Paradoxalement, ce coup de semonce pourrait avoir un effet bénéfique en poussant le gouvernement à accélérer son calendrier de réformes. C’est en tout cas le pari que semble faire Bruno Le Maire, qui entend utiliser cet avertissement comme un levier pour vaincre les résistances et faire accepter des changements difficiles mais nécessaires.
En définitive, la dégradation de la note française constitue un signal d’alarme préoccupant mais qui peut aussi être l’occasion d’un sursaut. Au gouvernement désormais de prouver sa détermination à attaquer enfin les maux structurels du pays. Car au-delà des effets de communication, c’est sa crédibilité et sa souveraineté budgétaire que la France joue dans les prochains mois. Un défi majeur pour Emmanuel Macron qui ne pourra plus se défausser.