En pleine crise politique, alors que le pays se cherche un nouveau gouvernement après la chute de celui mené par Michel Barnier, les cartes semblent rebattues. Des alliances jusqu’ici jugées impossibles sont évoquées, y compris avec le Rassemblement National. Un paysage politique en pleine recomposition qui bouscule les certitudes.
« N’exclure personne dans l’équation politique actuelle » selon Kasbarian
C’est un appel qui détonne dans la bouche d’un ancien ministre. Guillaume Kasbarian, qui occupait le poste de ministre de la Fonction publique jusqu’à la censure, a appelé samedi à « n’exclure personne dans l’équation politique actuelle » dans les négociations pour constituer un prochain gouvernement, y compris les députés du Rassemblement national (RN).
Un positionnement justifié, selon lui, par l’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale :
Si une majorité absolue existait, on pourrait se payer le luxe de dire : « Je n’ai pas besoin des autres, je fonce, j’applique mon programme, mais nous ne sommes pas dans cette situation ».
– Guillaume Kasbarian, ex-ministre de la Fonction publique
La fin du « cordon sanitaire » autour du RN ?
Ces propos marquent une rupture avec la doctrine du « cordon sanitaire » pratiquée jusqu’ici par la majorité présidentielle envers le RN. Une ligne rouge qui semble s’estomper face aux réalités arithmétiques du Palais Bourbon.
Guillaume Kasbarian va même plus loin, évoquant la possibilité d’inclure les élus RN dans les discussions budgétaires, un point crucial alors que le pays n’a toujours pas de budget pour l’année à venir :
Pourquoi exclure ces élus des discussions budgétaires ? Le gouvernement de Michel Barnier a travaillé pendant trois mois avec l’ensemble des forces politiques.
– Guillaume Kasbarian, ex-ministre de la Fonction publique
La « macronie » divisée sur la question
Ces déclarations font écho à d’autres voix au sein de la majorité présidentielle qui plaident pour un dépassement des clivages traditionnels. Mais elles ne font pas l’unanimité. Plusieurs figures « macronistes » ont réaffirmé leur opposition à toute alliance avec l’extrême-droite.
Emmanuel Macron lui-même, dans son allocution post-censure, a fustigé « un front antirépublicain » ayant fait chuter le gouvernement Barnier, semblant exclure toute alliance avec les extrêmes. Une position de fermeté qui pourrait cependant être mise à mal par les réalités d’une Assemblée morcelée.
Vers un « pacte législatif » élargi ?
Face à cette équation complexe, certains, à l’instar de la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet, plaident pour un « pacte législatif » allant des socialistes à la droite. Une coalition large, seule à même selon eux de garantir une certaine stabilité dans un paysage politique fragmenté.
Mais là encore, les écueils sont nombreux. Les divergences idéologiques entre ces formations politiques rendent incertaine leur capacité à s’accorder sur un programme commun de gouvernement.
Dans ce contexte, la déclaration de Guillaume Kasbarian résonne comme un pavé dans la mare. Si elle ne préfigure pas nécessairement de futures alliances, elle témoigne d’un paysage politique en plein questionnement, où les lignes bougent et les certitudes vacillent.
Les prochains jours seront cruciaux. Emmanuel Macron a promis de recevoir les chefs de parti pour des consultations. De ces échanges dépendra la coloration de la future majorité et, in fine, la capacité du pays à sortir de l’ornière politique dans laquelle il se trouve. Un défi de taille dans un pays plus que jamais fracturé.
