Un séisme politique vient de secouer la Syrie. Après plus d’une décennie de guerre civile sanglante, le régime de Bachar al-Assad s’est finalement effondré ce week-end, suite à une offensive fulgurante des rebelles qui a abouti à la chute de Damas, la capitale. Le président syrien aurait fui le pays selon des sources diplomatiques. La Turquie, acteur clé dans la région, a pris acte de ce changement radical de pouvoir.
La Turquie constate « l’effondrement du régime d’Assad »
C’est ce qu’a déclaré dimanche le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, en marge d’une conférence à Doha au Qatar. « Le régime d’Assad s’est effondré et le pouvoir a changé de main dans le pays », a-t-il constaté sans détour. Interrogé sur le sort de Bachar al-Assad, il a estimé que ce dernier serait « probablement hors de Syrie » suite à la débâcle de ses forces.
Cette prise de position d’Ankara intervient au lendemain de réunions infructueuses samedi entre le chef de la diplomatie turque et ses homologues russe et iranien, deux soutiens de poids du régime syrien. Malgré leurs efforts, ils n’ont pu que constater l’ampleur des gains des rebelles, en grande partie constitués de groupes islamistes, qui ont mis fin à cinq décennies de règne du parti Baas en Syrie.
Un pays livré au chaos depuis 2011
Hakan Fidan a rappelé que ce bouleversement n’était pas une surprise, la Syrie étant plongée dans la tourmente depuis 13 ans maintenant, depuis la répression sanglante par le régime des manifestations pro-démocratie en 2011 qui a dégénéré en guerre civile. Un conflit qui a fait près de 500 000 morts et des millions de déplacés.
Si la Turquie n’est pas directement impliquée militairement en Syrie, elle y garde une influence notable, ayant soutenu divers groupes rebelles au fil des années. Ankara voit donc plutôt d’un bon œil l’avancée récente des insurgés. Cependant, M. Fidan a tenu à préciser que son pays restait vigilant et en contact avec les rebelles pour éviter que des groupes comme l’État islamique ou le PKK kurde, considéré comme terroriste par la Turquie, ne profitent du chaos pour étendre leur influence.
La Turquie espère une transition en douceur
Au-delà du constat de l’effondrement du régime, la Turquie se projette déjà sur « l’après-Assad ». Le ministre Fidan a ainsi appelé la communauté internationale à accompagner une transition politique pacifique :
Toute nouvelle administration à Damas ne devrait pas constituer une menace pour ses voisins. Au contraire, la nouvelle Syrie devrait s’attaquer aux problèmes existants et éliminer les menaces.
En filigrane, Ankara espère bien peser sur l’avenir politique de son voisin du sud. Un enjeu vital pour la Turquie qui partage près de 900 km de frontière avec la Syrie et accueille près de 3,5 millions de réfugiés syriens sur son sol. D’ailleurs, Hakan Fidan a clairement exprimé le souhait de voir, à terme, « des millions de Syriens qui ont été forcés de quitter leurs maisons retourner sur leurs terres ».
Quel avenir pour la Syrie ?
Si le régime de Damas semble bel et bien tombé, de nombreuses incertitudes demeurent sur l’avenir de la Syrie :
- Qui va réellement prendre le pouvoir parmi les différentes factions rebelles, et sur quelles zones du pays ?
- Quel rôle vont jouer les puissances étrangères (Turquie, Russie, Iran, pays du Golfe…) dans la transition ?
- Comment pacifier et reconstruire un pays dévasté par 13 ans de guerre ?
- Le retour des millions de réfugiés est-il envisageable à court terme ?
Autant de questions cruciales auxquelles les nouveaux maîtres de Damas, quels qu’ils soient, devront rapidement apporter des réponses. Car comme l’a souligné le ministre turc en guise de conclusion : « Il est temps de s’unir et de reconstruire le pays ». Plus facile à dire qu’à faire tant les plaies de cette interminable guerre civile restent béantes. La chute du régime Assad n’est qu’une première étape. Le plus dur reste sans doute à venir pour sortir la Syrie du chaos.