Une vive polémique a éclaté en Colombie suite à un rapport explosif publié par des experts des Nations unies. Selon ce document, les restes de quelque 20.000 personnes portées disparues durant les longues décennies de conflit armé seraient actuellement stockés dans un mystérieux hangar situé près d’un aéroport. Une révélation choc aussitôt démentie par les autorités colombiennes, qui réclament des preuves de ces graves accusations.
Un rapport onusien qui sème le trouble
Le Comité des disparitions forcées de l’ONU, un groupe d’experts indépendants, est à l’origine de cette controverse. Dans un rapport publié jeudi, ils affirment que « des milliers de corps non identifiés reposent dans des cimetières ou des entrepôts » en Colombie. Parmi ces lieux figureraient « un hangar de l’aéroport de Bogota où environ 20.000 corps non identifiés seraient entreposés ». Des allégations détonantes, qui ravivent les plaies profondes laissées par plus d’un demi-siècle de violences.
Un conflit meurtrier aux lourdes conséquences
Depuis les années 60, la Colombie est déchirée par un conflit impliquant guérillas, paramilitaires, narcotrafiquants et forces de l’ordre. Cette guerre fratricide a fait plus de 260.000 morts et des dizaines de milliers de disparus. Dans ce pays, on recense plus de 100.000 personnes dont le sort reste inconnu. Des familles vivent dans l’angoisse et l’incertitude, sans jamais pouvoir faire leur deuil. Le rapport de l’ONU, s’il était avéré, jetterait une lumière crue sur l’ampleur de ces disparitions forcées.
La Colombie dément en bloc
Sans surprise, le gouvernement colombien a immédiatement rejeté en bloc les assertions des experts onusiens. Le ministre de l’Intérieur lui-même, Juan Fernando Cristo, a estimé sur Twitter qu’il s’agissait d’« une déclaration très grave et non vérifiée ». Il a exigé de la transparence et des éléments tangibles pour étayer ces propos. Le maire de Bogota, Carlos Fernando Galan, a lui aussi réclamé des preuves, tout comme certains responsables onusiens en Colombie.
C’est une déclaration très grave et non vérifiée face à laquelle l’opinion publique mérite de la transparence.
– Juan Fernando Cristo, ministre colombien de l’Intérieur
La longue quête des disparus
L’Unité de recherche des personnes disparues, chargée de retrouver les milliers de Colombiens dont on a perdu la trace, assure de son côté ne disposer « d’aucune information » sur l’existence d’un tel lieu de stockage de corps près de l’aéroport. À Bogota, les cimetières abriteraient 5500 dépouilles non identifiées ou non réclamées, selon la mairie, loin des 20.000 évoquées par l’ONU. Mais pour de nombreuses familles, le doute et l’inquiétude persistent.
Une affaire aux multiples zones d’ombre
Ce mystérieux hangar renferme-t-il réellement les restes de milliers de disparus ? Ou s’agit-il d’une erreur, voire d’une manipulation? Pour l’heure, aucun élément probant n’a été apporté pour trancher. Mais cette polémique rappelle combien les blessures du conflit sont encore à vif. Malgré l’accord de paix signé en 2016 avec la guérilla des Farc, la Colombie peine à construire la vérité sur les exactions passées. Et les familles de disparus continuent leur quête obstinée de réponses.
Un travail de mémoire indispensable
Cette affaire illustre les immenses défis qui attendent encore la Colombie sur le chemin de la réconciliation. Faire la lumière sur le sort des disparus apparaît comme une étape cruciale pour permettre aux victimes de faire leur deuil et à la société de se reconstruire. Un long et patient travail de mémoire, d’exhumation et d’identification des corps, reste à accomplir. Sans quoi les fantômes du passé continueront de hanter le présent.
D’aucuns y voient un test pour le gouvernement : saura-t-il répondre à la demande de vérité et de justice des familles meurtries ? Ou cédera-t-il à la tentation de l’oubli ? L’attitude des autorités face à ce dossier sensible sera scrutée de près. Car derrière chaque disparu, il y a des proches qui espèrent et souffrent. En Colombie, le décompte macabre des victimes de la guerre n’est pas près de s’achever. Et le mystère du hangar de l’aéroport n’est peut-être que la partie émergée de l’iceberg.