L’accord de libre-échange tant attendu entre l’Union européenne et les pays du Mercosur suscite des réactions contrastées en Allemagne. Si les fédérations industrielles se réjouissent de cette bouffée d’oxygène pour l’économie nationale en difficulté, le monde agricole exprime de vives inquiétudes quant aux conséquences de cet accord sur la compétitivité des exploitations.
Un accord salvateur pour l’industrie allemande
Selon Siegfried Russwurm, président de la Fédération des industries allemandes (BDI), cet accord commercial « donne un coup de pouce de croissance absolument nécessaire pour l’économie allemande et européenne ». Les entreprises européennes devraient en effet économiser environ 4 milliards d’euros par an en droits de douane grâce à cet accord.
De plus, l’Europe va pouvoir accéder à des « matières premières cruciales comme le lithium et le cuivre, essentielles pour des secteurs clés comme la mobilité électrique et les énergies renouvelables », souligne M. Russwurm. Un enjeu majeur pour l’Allemagne qui peine à se remettre de la crise énergétique déclenchée par la guerre en Ukraine.
La chimie allemande enthousiaste
Wolfgang Große Entrup, directeur général de l’Association de l’industrie chimique (VCI), un des piliers de l’économie allemande, voit également d’un très bon œil cet accord. Il le perçoit comme une « étape importante pour plus de croissance et pour une position forte de l’UE en tant qu’acteur mondial souverain ».
L’accord est crucial face à la menace d’un conflit commercial avec les États-Unis et à l’influence croissante de la Chine en Amérique latine.
– Ulrich Ackermann, responsable commerce extérieur à la VDMA
Ulrich Ackermann, responsable du commerce extérieur au sein de la fédération allemande de la machine-outil (VDMA), estime que cet accord est « crucial face à la menace d’un conflit commercial avec les États-Unis et à l’influence croissante de la Chine en Amérique latine », une région où l’UE n’est plus le premier partenaire commercial dans le secteur de la mécanique.
Les agriculteurs sonnent l’alarme
Mais cet enthousiasme n’est pas partagé par tous les secteurs. L’Union allemande des agriculteurs (Bauernverband) dénonce un accord qui « profite unilatéralement aux agriculteurs des pays du Mercosur et affaiblit massivement nos exploitations face à la concurrence », fustige Joachim Rukwied, son président.
Selon lui, les mécanismes prévus pour protéger les normes européennes en matière d’agriculture et de production alimentaire « restent largement insuffisants ». Il appelle ainsi le Parlement européen et le Conseil européen à « ne pas accepter cet accord dans sa forme actuelle » lorsqu’ils examineront le texte.
Des enjeux cruciaux pour l’avenir
Cet accord commercial, fruit de près de 20 ans de négociations, revêt une importance stratégique majeure pour l’Union européenne. Face aux tensions commerciales croissantes avec les États-Unis et à l’expansion de l’influence chinoise, il permettrait à l’Europe de renforcer ses liens avec une région clé.
Mais les inquiétudes exprimées par le monde agricole soulignent la nécessité de trouver un équilibre entre ouverture commerciale et protection des filières sensibles. Les débats au Parlement européen et au Conseil s’annoncent intenses pour éventuellement amender le texte et trouver un compromis acceptable par tous.
L’enjeu est de taille pour l’économie allemande et européenne. Cet accord pourrait être un puissant moteur de croissance, à condition de mettre en place les garde-fous nécessaires pour préserver les intérêts de tous les secteurs, y compris celui de l’agriculture. Un défi complexe mais crucial pour l’avenir des relations commerciales entre l’Europe et l’Amérique latine.
