La Croatie se retrouve une nouvelle fois secouée par un scandale de corruption touchant les plus hautes sphères du pouvoir. Vendredi dernier, le Premier ministre conservateur Andrej Plenkovic a survécu de justesse à un vote de défiance au Parlement. Une motion initiée par l’opposition suite aux révélations d’une enquête anti-corruption visant plusieurs ministres de son gouvernement.
Un fléau récurrent qui gangrène le gouvernement
Depuis 2016, date d’arrivée au pouvoir d’Andrej Plenkovic et de son parti de centre-droit HDZ, la corruption semble s’être installée durablement au cœur de l’exécutif croate. En l’espace de 7 ans, ce ne sont pas moins d’une douzaine de ministres qui ont été contraints à la démission, éclaboussés par divers scandales et malversations.
Le dernier épisode en date concerne le ministre de la Santé, Vili Beros. Placé en garde à vue le mois dernier, il a été immédiatement limogé par le Premier ministre. Mais le mal était fait. Selon des sources proches de l’enquête menée par le parquet européen, Beros serait impliqué dans un vaste système de surfacturation de matériel médical. Microscopes chirurgicaux notamment, pour un préjudice estimé à plus de 600 000 euros pour les contribuables croates.
Le système de santé public pointé du doigt
Cette affaire jette une lumière crue sur l’état préoccupant du système de santé public en Croatie. Déjà considéré comme défaillant par de nombreux observateurs, il se retrouve fragilisé par ces malversations à répétition, attisant la colère de la population. Des manifestations ont eu lieu devant le Parlement pour réclamer plus de transparence et une lutte accrue contre la corruption.
Les éléments mafieux dans les structures de l’État relèvent de la responsabilité politique de Plenkovic.
Extrait de la motion de défiance déposée par le parti d’opposition SDP
Malgré la fronde, Plenkovic s’accroche au pouvoir
Loin de faire profil bas, le Premier ministre a choisi le déni et la contre-attaque lors des débats au Parlement sur la motion de censure le visant. Qualifiant les accusations de « mensonges » et de « diffamation », Andrej Plenkovic a martelé avoir été « plus indigné que l’opposition » par ce scandale.
Une posture jugée insincère par ses détracteurs, mais qui semble avoir convaincu sa majorité. Avec 76 votes contre la motion et 64 pour, le Premier ministre conserve son poste, entamant ainsi son 3e mandat consécutif depuis sa victoire aux législatives d’avril dernier.
La corruption, talon d’Achille de la Croatie dans l’UE
Dix ans après son adhésion à l’Union Européenne, force est de constater que la Croatie ne parvient pas à endiguer le fléau de la corruption. Pointée du doigt par Bruxelles dès les négociations d’entrée en 2013, la lutte anti-corruption était un critère majeur pour intégrer le club européen. Une décennie plus tard, le problème semble toujours aussi prégnant.
Selon le dernier Eurobaromètre en date, 96% des citoyens croates considèrent la corruption comme généralisée dans leur pays. Un taux record au sein de l’UE, juste derrière la Grèce. Un constat alarmant qui souligne l’ampleur de la tâche pour assainir la vie publique. La persistance de ces affaires contribue à détériorer l’image du pays et la confiance des Croates envers leurs institutions.
Alors que le Premier ministre Plenkovic semble s’être sorti d’affaire pour cette fois, la question de l’efficacité de la lutte contre la corruption reste entière. Dans une Europe qui se veut exemplaire sur ces questions, la Croatie fait figure de mauvais élève. Un défi de taille pour ce petit pays des Balkans, qui aspire à renforcer sa place et sa crédibilité sur la scène européenne. La route s’annonce encore longue et semée d’embûches.